Jeu de go et mathématiques: des univers stratégiques

2 août 2016
par Camille Stassart
Durée de lecture : 5 min

Série (6) / « PassionS de chercheurs »

Assistant au département de mathématiques appliquées de l’Université catholique de Louvain (UCL). François Gonze porte également le titre de vice-champion de Belgique de Jeu de Go. Un jeu de plateau asiatique mobilisant stratégie et concentration.

Diplômé d’ingénieur en mathématique et d’actuariat à l’UCL, ce jeune chercheur y poursuit depuis 2014 une carrière académique. Ses recherches portent sur la théorie des graphes. Un domaine des mathématiques permettant, par exemple, de solutionner des problèmes liés aux réseaux.

Théorie des graphes et trafic aérien

« Je travaille plus particulièrement sur la théorie des automates, précise le mathématicien. Dans laquelle il existe une hypothèse appelée « la conjecture de Cerny » qui n’a encore ja-mais été prouvée. Et notre but est de démontrer sa véracité ».

Certains résultats ont récemment fait l’objet de publications dans les revues Discrete Mathe-matics & Theoretical Computer Science. Ainsi que dans le SIAM Journal on Discrete Mathe-matics.

En parallèle, François Gonze s’implique dans un autre projet sur le trafic aérien. Cette étude vise à améliorer, à l’aide d’outils de la théorie des graphes, la gestion du réseau aérien en Europe.

Un jeu millénaire

Logique et rationalité rythment le quotidien professionnel de François Gonze. Des univers qu’il ne quitte pas durant son temps libre. Depuis plusieurs années, son passe-temps préféré reste en effet le jeu de Go.

« C’est à la base un jeu chinois, inventé il y a plusieurs milliers d’années. C’est seulement aux 16e-17e siècles que le jeu est apparu au Japon, où il prit toutes ses lettres de noblesse », explique-t-il. “Chaque année, des parties étaient organisées par le shogun – le dirigeant du Japon – entre les meilleurs joueurs des meilleures écoles de Go, et ce pour distraire la Cour. C’était vrai-ment le jeu de référence à cette époque ».
Pour François Gonze, la découverte de ce jeu s’est faite à l’âge de 16 ans. « À ce moment-là, je jouais beaucoup aux échecs. Mais le jeu de Go m’a davantage plu et intéressé » indique-t-il.

Échec et go
On compare beaucoup les échecs et le Go car ce sont tous deux des jeux de stratégie. Pour le mathématicien de Louvain-la-Neuve, les concepts mobilisés sont cependant très différents.

Ecoutez Francois Gonze nous expliquer le jeu de Go

Concrètement, le jeu de Go se joue sur un quadrillage appelé Goban où deux joueurs se font face. Ils disposent chacun de « pierres », blanches ou noires, qu’ils doivent placer tour à tour à l’intersection entre deux lignes.

IMG_6764Le but est double : occuper un maximum d’espace sur le plateau, en construisant des « territoires » à l’aide des « pierres ». Et « capturer » celles de l’adversaire en les encerclant totale-ment. Le vainqueur sera celui qui aura placé et gagné le plus de pierres.

« La subtilité est de trouver un équilibre dans la construction de son territoire. Assez raisonnable pour capturer l’autre s’il s’y infiltre. Mais assez grand pour amasser plus de points que l’adversaire » explique le chercheur

 

Du site en ligne aux tournois internationaux

« Au début, j’ai beaucoup joué en ligne  avec d’autres joueurs à travers le monde. Ce qui m’a permis de progresser rapidement ». Raison d’ailleurs pour laquelle François Gonze s’enthousiasme pour ce jeu.

« C’est un jeu où la compréhension progresse avec le temps. Et plus on comprend, plus on s’améliore. On apprend continuellement de nouvelles choses. Ce qui donne un jeu très stimulant », indique-t-il.
Une activité ludique au départ qui est devenue avec le temps une véritable passion. Cela fait maintenant 10 ans que le chercheur se rend tous les mardis au club de Go de Louvain-la-Neuve.

« À côté du club, je continue à jouer en ligne quatre ou cinq parties par semaine. Et chaque jour j’essaie de résoudre de petits problèmes stratégiques que je trouve dans mes lectures sur le sujet ».

Vice-champion de Belgique

Même s’il ne se définit pas comme un joueur professionnel, François Gonze participe chaque année à des tournois. « J’ai remporté en 2014 et 2016 le tournoi de Leuven. Et je suis arrivé second cette année au Championnat de Belgique » sourit François Gonze.

UNE Photo Korean

Situé 2e au classement de la Fédération Belge du Jeu de Go (http://gofed.be/), le mathémati-cien a déjà représenté notre pays dans des tournois internationaux. Dont le World Amateur Go Championship (Chine) en 2012. Et la Korean Prime Minister Cup (Corée du sud), en 2008, 2009 et 2015.

Un atout sur son CV

Des déplacements qui ne posent pas de problèmes à l’Université de Louvain. Ce type d’activité de haut niveau étant au contraire plutôt encouragé.

« C’est un jeu de stratégie, de réflexion, qui cadre assez bien avec mon domaine de re-cherche. Je dirai que c’est même un avantage sur le CV » affirme le chercheur.

Car le jeu de Go a appris à François Gonze de nombreuses choses. Notamment la patience et la capacité à anticiper des actions.

« À ce jeu, il est nécessaire de préparer et d’envisager ses coups à l’avance, tout en gardant en tête notre but. Grâce à ça, je vois davantage les choses dans leur globalité » note le chercheur.

« Ce jeu m’a également appris à être davantage patient. Mais aussi à visualiser les choses de manière plus abstraites. Ce qui m’est incontestablement utile dans mon métier de chercheur en mathématiques », conclut-il.

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