Le numérique envahit l’enseignement supérieur

3 décembre 2014
par Raphaël Duboisdenghien
Durée de lecture : 4 min
 «La pédagogie universitaire à l’heure du numérique» sous la direction de Geneviève Lameul & Catherine Loisy. Edition De Boeck .VP 36 €
«La pédagogie universitaire à l’heure du numérique» sous la direction de Geneviève Lameul & Catherine Loisy. Edition De Boeck .VP 36 €

Les technologies Internet s’introduisent de plus en plus dans les universités comme le montre l’article «Multiplication de MOOC’S à l’UCL» de Daily Science du 9 septembre.

«Se priver de tels instruments cognitifs serait, à mon avis, désastreux pour l’enseignement supérieur», souligne Bernadette Charlier, directrice du Centre de didactique universitaire de Fribourg (Suisse) en préfaçant «La pédagogie universitaire à l’heure du numérique», aux éditions De Boeck.

L’ouvrage collectif prend racine dans des journées d’étude impulsées en France. Référence est faite aux Belges Jean-Marie De Ketele (UCL), Léopold Paquay (UCL), Xavier Roegiers (UCL), Marc Romainville (UNamur).

 

Proposer plusieurs portes d’entrée

 

La professeure Marianne Poumay a participé à ce dialogue entre chercheurs et praticiens. «Les innovations sont rarement à point de départ ou à composante uniquement technologique», relève la codirectrice du Laboratoire de Soutien à l’Enseignement Télématique de l’Université de Liège (LabSet).

«Quand une institution vise l’innovation pédagogique, il est nécessaire qu’elle propose plusieurs portes d’entrée à ses enseignants de façon à ce qu’ils puissent moduler leur investissement en fonction de leurs multiples priorités.»

 

Des sites Internet, des conférences interpellent les enseignants…

«Cette sensibilisation est cruciale au niveau d’une institution, car, tout en respectant la liberté individuelle de ne pas s’engager pleinement dans l’innovation pédagogique, elle peut s’avérer suffisante pour déclencher une prise de conscience. Et pour peu qu’elle soit considérée comme intéressante par les enseignants, servir de tremplin vers des activités qui nécessiteront un engagement plus important. A contrario, les suivis individuels, les programmes plus longs et les réels projets collégiaux, parfois accompagnés par des consultants externes, concernent moins d’enseignants. Mais débouchent avec plus de certitude sur des innovations et des changements profonds.»

 

Des leviers stimulent l’innovation

 

À l’Université de Liège, plus de 200 rapports rédigés par des enseignants après des séminaires obligatoires et le dépouillement de la littérature pédagogique ont permis d’identifier des leviers moteurs ou déclencheurs d’innovations.

Comme, repenser le lien entre objectifs, méthodes, évaluation. Augmenter la valeur des activités aux yeux des étudiants, notamment en expliquant mieux l’intérêt des cours, en les rapprochant du futur vécu professionnel ou citoyen. Rendre les étudiants plus actifs pour ancrer les apprentissages durablement et faciliter leur transfert. Introduire les technologies Internet. Pour permettre aux étudiants de piloter leur formation. Délivrer les enseignants de certaines tâches et les centrer sur ce qui pose le plus de problèmes aux apprenants. Soutenir les étudiants, en organisant, par exemple, de petits groupes.
Les cours des MOOC’S, les Massive Open Online Courses, drainent des milliers d’étudiants en ligne…

«Les enseignants pionniers de ces MOOC’S ont inventé de nouvelles façons de communiquer en tentant de maximiser leur apprentissage», relève la docteure en sciences de l’éducation Marianne Poumay. «Dans un MOOC, on ne reçoit guère de feedback que de collègues étudiants. Et on ne peut pas espérer une évaluation finale certifiée… Si ce n’est en payant pour un service annexe. Une fois passées leurs quelques maladies de jeunesse, les MOOC’S bouleverseront-ils réellement l’accès aux savoirs? Comment les universités s’adapteront-elles à cette offre parallèle? Réussiront-elles à en tirer parti et à les intégrer comme une richesse complémentaire aux programmes existants? L’avenir nous le dira.»

 

Associer les étudiants

 

Les chercheuses Geneviève Lameul, Université européenne de Rennes 2, et Catherine Loisy, École normale supérieure de Lyon, regrettent l’absence trop fréquente des étudiants dans l’agitation techno-pédagogique actuelle.

«Ce serait une piste à développer pour l’avenir. Positionner l’apprenant comme partenaire actif de la construction de connaissance sur la situation qu’il lui est proposé de vivre en formation. L’usage du numérique est en cela particulièrement accélérateur de ce déplacement des responsabilités comme le montre Marianne Poumay lorsqu’elle décrit les dispositifs mis en place pour répondre à ces besoins à l’Université de Liège.»

 

 

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