Salle de classes. Moniteur de CO2 dans l'air intérieur.
Salle de classes. Moniteur de CO2 dans l'air intérieur.

Quand c’est vert, on respire. Quand c’est rouge, on aère

4 septembre 2014
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 5 min

Maux de tête, irritation, problèmes de concentration, somnolence. Dans les bureaux, les salles de classes, de réunions ou encore dans les auditoires surpeuplés : le syndrome du bâtiment malsain guette. “Pourtant, il existe un moyen simple de se prémunir des problèmes concernant la qualité de l’air intérieur”, estime le Dr Catherine Bouland, directeur du Centre de recherches Santé environnementale et santé du travail (Ecole de Santé publique de l’ULB). “Il suffit d’aérer”.

 

Encore fait-il savoir quand et comment optimiser cette aération. C’est ici qu’un nouveau service proposé par une petite entreprise de la région liégeoise dirigée par un ancien enseignant peut faire la différence.

 

Nous proposons des détecteurs de qualité de l’air pour les écoles, les bureaux ou encore les crèches, indique Guy Wlodarczak, son gestionnaire. L’entrepreneur vient d’équiper de moniteurs de surveillance de la qualité de l’air toutes les classes de l’école maternelle et primaire Saint-Jean, à Liège. Ses boitiers surveillent principalement le taux de concentration en CO2. De quoi assurer une rentrée plus saine à ses élèves et leurs enseignants ?

 

Le CO2 comme indicateur du niveau de pollution dans les classes

 

“Dans un local clos où de nombreuses personnes sont présentes, on assiste au fil du temps à une augmentation des concentrations de divers polluants”, rappelle le Dr Bouland. “Il s’agit par exemple du CO2 provenant de la respiration, de composés organiques volatils (COV), des poussières, des polluants provenant des matériaux, de colles utilisées dans le bâtiment, de produits de nettoyage, etc. Le CO2 est un bon indicateur du niveau de pollution. C’est un premier pas dans la gestion de la qualité de l’air”, estime-t-elle. “Mais il faudra sans doute aller plus loin si on veut réellement s’attaquer à la problématique de ce type de pollution. En mesurant par exemple les taux de COV. Il est vrai que dans ce cas, les budgets à prévoir seront nettement plus importants.”

 

Le CO2 est présent dans l’air extérieur dans des concentrations oscillant autour de 400 ppm (parts par million). Les études ont déjà montré qu’à partir d’une concentration de 600 ppm, on assiste à une certaine perte de concentration lors de la réalisation de tâches cognitives. Le taux d’alerte défini par l’OMS est toutefois de 1000 ppm. On observe alors des pertes de réflexes, de concentration chez l’être humain. Chez les enfants et les étudiants, cela se traduit par de moins bonnes performances d’apprentissage.

 

“Les moniteurs installés à Liège sont dotés de trois diodes lumineuses. Ils sont réglés sur d’autres valeurs. Ceux-ci peuvent être adaptés en fonction des demandes de chaque utilisateur. Quand c’est vert, tout va bien. Le taux de CO2 est inférieur à 800 ppm”, précise Guy Wlodarczak. “Le signal est orange quand la concentration oscille entre 800 et 1200 ppm.  Au-delà, on est dans le rouge et un signal sonore retentit”.

 

Utile ce genre de détecteurs? “Le problème avec le CO2, c’est qu’on ne le sent pas et qu’on s’y habitue”, souligne le Dr Bouland. “Ce n’est pas comme une mauvaise odeur qui nous fait rapidement ouvrir la fenêtre”. Mais elle insiste : il n’est pas le seul polluant à prendre en compte.

 

Une étude européenne sur 5000 élèves

 

Catherine Bouland vient de participer à une vaste étude européenne sur la question: le projet Sinphonie  (“School Indoor Pollution and Health Observatory in Europe”).

 

“Nous avons travaillé selon un protocole standard à l’ensemble des partenaires européens de ce projet”, précise-t-elle. “Y compris dans les cinq écoles belges participantes” (une à Bruxelles, deux en Flandre et deux en Wallonie).  Au total, 5.000 élèves âgés de 8 à 11 ans, issus de 25 pays, ont été concernés. Et là, ce n’est pas uniquement le CO2 qui a mobilisé les chercheurs, mais aussi un important cocktail d’autres polluants comme ceux présents dans les produits de nettoyage, les allergènes, les poussières susceptibles de contenir des endotoxines (toxines situées dans la parois externe de certaines bactéries), les COV etc.

 

Le projet a aussi pris en compte divers paramètres plus généraux comme l’environnement dans lequel se situent les écoles (urbaines, campagnardes), le trafic automobile, la présence ou non d’industries à proximité, etc. De quoi alimenter une réflexion plus large sur l’implantation de nouvelles écoles, sur le type de chauffage à y privilégier, le système de ventilation à envisager, l’impact d’une construction “passive” sur la qualité de l’air, etc.

Le rapport final de ce projet est en cours de rédaction.

 

 

Le syndrome des bâtiments malsains

 

Le SBS ou syndrome des bâtiments malsains (sick building syndrome) se définit comme un excès de plaintes et de symptômes non spécifiques (céphalées, troubles de la concentration, asthénie, irritation cutanée ou des muqueuses nasales, oculaires et des voies aériennes supérieures) survenant chez des occupants de bâtiments non industriels, indique l’Observatoire (français) de la qualité de l’air intérieur. Il présente des origines multifactorielles mettant en jeu des nuisances environnementales (présence de COV et de biocontaminants, bruit, luminosité insuffisante, ventilation défectueuse, etc.) auxquelles s’ajoutent des facteurs socioprofessionnels et psychologiques, comme les conditions et l’organisation du travail.

 

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