Les rides de l’éléphant d’Afrique? Une question de survie

4 octobre 2018
par Daily Science
Durée de lecture : 3 min

On connaissait déjà les travaux du Pr Michel Milinkovitch, un ancien chercheur de l’ULB qui mène désormais sa carrière en Suisse, en ce qui concerne la modification de la couleur de la peau des caméléons. Voici que le généticien et son équipe viennent de révéler pourquoi celle des éléphants d’Afrique présentait un aspect extrêmement ridé, et ce même à des échelles minuscules. Une caractéristique qu’on ne retrouve pas sur la peau des éléphants d’Asie…

Des papilles et des vallées

Les chercheurs ont découvert que ces crevasses chez les éléphants d’Afrique sont des fractures dans l’épiderme. Les biologistes ont constaté que le derme de l’éléphant ne constitue pas une surface plane comme chez les humains, mais forme une structure semblable aux vallées alpines, faites de pics de minuscules montagnes, nommées papilles, et de vallées creuses.

«Nos analyses d’échantillons de peau d’éléphants montrent que les crevasses suivent le dessin formé par les microvallées qui entourent ces micromontagnes.»

Comme les crevasses sont absentes chez le nouveau-né, dont la peau est encore souple, les chercheurs ont pensé qu’elles se formaient à cause de l’extrême sécheresse de la peau des pachydermes qui se rétrécirait avec le temps avant de craquer, comme dans la boue séchée.

Antonio Martin, chercheur dans le laboratoire de Michel Milinkovitch, a alors construit un modèle informatique pour tester cette hypothèse. Les chercheurs se sont aperçus que le modèle générait des crevasses qui traversaient également des papilles, cas de figure qui n’existe pas chez l’éléphant.

Ils ont alors utilisé le même modèle mathématique pour tester une seconde hypothèse : la peau craque-t-elle suite à son épaississement spectaculaire sur une surface microvallonnée ? Les résultats de ces analyses ont indiqué que l’épaississement de la peau provoque effectivement de fortes tensions entre les papilles, aboutissant à un pliage de l’épiderme qui craque exclusivement dans les vallées.

Régulation thermique

Toutefois, ces fractures profondes sont absentes chez l’éléphant d’Asie bien que sa peau soit également microvallonnée. L’explication se trouve dans la fonction de ces crevasses profondes.

«La peau de l’éléphant d’Afrique peut stocker 5 à 10 fois plus d’eau qu’une peau lisse. L’eau s’infiltre puis est stockée dans ces crevasses et s’évapore lentement, permettant à l’animal de se refroidir pendant une longue période», explique Michel Milinkovitch.

En outre, ces crevasses permettent à la boue de rester accrochée à la peau, constituant une couche protectrice contre le soleil et les attaques incessantes des insectes.

«Si l’éléphant d’Asie n’a pas de crevasse, c’est probablement parce qu’il vit dans un climat moins chaud et plus humide, où le refroidissement par évaporation est beaucoup moins efficace», poursuit le biologiste. Il n’a donc pas besoin d’une peau craquelée.

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