L’homme qui faisait danser les plantes illumine « Wonderful Wallonia »

12 mars 2019
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 5 min

SÉRIE : « Rendez-vous à SxSW » (2)

Dans les travées de South by South West (SxSW), le festival des arts et des technologies numériques d’Austin, au Texas, pour briller, il faut savoir se démarquer. Le stand de « Wonderful Wallonia », qui met en valeur les créatifs et les innovateurs wallons et bruxellois dans ces domaines brille sans aucun doute par son originalité.

L’espace est divisé par des cloisons ouvertes qui donnent sur un nid coloré où des images quelque peu décalées décrivent de manière statique « une Terre wallonne fertile », comme le dit volontiers Cédric Sabato, directeur artistique de l’association Art-chétype. Cette association a imaginé les lieux pour le compte de l’AWEX (l’Agence wallonne à l’exportation) et de WBI (Wallonie-Bruxelles International).

Clichés (animés) sur la Wallonie

Mais quand ces tableaux naïfs, avec son Gilles de Binche, ses gaufres, son chocolat, son lion de Waterloo et autre saxophone sont observés à travers l’application de réalité augmentée “Wonderful Wallonia”, le stand s’anime et c’est un régal.

« Bon, nous avons choisi des clichés décrivant ce que les Américains connaissent probablement avant tout de la Wallonie », explique Cédric Sabato. « Nous avons travaillé avec un artiste de chez nous: Patrick Croes ».

« Sur une même esthétique, nous déclinons aussi une nouvelle identité visuelle pour les entreprises innovantes wallonnes qui ont fait le déplacement jusqu’à Austin. Elles apparaissent sur les panneaux latéraux du stand qui s’animent également grâce à la réalité augmentée. L’espace réel devient alors vivant. Résultat : la fresque imprimée interpelle le visiteur et capte son attention ».

« Pour un festival créatif, il fallait que nous aussi soyons « créatifs » », indique Marie Beheyt, du service « Recherche » de WBI. « C’est une réussite ».

Le stand « Wonderful Wallonia » n’a rien à envier à ceux d’autres délégations régionales ou nationales. La créativité d’Art-chétype était une bonne pioche. Et ce sont la quinzaine d’entreprises innovantes, créatives et digitales wallonnes hébergées sur le stand qui bénéficient directement de cette visibilité.

Street Art en réalité augmentée à Mons

Art-chétype n’en est pas à son coup d’essai. Spécialisée dans la conception de projets multimédias et numériques, on avait déjà pu apprécier ses réalisations à Mons et à Charleroi.

« En novembre 2018 nous avons participé à la version bêta d’une opération de Street Art en réalité augmentée dans la ville de Mons », explique Cédric Sabato. Une expérience réalisée en collaboration avec TechnocITé.

« Nous avons proposé, aux artistes, un nouveau médium qu’ils ont pu détourner comme ils le voulaient. Au départ de leurs fresques réparties dans la ville, le passage à la réalité augmentée a apporté une dimension supplémentaire à leurs œuvres. Ce qui a permis d’ajouter un discours différent à ce que l’on pouvait effectivement voir physiquement en ville. Le dialogue entre l’espace réel et ce que permet la réalité augmentée apportait une nouvelle richesse, un autre regard, une réflexion différente sur leurs créations. Cela a permis à chaque visiteur, une personnalisation de leur découverte ». C’est cette même approche qui anime les fresques du stand wallon, à SxSW.

Livres interactifs à Charleroi

À Charleroi, ce sont des livres interactifs réalisés avec la collaboration du CHU Marie Curie qui ont mobilisé l’équipe d’Art-chétype. Via une application, l’idée est de proposer ici un outil qui familiarise et dédramatise le passage d’un enfant à l’hôpital.

Le livre interactif donne un rôle actif aux enfants. Ce qui leur permet de troquer leur statut de patients pour celui de soignant, par exemple pour soigner un petit panda qui a un problème à l’oreille.

« Lord of condoms »

Dans le même ordre d’idées, et en utilisant les mêmes technologies, Art-chétype a également collaboré avec la plateforme de prévention sida. Ici c’est un serious game qui a été développé : « Lord of condoms ». Il vise à informer un public jeune sur toute une série de maladies sexuellement transmissibles. Et sur la manière de s’en protéger !

« Vegetal ballet » à l’Université de Mons

La créativité du directeur artistique d’Art-chétype s’était déjà exprimée d’une tout autre manière voici deux ans, lors d’une collaboration avec des chercheurs de l’Université de Mons (UMons). « Il s’agissait d’un projet de « Vegetal Ballet », précise Cédric Sabato. « Au cours de celui-ci nous faisions danser deux types de plantes sensibles chacune à un stimulus différent ».

Desmodium gyrans a été entrainé à se déhancher sur une nocturne de Chopin. Un exercice d’apprentissage qui a duré deux semaines. Tandis que Mimosa pudica réagissait pour sa part à un stimulus tactile. Cette plante se referme quand elle est frôlée. « Nous lui avons donc appris à se refermer toutes les heures via le souffle d’un ventilateur ».

Quand le mimosa était ainsi activé, le faible signal électrique produit par le végétal stressé était capté et servait à actionner la nocturne de Chopin, qui à son tour faisait danser Desmodium gyrans

« Une expérience qui interpelle sur la sensibilité des plantes et sur nos relations avec les végétaux », estime Cédric Sabato.

Sur le stand de Wonderful Wallonia, malgré les mouvements d’air incessants et les stimuli auditifs, personne ne danse… On cause business, technologies, innovation numérique.  Par contre en soirée, quand l’exposition ferme ses portes, les concerts du festival SxSW enflamment tous le centre-ville d’Austin. Et là, le déhanchement prend bien sûr le dessus !

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