Toutes les couleurs du sol wallon sont à Gembloux

16 novembre 2015
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 4 min

Série (1) : « Regardez où vous mettez les pieds! »

 

Brun clair, brun foncé, gris, beige, noir? De quelle couleur est la terre ? Plus exactement: quelles sont les couleurs du sol? Et pourquoi? En cette année internationale des sols, décrétée par les Nations-Unies, la faculté gembloutoise AGro-Bio Tech de l’Université de Liège (ULg) propose cette semaine de découvrir l’étonnante diversité de cette terre qui nous nourrit (notamment) et de ses richesses.  Elle donne rendez-vous aux curieux au Palais abbatial de Gembloux, pour deux expositions à la fois instructives et surprenantes!

 

« Rien qu’en Wallonie, la palette de couleurs est impressionnante », indique le Dr Jean-Thomas Cornelis, chargé de cours en Science du sol à Gembloux Agro-Bio Tech. Il pointe la carte pédologique de Wallonie qui accueille les visiteurs. Elle est bariolée et encadrée par une belle collection multicolore d’échantillons de sols.

 

« Dans cette exposition scientifique et didactique ouverte à tous, nous voulons illustrer cette diversité, mais aussi montrer la disparité des sols, son utilité, sa place dans les échanges avec la biosphère, l’hydrosphère et bien entendu l’atmosphère », précise le chercheur.

 

Couleurs, textures, fonctions, diversité des sols

 

Parce que bien évidemment, un sol respire. Une des expériences proposées sur place l’illustre parfaitement. Un échantillon de sol foncé, riche en matières organiques, produit davantage de CO2 qu’un sol clair, plus minéral.

 

Expérience sur la respiration des sols.
Expérience sur la respiration des sols.

 

Les fonctions du sol sont détaillées, tout comme les menaces qui pèsent sur lui: pollution, glissement de terrain, perte de matière organique, acidification, compaction, érosion.

 

« Nous n’avons pas le même sol partout », reprend le pédologue gembloutois, à l’origine de l’exposition « Le sol dans tous ses états ». « Nous le montrons ici, en parlant des couleurs mais aussi des textures, du rôle des sols, de leur impact dans le paysage… ».

 

Différents profils (des coupes) aident également à comprendre comment les sols se structurent, depuis la surface jusqu’à un bon mètre cinquante de profondeur, et ce dans divers biotopes.

 

D’étonnantes « pelures de terres »

 

Pour bien saisir toutes les nuances pédagogiques qu’offre notre planète, il faut traverser la Faculté, quitter la salle Mohimont et gagner le cloître du Palais abbatial. C’est là que le géologue Folkert van Oort, et son épouse Dominique (biologiste), proposent de découvrir certaines de leurs œuvres chamarrées: des « peelings » de sols réalisés en France, du côté de Paris, dans le Sud, au pied du Mont Ventoux, ou encore en Allemagne et aux Pays-Bas.

 

A leurs moments perdus, ces deux scientifiques de l’Institut national (français) de recherche agronomique (INRA), réalisent de tableaux géologiques fascinants. Là où le sol affleure et propose des structures et des couleurs intéressantes, comme dans les carrières, le couple, qui se définit d’abord comme scientifique avant d’être artiste, prélève une fine couche de sol.

 

« Nous faisons d’abord couler une résine sur la partie de sol qui nous intéresse », explique Dominique van Oort. « Deux jours plus tard, quand elle a durci, nous la décollons de la surface. Elle arrache alors une fine pellicule du sol. Ce lourd feuillet est alors retaillé et collé sur un panneau pour être transformé en tableau géologique ».

 

Le résultat? Surprenant! Et à découvrir tout cette semaine à Gembloux. En voici un aperçu. Des photos prises lors de la mise en place des œuvres dans le cloître par les deux « scientartistes ».

 

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Une expo certes esthétique, mais aussi didactique. Chaque œuvre a son histoire… géologique. Et Folkert van Oort ne se prive pas de la détailler. « Ici, les couleurs résultent des altérations du fer à l’ère tertiaire. Là, les tons clairs et rouille sont produits par des sables et des limons, en Allemagne, déposés suite aux glaciations ».

 

Mais ce qu’il préfère, ce sont les nuances sombres. « Comme ces tableaux réalisés à partir d’échantillons provenant d’anciennes landes à bouleaux et de forêts de pins, qui produisent des sols organiques hyper-acides, et où le colorant principal est l’humus noir », précise-t-il. Avant de conclure « Ici, ce sont les textures qui, au final, subjuguent ».

 

Qui a dit que la géologie et la pédologie étaient des sciences ternes?

 

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