Les oedèmes « post-cancer » mieux pris en charge

20 octobre 2014
par Raphaël Duboisdenghien
Durée de lecture : 4 min

Depuis le mois d’août, l’Unité de lymphologie s’affiche sur le site de l’Institut Jules Bordet à Bruxelles. Elle accueille notamment les patients traités pour un cancer. Ces patients, surtout des femmes, ont développé un «lymphœdème», un gonflement au niveau de la main, du bras, de la jambe, du sein ou, dans certains cas, du visage.

 

Pr Pierre Bourgeois  Institut Bordet lymphologie
Pr Pierre Bourgeois
Institut Bordet lymphologie

Les spécialistes du système lymphatique de l’Unité dirigée par le professeur Pierre Bourgeois reçoivent chaque mois une vingtaine de personnes avec ces complications. Des patients peu pris en charge par les cliniciens.

 

6 à 30 % des opérées d’un cancer du sein sont concernées

 

«Deux tiers des lymphœdèmes apparaissent endéans les deux années qui suivent l’opération et/ou la radiothérapie», explique Pierre Bourgeois qui a introduit en 1978 les investigations scintigraphiques du système lymphatique à l’Institut Bordet. «Après ce délai, ils peuvent survenir jusque 20 ans plus tard».

 

«Six à trente pour cent des opérées d’un cancer du sein développent un gros bras. Un opéré sur trois d’un mélanome d’un membre inférieur risque d’avoir une grosse jambe… Cela peut devenir catastrophique », estime le spécialiste.

 

« Nous disposons de techniques qui permettent de démontrer où se situe le problème. Un gros bras n’est pas un autre. Parfois, ce n’est pas une question de retour lymphatique mais de retour veineux ».

 

D’abord la physiothérapie

 

Le résultat des examens permet de proposer un traitement adapté à chaque cas. L’information est neutre. La chirurgie n’est proposée que si la physiothérapie a échoué. Un examen des vaisseaux lymphatiques est nécessaire pour qu’il y ait remboursement de certains traitements. Les imageries en fluorescence des ganglions lymphatiques sont en cours d’évaluation. Et celles des systèmes lymphatiques de malades présentant des œdèmes seront introduites dans les mois à venir.

 

Le système lymphatique est un des éléments clés dans la prise en charge des cancers et de leurs conséquences. Il est présent partout dans l’organisme humain, à l’exception notable du cerveau.

 

Les vaisseaux lymphatiques prennent naissance dans tous les tissus. Leur fonction est d’y reprendre les liquides, les déchets cellulaires, les cellules qui pourraient s’y accumuler. Et de les ramener dans la circulation sanguine. Placés sur le trajet des vaisseaux, les ganglions lymphatiques fonctionnent comme des pompes, des filtres. Ils sont essentiels pour le démarrage et le développement des réponses immunitaires.

 

Des atteintes du système lymphatique peuvent apparaître après des infections, des traumatismes, une opération, une radiothérapie, des traitements médicamenteux. Suite à l’extension d’une maladie cancéreuse dans les ganglions lymphatiques. Ces effets se traduisent notamment par des œdèmes, des infections cutanées.

 

Evaluer le risque avant l’intervention médicale

 

Selon le président du Comité scientifique de l’European Society of Lymphology (ESL), il est possible de savoir si on risque de développer un lymphœdème. «Cela implique un examen du système lymphatique. Soit avant l’opération, pendant, ou après. Si on redoute cette complication, il suffit de formuler les questions et de me les envoyer par mél. De demander un rendez-vous pour être informé du risque, de l’intérêt de réaliser cet examen. Des conseils permettent d’éviter les complications. D’expérience, je peux dire que mes confrères ne pensent généralement qu’en dernier lieu au système lymphatique qu’ils connaissent peu, sinon pas du tout. Ils n’ont pas reçu l’information ou la formation pendant leurs études universitaires.»

 

Une expertise et une prise en charge pluridisciplinaire

 

En cas d’œdème, les malades sont pris en charge et suivis, sans a priori thérapeutique, par une équipe pluridisciplinaire d’infectiologues, dermatologues, généticiens, spécialistes en imagerie, physio-kiné-thérapeutes, diététiciens, psychologues… Des traitements sont proposés et mis en œuvre. Les patients sont aussi orientés vers des spécialistes médicaux et paramédicaux susceptibles de réaliser les traitements adéquats.

 

L’Unité de lymphologie et le Service de kinésithérapie proposent à certains de leurs patientes et patients avec œdèmes, d’un ou des membres, des week-ends de prise en charge physique intensive personnalisée. En moyenne, l’excès volumique est réduit d’un tiers au terme de ces brefs séjours.

 

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