Faut-il interdire toute forme de publicité pour l’alcool en Belgique?

29 avril 2019
par Daily Science
Durée de lecture : 3 min

Pour les scientifiques qui se sont penchés sur les réglementations qui encadrent le marketing des boissons alcoolisées en Belgique et dans divers pays voisins, le constat est évident. Il faut interdire toute forme de publicité incitant à leur consommation. C’est une question de santé publique. Les chercheurs sont convaincus que cette interdiction doit faire partie d’une politique globale et intégrée en matière d’alcool.

Tel est l’enseignement principal de l’étude « Almoregal » à laquelle ont participé les équipes de l’ASBL Univers Santé, qui assure la promotion de la santé en milieu jeune et étudiant à Louvain-la-Neuve, de l’Université de Gand et du VAD (le Centre d’expertise flamand sur l’alcool et les drogues).

Marketing du secteur auto-balisé

Dans le cadre de ce projet de recherche financé par la Politique scientifique fédérale (BELSPO) et le Service Public Fédéral « Santé Publique », les chercheurs ont examiné la réglementation qui encadre le marketing des boissons alcoolisées.

Consommation d'alcool en Belgique, graphique issu du rapport de l'OMS "Global Status report on alcohol and health 2018".
Consommation d’alcool en Belgique, graphique issu du rapport de l’OMS “Global Status report on alcohol and health 2018“.

 

« Depuis 2005, il existe un accord entre l’industrie qui produit des boissons alcoolisées, le secteur de l’Horeca, les publicitaires et les associations de consommateurs pour réguler la publicité autour des boissons alcoolisées », rappellent les chercheurs. « Cet accord balise le marketing en la matière. Mais celui-ci est aussi insuffisant si on entend agir au niveau de la santé publique. Il n’implique quasiment aucune règle imposant des restrictions à la diffusion des publicités pour les boissons alcoolisées.»

Il ressort de cette étude qu’il ne s’agit pas de tenir uniquement compte du contenu de la publicité, mais de la fréquence à laquelle les citoyens y sont confrontés. Trop présente, la pub induirait une vision trop positive des boissons alcoolisées, ce qui pousserait à une augmentation de la consommation.

L’interdiction, une nécessité de santé publique

Afin de protéger efficacement des méfaits liés à une trop grande consommation d’alcool, les chercheurs plaident pour une interdiction complète de la publicité et d’autres actions de promotion en Belgique. Ils admettent volontiers qu’une telle interdiction pourrait avoir des conséquences d’ordre financier pour les producteurs d’alcool et les autres secteurs bénéficiant directement de cette activité de promotion. « Mais il s’agit néanmoins d’une nécessité de santé publique », écrivent-ils.

« Cette interdiction n’aura vraisemblablement pas de conséquences significatives pour les tiers, comme les organisateurs d’événements qui sont parrainés par les entreprises proposant des produits alcoolisés », estiment les scientifiques. “En France, l’interdiction de la publicité pour le tabac et les boissons alcoolisées a fait émerger d’autres sources de sponsorings”.

Restreindre le contenu de la publicité à une information sur le produit

Interdire la promotion ne signifie pas que les producteurs d’alcool ne pourront plus diffuser d’informations sur leurs produits tant que celles-ci ne concernent pas une incitation à la consommation. Pour que tout soit clair, la réglementation devrait préciser ce qui est autorisé et ce qui est formellement interdit.

Actuellement, en Belgique, la vérification du respect des règles de la Convention en matière de publicité pour l’alcool est effectuée par le Jury d’Ethique Publicitaire (JEP). La promotion de la santé publique n’est cependant pas l’objectif du JEP. Les chercheurs indiquent que ce système d’autorégulation n’est probablement pas la meilleure option pour protéger la santé.

Établir une politique  globale

En complément à une restriction du marketing, les responsables politiques devraient, selon les chercheurs, considérer d’autres mesures:  limiter  l’offre d’alcool, augmenter  son prix et revoir à la hausse l’âge légal concernant l’achat d’alcool. Le tout dans le cadre d’une politique globale et intégrée. Le dernier rapport de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) sur l’alcool ne disait pas autre chose.

 

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