De son bureau, le Secrétaire perpétuel de l'Académie royale jette un certain regard sur le pays, son histoire, son avenir.
De son bureau, le Secrétaire perpétuel de l'Académie royale jette un certain regard sur le pays, son histoire, son avenir.

Déconstruire la Belgique ? Une rencontre avec Hervé Hasquin

17 novembre 2014
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 3 min

PODCAST

 

Pour assurer un avenir à la Belgique, il faut passer par la case « déconstruction ». La thèse avancée par le Dr Hervé Hasquin, Secrétaire perpétuel de l’Académie royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique, risque de surprendre.

 

"Déconstruire la Belgique? Pour lui assurer un avenir?" Par Hervé Hasquin, éditions "L'Académie en poche".
“Déconstruire la Belgique? Pour lui assurer un avenir?” Par Hervé Hasquin, éditions “L’Académie en poche”.

L’historien, homme politique, recteur puis président du conseil d’administration de l’Université Libre de Bruxelles (entre 1982 et 1995), ajoute aussitôt : « l’avenir de ce pays passe par la politique du Lego ». Cette phrase résume, par ailleurs, la conclusion de son livre, Déconstruire la Belgique? Pour lui assurer un avenir?  signé aux Editions « L’Académie en poche ». La politique du Lego ? Un montage de petites briques, de petites entités, qui ensemble forment un tout cohérent.

 

Une plasticité indispensable

 

« La situation est limpide », dit-il. « La Belgique est un état quasi confédéral qui ne dit pas son nom. Elle est le fruit d’une longue évolution ». Une évolution qui, à ses yeux, ne peut que se poursuivre. « Nous venons de connaître une sixième réforme de l’Etat », continue-t-il. « Il y en aura une septième, une huitième… C’est la condition à laquelle est soumise la Belgique si elle veut continuer à vivre. C’est d’ailleurs cette plasticité qui lui a permis de survivre jusqu’à présent ».

 

« Une plasticité qui caractérise tout système vivant, toute entreprise dynamique », précise-t-il. « Si on fait un bilan de cette évolution, elle est inéluctable dans ce pays pragmatique, où les diverses communautés ne se haïssent pas mais où elles s’ignorent de plus en plus. Elles revendiquent régulièrement plus d’autonomie et cela va s’accroître avec le temps ».

 

Et l’historien de rappeler dans son livre comment nous en sommes arrivés là : une révolution bourgeoise francophone en 1830, la naissance d’un mouvement flamand, des contextes économiques qui ont évolué…

 

Qui a fabriqué la nation flamande ? La Belgique francophone.

 

« C’est la Belgique francophone qui a fabriqué, d’une certaine façon, la nation flamande », souligne-t-il. « Une nation flamande qui, depuis les années 1960, a commencé à débaptiser toutes les institutions à caractère national. Le mot “belge” a disparu en Flandre a été remplacé par l’adjectif “vlaams”, c’est à dire “flamand”. Un phénomène qu’on n’a pas connu du côté francophone ». Pourquoi ? Il nous l’explique ici de vive voix.

 

 

Hervé Hasquin évoque aussi la question de la Monarchie dans ce contexte historique. Il parle de « renversement des sociologies ». En 50 ans, les Wallons présentés comme de dangereux républicains sont devenus des fervents défenseurs de la famille royale. Aujourd’hui, c’est plutôt en Flandre qu’elle est en perte de vitesse. Cela tient au nationalisme flamand. Un nationalisme qui s’appuie sur une certaine opulence économique.

 

L’échec de « l’identité belge »

 

La fabrication d’une identité belge a échoué, constate Hervé Hasquin, docteur en Philosophie et Lettres. Et ce n’est pas faute d’avoir mis à contribution des historiens et des hommes de lettres. « Ils volèrent souvent au secours de l’entreprise Belgique avec talent mais sans guère de succès », note-t-il. Aujourd’hui, dans son livre, Hervé Hasquin « déconstruit » la Belgique pour mieux la comprendre et peut-être lui réserver un avenir. Un avenir placé sous le signe du « Lego ». Une construction souvent alambiquée, complexe, difficile à cerner mais qui à ses yeux est aussi la signature d’une grande démocratie.

 

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