Entrainement de pur-sangs à Dubaï
Entrainement de pur-sangs à Dubaï. © Christian Du Brulle

Innovation: un écouvillon pour chevaux mis au point à l’UNamur

11 novembre 2021
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 5 min

Tout comme les fameux tests PCR réalisés dans le nez, les voies respiratoires supérieures des chevaux sont également le siège de frottis effectués par écouvillons. Chez ces animaux, il ne s’agit cependant pas de détecter la présence du virus du Covid, mais bien de traquer d’autres pathogènes susceptibles d’affecter leur santé, comme la grippe ou l’herpès. Et la longueur de la tige utilisée chez le cheval est bien entendu proportionnelle à la taille de l’animal.

« Elle fait environ une septantaine de centimètres de long », explique le Pr Stéphane Lucas, de l’Unité de Recherche Laboratoire d’Analyse par Réaction Nucléaire (LARN), à l’Université de Namur. Le physicien mène des recherches aussi bien appliquées que fondamentales, notamment en science des matériaux. « Ce que les vétérinaires utilisent actuellement est un dispositif rigide. Il est fabriqué aux Etats-Unis et ressemble à un très long coton-tige disposé dans une paille en plastique rigide ouverte », précise-t-il.

Un projet de recherche FNRS comme point de départ

« Le problème, c’est que ces longues tiges doivent traverser diverses parties des voies respiratoires hautes de la cavité nasale du cheval avant d’arriver au site de prélèvement utile », détaille le Dr Sébastien Penninckx, actif au sein du même laboratoire. « Les vétérinaires raclent donc toute une série de bactéries qui sont naturellement présentes dans la fosse nasale avant d’arriver là où le prélèvement est le plus intéressant. Résultat: le coton-tige est déjà saturé quand il arrive dans le nasopharynx », précise le chimiste.

Avec l’aide du Fonds de la recherche scientifique (FNRS), qui a financé leurs travaux dans le cadre d’une appel spécial à projets de recherche spécialement orienté « Coronavirus », le groupe des deux scientifiques namurois a élaboré un dispositif (Equiswab) permettant d’éviter ce genre de problème. Il se présente sous la forme d’une sorte d’endoscope souple réalisé en mousse. 

Ecouvillon EquiSwab, UNamur. © Christian Du Brulle
Ecouvillon EquiSwab, UNamur. © Christian Du Brulle

Dans cette gaine de protection se trouve une fine tige munie d’une zone de frottis. Elle n’est déployée  qu’une fois arrivée dans le fond de la cavité nasale de l’animal. Quand le prélèvement a été réalisé, cette extrémité de l’écouvillon est rentrée dans la gaine de protection, et le dispositif est ôté du nez du cheval.

De la détection de pathogènes à l’insémination

A Dubaï, où se déroule cette semaine une mission économique et scientifique wallonne, organisée par l’Awex et le service « Recherche » de l’agence Wallonie-Bruxelles International, les deux scientifiques ont présenté leur dispositif à toute une série d’éleveurs et de gestionnaires d’écuries. L’accueil qui leur a été réservé a été enthousiaste. C’est avant tout la souplesse de leur dispositif qui a été saluée. « Cette souplesse permet des prélèvements moins traumatisants pour l’animal. Mais nous avons également été amenés à réfléchir à une utilisation alternative de notre dispositif », reprend le Dr Penninckx, qui pilote ce projet. « Equiswab » pourrait aussi être très intéressant pour d’autres interventions vétérinaires, par exemple dans le cadre de l’insémination des juments », souligne-t-il.

Pour les deux scientifiques, leur passage à Dubaï connaîtra clairement des prolongements, au Moyen-Orient comme en Belgique. Et autant en ce qui concerne les équidés que les dromadaires de course.

« Certaines maladies respiratoires chez le cheval peuvent être asymptomatiques », souligne encore le Dr Penninckx. Celles-ci peuvent avoir un impact sur les performances sportives de l’animal. Un test pour savoir avant une course si le cheval est malade ou non peut être précieux pour son propriétaire. Ou encore pour éviter le développement d’une épidémie du genre de celle que le secteur équin a connu en début d’année en Europe, où un cheval a été à l’origine d’une contamination massive d’herpès à la suite d’une course ».

Un milliard de chiffre d’affaires

Les deux scientifiques namurois ne sont pas les seuls à être venu présenter leur innovation à Dubaï. Six entrepreneurs wallons ont également fait le voyage vers les Emirats Arabes Unis.

« La filière équine est importante en Région wallonne », commente Pascale Delcomminette, administratrice générale de l’Awex et de WBI. « Elle figure parmi les cinq secteurs que nous voulons mettre en valeur dans la région, avec l’agro-alimentaire, le tourisme, le multimédia ainsi que la mode et le design ».

A lui seul, le secteur équestre en Wallonie représente un milliard d’euros de chiffre d’affaires par an. 

Le cluster équin wallon Equisfair regroupe une cinquantaine de membres actifs dans tous les domaines de la filière : aliments, compléments alimentaires, élevage, aménagement d’infrastructures, clôtures, produits de soins, biotechnologies, pharmaceutique, communication, transport, organisation d’événements, applications.

Il collabore également avec le secteur universitaire, les fédérations équestres, les écoles et les centres de recherche.

Pied-à-terre en Wallonie

Mahmood Anzac © Christian Du Brulle
Mahmood Anzac © Christian Du Brulle

Si l’innovation wallonne dans le secteur intéresse les Dubaïotes, la Wallonie elle-même se montre aussi attractive pour ceux-ci. Mahmood Anzac en est un vivant exemple. Cet éleveur et propriétaire de chevaux d’endurance installé dans l’émirat n’a pas hésité à également investir en Wallonie.

Il a acquis en 2016 une ferme à Wanne (province de Liège). Après avoir quitté son ancien pied-à-terre au Royaume-Uni, suite au Brexit, il passe désormais plusieurs mois par an en Wallonie avec de ses chevaux. « Entre juin et septembre, la chaleur dépasse les 45 degrés aux Emirats », explique-t-il. « A cette période de l’année, la saison des courses est en sommeil. Pour les chevaux, il fait beaucoup trop chaud ». D’où ses séjours estivaux en Belgique d’où il fait courir ses pur-sangs pendant quelques mois.

Haut depage