Pre Isabelle Meuret © François Heinderyckx

Isabelle Meuret, un dialogue entre langues, cultures et disciplines

14 août 2020
par Camille Stassart
Durée de lecture : 5 min

Série (5/5) :  Quand les scientifiques belges font carrière au bout du monde 

Chercheuse et professeure d’anglais et des cultures du monde anglophone à l’ULB, Isabelle Meuret mène actuellement une mission scientifique d’un an à la très réputée Université de Columbia, célèbre pour décerner le prix Pulitzer.

Isabelle Meuret est connue pour son expertise dans le journalisme narratif, un genre à la croisée du journalisme et de la littérature, qui a une longue histoire dans les rédactions américaines. Cela fait maintenant quinze ans que la chercheuse étudie ce genre à part entière, et tente de favoriser les échanges sur le sujet entre experts francophones et anglophones. Notamment grâce à l’International Association for Literary Journalism Studies (IALJS), dont elle est membre depuis sa création.

Business meeting, conference IALJS à Londres, mai 2010 © Barbara Buzan

Faire le pont entre deux communautés

En 2006, un an après avoir été engagée à l’ULB, Isabelle Meuret rejoint cette association internationale. Sa mission : développer la recherche et l’enseignement en journalisme littéraire. L’organisation édite notamment la revue spécialisée « Literary Journalism Studies », et organise chaque année un colloque international, dont le prochain se tiendra au Danemark.

« J’ai particulièrement servi d’intermédiaire au sein de l’association. Cela me frappait que peu de chercheurs et de journalistes anglophones consultaient les travaux réalisés en français, ni même ne connaissaient la tradition du grand reportage. Étant belge et spécialisée dans la culture anglo-américaine, j’ai pu faire la jonction entre les deux ».

« J’ai ainsi eu l’occasion de diriger, il y quelques années, un numéro spécial sur le journalisme littéraire dans le monde francophone. Et je collabore aujourd’hui étroitement avec des collègues américains qui travaillent en France », stipule Isabelle Meuret.

Couverture du numéro spécial de la revue Literary Journalism Studies © IALJS

Coopération et entraide de tout horizon

L’IALJS compte aujourd’hui une centaine de chercheurs, venant de France et des États-Unis. Mais aussi d’Afrique du Sud, de Chine, du Royaume-Uni, du Canada, de l’Australie, du Portugal, du Brésil…

« Cette diversité est extrêmement enrichissante, car chacun a sa propre tradition de journalisme narratif et sa propre approche pour l’étudier. J’ai pu faire la connaissance de profils très différents du mien, et ainsi bénéficier d’échanges fructueux. Ces rencontres ont aussi débouché sur des collaborations au sein de projets, d’articles, ou encore d’ouvrages collectifs », souligne la chercheuse.

Atelier projet Numapresse, Paris, Juin 2016 © Nejma Omari

« Rejoindre l’IALJS a clairement influencé ma vie de chercheuse, et m’a aussi beaucoup appris en matière d’enseignement ». Son réseau de collaborateurs n’hésite d’ailleurs pas à partager avec elle ses différents contenus de cours quand l’Université de Gand l’invite, en 2011, à créer un cours de journalisme littéraire.

L’enseignement américain, un modèle dont s’inspirer ?

Isabelle Meuret y enseigne ce cours durant cinq ans. Cette période à l’UGent lui permet de bénéficier en 2014 du programme d’échange organisé avec la Fordham University, située à New York. Elle s’y rend un semestre, dans le cadre d’un séjour d’enseignement. « C’était un superbe défi de me confronter au public étudiant américain, et d’apprendre une autre méthode d’enseignement », indique-t-elle.

Dans les universités belges, les cours sont encore souvent donnés de manière ex cathedra. Un mode d’enseignement dans lequel un professeur expose son savoir devant un grand auditoire, sans échanges véritables avec les étudiants. « Aux États-Unis, l’apprentissage se base au contraire majoritairement sur la discussion, avec de petits groupes d’étudiants. Ce qui les amène à prendre activement part à leur formation. C’était donc un enseignement très différent de celui que je pratiquais alors en Belgique, et je suis revenue changée de cette expérience ».

Après ce séjour à l’étranger, Isabelle Meuret jette effectivement un autre regard sur sa manière d’enseigner. Elle décide, dès lors, de réorganiser ses cours à l’ULB, de façon à mieux engager et responsabiliser ses étudiants dans leurs processus d’apprentissage.

Columbia, fondatrice de la médecine narrative

À l’automne 2019, la scientifique s’envole à nouveau pour New-York. Elle rejoint cette fois-ci l’Université de Columbia, dans le cadre d’une mission scientifique au sein de l’Institut « for comparative literature and society ».

Butler Library, Columbia University – New York, novembre 2019 © Isabelle Meuret

« Je m’intéresse beaucoup aujourd’hui à la médecine narrative. Et Columbia a été pionnière dans cette discipline, à la croisée entre littérature et médecine, créée par la professeure Rita Charon », informe la chercheuse.

« J’ai rejoint cette institution dans le but de me former. C’est un biotope idéal pour en apprendre plus dans ce domaine et accéder à des ressources innovantes ».

« C’est d’ailleurs tout l’intérêt des séjours à l’international : apprendre de nouvelles compétences, mais aussi échanger avec ses pairs. Cela permet de se confronter à des perspectives différentes, et ainsi de générer des idées originales, à la croisée des langues et des cultures », conclut Isabelle Meuret.

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