La solitude, unique compagne de 3,5 millions de Belges

15 septembre 2022
par Daily Science
Durée de lecture : 6 min

Près d’un tiers des Belges (32%) se sentent très seuls, tandis que 36% se sentent modérément seuls. C’est ce qui ressort de la nouvelle Enquête nationale du Bonheur de l’UGent-NN, réalisée en janvier et en février, auprès d’un échantillon représentatif de 1.602 Belges. Les personnes d’âge actif, qui sont incapables de travailler en raison des circonstances, présentent les niveaux de solitude les plus élevés : 49% des personnes sans emploi et 56% des malades de longue durée déclarent se sentir très seuls. Ce sentiment nuit gravement à leur bien-être et à leur bonheur général. Les personnes qui se sentent très seules sont 22% moins susceptibles d’être heureuses. Ces chiffres montrent l’importance, sur le plan psychologique et social, d’avoir un emploi à un âge actif.

Le sentiment général de solitude élevé chez les Belges

Depuis 2017, l’Enquête nationale du Bonheur de l’UGent-NN mesure le niveau de solitude chez les Belges. Lors des quatre dernières mesures, l’échelle de « de Jong – Gierveld», reconnue internationalement et validée scientifiquement, a été utilisée. Au cours des deux années passées, la proportion de personnes très seules a fluctué autour de 30%.

Pendant la crise du coronavirus, un glissement a été observé : davantage de personnes qui ne connaissaient pas la solitude avant la crise se sentaient modérément seules.

Lors de la mesure la plus récente, en janvier 2022, une diminution du nombre de personnes modérément seules, mais aussi une nouvelle augmentation du nombre de personnes très seules, a été constatée. Ces dernières représentent aujourd’hui 32% de la population, soit presque un tiers des Belges.

« Malgré le fait que le nombre de personnes qui se sentent modérément seules baisse à nouveau, sans doute en raison de la disparition des règles limitant nos contacts sociaux, notre pays compte deux fois plus de personnes qui se sentent seules que de personnes qui ne connaissent pas la solitude. Une sur trois se sent même très seule, ce qui est beaucoup trop. Les autorités locales peuvent remédier à cette situation, en impliquant davantage de gens dans la vie sociale. Nous pouvons aussi agir nous-mêmes, en nouant plus de relations ainsi que des contacts chaleureux et de qualité », explique Pr Lieven Annemans, qui a dirigé les recherches.

Les niveaux élevés de solitude ne favorisent pas notre sentiment général de bonheur. Ainsi, les personnes très seules ont 22% de chances en moins d’être heureuses.

© Enquête nationale du Bonheur de l’UGent-NN

Deux types de solitude

Il existe deux types de solitude : la solitude sociale et la solitude émotionnelle. Dans le premier cas, il nous manque principalement un réseau social plus large. Dans le second cas, nous avons peut-être un vaste réseau social, mais il nous manque un lien émotionnel avec les gens qui nous entourent, et nous avons l’impression d’être incapables de partager nos sentiments avec les autres.

La solitude sociale et émotionnelle est élevée chez les personnes sans emploi ou les malades de longue durée
Chez les malades de longue durée, beaucoup éprouvent une solitude émotionnelle (54%) et une solitude sociale (53%) élevées. Cela signifie que plus de la moitié d’entre eux se rendent compte que leur réseau social est très limité, et ne ressentent pas d’attachement profond pour les personnes avec lesquelles ils ont encore des contacts.

Chez les personnes sans emploi, la situation est légèrement différente. Le niveau élevé de solitude sociale est également courant (51%), ce qui signifie que plus de la moitié d’entre elles n’ont pas de réseau social large. En revanche, ce groupe ressent un peu moins une forte solitude émotionnelle (39%) que les malades de longue durée (54%).

Il est également frappant de constater qu’un nombre relativement important de femmes et d’hommes au foyer éprouvent une forte solitude émotionnelle (39%). Ces personnes perçoivent leur réseau comme étant large. Mais beaucoup considèrent, en même temps, que leurs relations sociales sont moins profondes.

© Enquête nationale du Bonheur de l’UGent-NN

Le poids de la solitude chez les malades de longue durée et les «  sans emploi »

Les niveaux les plus élevés de solitude sont enregistrés chez les personnes sans emploi ou les malades de longue durée. Au sein de ces groupes, respectivement 49% et 56% des gens se sentent très seuls. Cela représente 17% et 24% de plus que la moyenne belge. Dans aucun autre groupe, le niveau de solitude n’est aussi élevé.

Par ailleurs, le haut niveau du sentiment de solitude chez les étudiants est un élément frappant. 47% d’entre eux se sentent seuls.

Le pourcentage le plus élevé de personnes non seules est observé parmi les retraités. 36% de ces derniers ne se sentent pas seuls, et le nombre de ceux qui se sentent très seuls descend à 25%, soit 7% de moins que la moyenne belge.

« Le fait de ne pas être intégré dans le marché régulier du travail a clairement un impact majeur sur le sentiment de solitude. Cela concerne surtout les personnes qui n’effectuent pas ce choix consciemment ou volontairement.

« La différence avec les retraités est qu’ils choisissent délibérément le statut qu’ils adoptent. Il s’agit d’un choix qui découle de leur autonomie. Cela n’est généralement pas le cas pour les personnes qui sont sans emploi ou pour les malades de longue durée. Voilà pourquoi ces personnes éprouvent moins le sentiment d’exercer une activité utile et ne participent pas à la vie sociale. Il s’avère essentiel de ne pas stigmatiser ce groupe et de continuer à l’impliquer de manière adaptée », ajoute le Pr Annemans.

© Enquête nationale du Bonheur de l’UGent-NN

La participation active pour lutter contre l’isolement

«  Des recherches ont montré que la solitude est néfaste pour la santé. Il s’agit d’une importante source de stress. Si nous sommes conscients du danger que représente la solitude, nous effectuons déjà un grand pas dans la bonne direction. En tant que société, nous devons examiner où se trouvent les personnes seules et comment les approcher pour qu’elles sortent de leur isolement. »

« Une participation intense à la vie sociale et l’expérience de l’engagement, de la cordialité et de la gentillesse peuvent préserver du sentiment de solitude. Particulièrement en ce qui concerne les personnes sans emploi ou les malades de longue durée, une telle approche nécessite un certain nombre d’ajustements structurels. »

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