L’année de la rougeole

15 novembre 2019
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 4 min

Mauvaise nouvelle sur le front de la rougeole en Belgique. L’année 2019 marque un retour en force de cette maladie particulièrement contagieuse. « Au cours des neuf premiers mois de l’année, 397 cas de rougeole ont été comptabilisés dans le pays», indique la Dre Monalisa Zampieri (ULB/Service de pédiatrie de l’Hôpital Saint-Pierre). Soit bien plus que les 117 cas recensés en 2018, ou encore les 367 cas pour l’ensemble de l’année 2017.

« Malgré la vaccination systématique et gratuite pour les deux doses de vaccins RRO (vaccin combiné rougeole, rubéole et oreillons) depuis 1995, des épidémies de rougeole surviennent encore régulièrement sur le territoire belge », relevait récemment la Dre Zampieri, dans le cadre d’un séminaire sur les maladies infectieuses.

Elle identifie deux causes à ces épidémies: le haut taux de contagiosité du virus, mais aussi une couverture vaccinale trop faible.

En Belgique, 397 cas de rougeole ont été comptabilisés au cours des neuf premiers mois de l’année 2019.

La Belgique n’atteint pas le taux de vaccination recommandé de 95%

« Pour la rougeole, il faut idéalement atteindre un taux de vaccination de la population de 95% », rappelle le Dr Nicolas Dauby, de l’Institut d’immunologie médicale et de l’École de santé publique de l’ULB. « Avec une telle couverture vaccinale, les cas de transmission de la maladie sont limités. C’est ce qu’on appelle l’immunité de groupe. Le virus ne circule plus ».

« En Belgique, on est en dessous de cette norme. C’est la Flandre qui est, dans ce cadre, la meilleure élève de la classe, avec une couverture vaccinale de 93,4%. À Bruxelles, ce taux descend à 76,4% et en Wallonie, il n’atteint que 70,1% (chiffres 2017) », rapporte la Dre Zampieri.

La Wallonie victime du mouvement anti-vaccin français?

Pourquoi ces différences de chiffres entre les différentes régions du pays? « Pour la Wallonie, cela pourrait provenir d’une sorte de « contagion » du mouvement anti-vaccin qu’on observe en France », estime la pédiatre. « Pour lutter contre ce phénomène, la balle est dans le camp des médecins et du personnel de santé. À eux d’informer aussi complètement qu’honnêtement et de manière accessible sur les attraits, les limites et les enjeux de la vaccination », dit-elle.

Un message que faisait déjà passer voici peu la chercheuse Marie Neunez, de l’Institut pour l’innovation interdisciplinaire en matière de santé (I3H) (http://i3health.eu/), également de l’Université Libre de Bruxelles.

Situation contrastée en Europe

La Belgique n’est pas le seul pays européen à être touché cette année par la rougeole. La carte du Centre européen de surveillance des maladies (ECDC, basé à Stockholm) reproduite ici et issue de son rapport de novembre 2019 sur la rougeole et la rubéole en Europe  illustre clairement la situation.

Au cours des douze derniers mois, c’est en France que le plus grand nombre de cas de rougeole ont été diagnostiqués (1635 cas). L’Italie arrivant en seconde position avec 1520 cas.

La rougeole déferle dans de nombreux pays européens. La Belgique fait partir des pays les plus touchés © ECDC

Impact sociétal et impact économique 

« Si le taux de mortalité lié aux complications est, dans les pays développés, très bas, l’impact sociétal et économique de ces épidémies de rougeole, contre lesquelles il existe cependant des vaccins, n’est pas à négliger », rappelle le Dr Nicolas Dauby.

Il prend comme exemple le cas d’une épidémie, toujours de rougeole, survenue en Italie en 2002-2003. « Les quelque 5.000 hospitalisations consécutives à cette épidémie avaient coûté à la sécurité sociale italienne entre 17 et 22 millions d’euros. Un chiffre à mettre en regard du coût d’une vaccination suffisante de la population dans le pays pour éviter ce type d’épidémie et chiffré, pour sa part, à moins de 2 millions d’euros »…

Pour le Dr Dauby, c’est clair, la vaccination est « le » moyen le plus efficace, du point de vue de la santé et de l’économie de la santé, pour éviter des épidémies de maladies « contre lesquelles il est pourtant facile de se prémunir », conclut-il.

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