Chouette chevêchette © Dominique Duyck

Comment se portent les oiseaux nicheurs européens ?

16 décembre 2020
par Daily Science
Durée de lecture : 4 min

Pas moins de 600 espèces d’oiseaux se reproduisent en Europe. 539 sont indigènes et 57 ont été importées par l’homme d’autres parties du monde. Certaines se rencontrent sur presque tout le continent, comme notre bergeronnette grise, d’autres n’existent que sur une seule île au milieu de l’Atlantique, comme le bouvreuil des Açores. Afin de fournir une vue globale sur l’évolution de leurs populations et leur répartition à l’échelle du continent, 120.000 ornithologues amateurs ont travaillé de concert.

Zone couverte par le travail d’observation des 120.000 ornithologues amateurs © EBBA2

Basé sur leurs relevés réalisés sur les 11 millions de km² du continent, le deuxième « Atlas européen des oiseaux nicheurs » vient de sortir. Il s’agit d’un des plus grands projets de sciences participatives jamais réalisé. Il l’a été sous la houlette de l’European Bird Census Council (EBCC) qui fédère les associations ornithologiques partout en Europe dont Natagora en Belgique.

120.000 ornithologues au travail

Le monde change rapidement. Et la répartition et l’abondance des oiseaux suivent ces changements. Il est donc apparu nécessaire de mettre à jour le premier atlas des oiseaux nicheurs en Europe, publié en 1997 sur base d’informations datant des années 1980. Il a fallu près d’une décennie pour finaliser ce rêve.

« La méthodologie scientifique, organiser un réseau de collaborateurs dans 48 pays, tout cela a pris du temps. Ensuite, entre 2013 et 2017, plus de 120.000 ornithologues amateurs ont sillonné les moindres recoins de l’Europe, de l’Oural aux Canaries, de l’Islande au Caucase. Leurs données ont ensuite été rassemblées selon les plus hauts standards scientifiques pour constituer une nouvelle base de référence sur la répartition et l’abondance de tous les oiseaux d’Europe, et sur les changements observés ces trente dernières années », indique Jean-Yves Paquet, coordinateur du projet pour la Belgique (Natagora).

Variation dans les aires de nidification

Malgré les changements profonds en cours depuis 30 ans, l’Europe a perdu très peu d’espèces. On peut citer le turnix d’Andalousie, qui vit encore en Afrique, mais plus en Europe.

Et très peu d’espèces ont colonisé notre continent, à l’image du martinet des maisons, une espèce africaine que l’on trouve maintenant dans certains recoins du sud de l’Europe.

« D’après les analyses du deuxième Atlas européen des oiseaux nicheurs, 35 % des espèces indigènes ont élargi leur aire de reproduction, parfois d’une manière spectaculaire comme pour le héron gardeboeuf, qui niche maintenant en Belgique (à Harchies). À l’origine, il s’agit d’une espèce africaine, accompagnant les buffles et autres grands mammifères de la savane ! D’un autre côté, un quart des espèces ont vu cette aire se réduire, comme la perdrix grise ou le bruant ortolan », explique Jean-Yves Paquet.

« Les régions nordiques du continent ont gagné de nouvelles espèces, alors que les régions plus au sud ont connu des pertes. Celles-ci sont souvent constatées pour les oiseaux caractéristiques des terres agricoles et des prairies », explique Sergi Herrando, membre de l’équipe de coordination de l’EBBA2 (European Breeding Bird Atlas 2) et de l’Institut Catalan d’Ornithologie.

Deux forces principales de changements de ses répartitions d’espèces sont identifiées : les changements d’habitat lié à l’évolution de l’utilisation des sols et le changement climatique.

Héron gardeboeuf © Marc Paquay

La chevêchette d’Europe fait son nid en Belgique

Si parmi les « perdants », on trouve de nombreuses espèces associées aux milieux agricoles, parmi les « gagnants », il y a beaucoup d’espèces forestières et d’espèces protégées par les législations internationales comme la directive oiseaux.

En Belgique, une nouvelle espèce de chouette forestière a fait son apparition en 2012, la chevêchette d’Europe. EBBA2 montre que son arrivée en Belgique est une suite logique de son expansion en Europe centrale… même si on ne comprend pas très bien pourquoi elle devient de plus en plus répandue. D’autant que ses populations scandinaves, elles, ne se portent pas bien.

Une des causes possibles est que son « frigo » naturel est en panne. En effet, les proies que la chevêchette stocke dans les cavités d’arbres restent normalement gelées et disponibles tout l’hiver. Mais ces derniers temps, les températures trop élevées ne permettent plus la conservation de ces réserves.

Des pygargues à queue blanche survolent le Namurois

Si beaucoup d’espèces menacées sont toujours en mauvaise posture, des exemples positifs montrent que la conservation de la nature produit des effets. Ainsi, des espèces autrefois très rares comme le pygargue à queue blanche, un énorme rapace qui vit sur les côtes ou les grands marais, a bénéficié du régime de protection et a regagné une grande partie du terrain perdu.

On peut maintenant retrouver des nids de ce grand aigle aux Pays-Bas, à un coup d’aile de la Belgique. D’ailleurs, ces individus, équipés de balises GPS, sont fréquemment enregistrés explorant leur voisinage… qui s’étend jusqu’à la région namuroise.

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