L’insuffisance cardiaque sous la loupe du Dr Andreas Gevaert

17 février 2020
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 4 min

« C’est à la fin de mes études secondaires que j’ai eu le déclic. Lors d’une année passée au Guatemala, j’ai découvert la médecine humanitaire. Cette médecine de terrain réalisée avec des moyens de fortune m’a tout de suite parlé. Sur place, ma décision a mûri. Mon avenir semblait alors tout tracé : plus tard, je serais médecin. »

© Christian Du Brulle

En rentrant en Belgique, Andreas Gevaert a donc suivi sa bonne étoile. Mais en cours de route, celle-ci a légèrement changé de couleur. Finalement, c’est la cardiologie qui a attisé sa curiosité. Au point d’en devenir sa spécialité.

Alors qu’il termine cette année sa formation dans ce domaine, le jeune médecin vient de voir ses recherches doctorales récompensées par le Prix Bernheim. Décerné pour la 21e fois par le Fonds pour la Chirurgie Cardiaque, présidé par le Pr Jean-Louis Leclerc (ULB), ce prix scientifique met en lumière une thèse de doctorat en lien avec la cardiologie, réalisée dans une structure universitaire belge.

Rappelons que ce prix porte le nom et honore la mémoire d’une petite fille, Jacqueline Bernheim, victime de l’Holocauste.

L’insuffisance cardiaque au centre de ses travaux

« Je viens de défendre ma thèse à l’Université d’Anvers », explique le Dr Gevaert. « Mes recherches portent sur un problème d’insuffisance cardiaque bien précis: l’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée. » Celle-ci concerne un insuffisant cardiaque sur deux environ.

L’insuffisance cardiaque fait référence à un problème d’efficacité du cœur. Pour diverses raisons, le muscle cardiaque n’expédie plus suffisamment de sang (et avec lui l’oxygène nécessaire aux tissus de notre corps) dans l’organisme. Chez les patients souffrant de ce problème, le moindre effort est très pénible.

Inflammation chronique et sédentarité

Les travaux du Dr Gevaert s’intéressent à deux facettes bien précises de cette insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée. D’une part, il a étudié le comportement des fins vaisseaux sanguins en contact avec le muscle cardiaque au niveau de leur endothélium (leur couche cellulaire interne). D’autre part, il s’est demandé si la reprise d’un exercice physique régulier pouvait améliorer la situation chez ces patients.

« En ce qui concerne l’endothélium, nous avons pu constater que chez les patients souffrant d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée, les processus de réparation habituels de cette muqueuse, face à des problèmes d’inflammation chronique, n’étaient pas aussi efficaces, par rapport à des personnes saines », explique-t-il.

« Nos recherches ont aussi montré que l’exercice physique régulier n’améliorait pas la situation chez ces patients. Certes, il améliore les symptômes de la maladie, mais il n’agit pas sur les mécanismes cellulaires en jeu au niveau de l’endothélium. »

Pourquoi? C’est un des domaines de recherche que le médecin va désormais explorer au cours de l’année qui vient, puis lors d’une année de recherches complémentaire prévue aux Pays-Bas.

Remise du prix Bernheim au Dr Gevaert © Christian Du Brulle

Population vieillissante et risques connexes

En quoi ce type de recherche est-elle pertinente? « Regardez autour de vous », interpelle le Pr Christiaan Vrints, un des promoteurs de la thèse du Dr Gevaert à l’Université d’Anvers. « La population vieillit. Ce type de syndrome se rencontre essentiellement auprès des personnes d’un certain âge, et singulièrement plutôt chez les femmes que chez les hommes. Ce syndrome reste également mal connu et sans réel moyen thérapeutique pour le contrer. Les médicaments disponibles permettent de soulager les symptômes, pas le problème sous-jacent qui en est la cause. Dans ce cadre, les travaux du Dr Gevaert pourraient apporter un nouvel éclairage ».

Quant au prix Bernheim, qu’il vient de recevoir, il se double d’un chèque de 25.000 euros. « De quoi assurer une partie des coûts liés à la suite de mes recherches », indique le lauréat.

« Un prix bienvenu », estime de son côté le Pr Vrints. « Les financements pour la recherche clinique en cardiologie dans notre pays ne sont ni gras ni nombreux. Contrairement à ceux alloués pour d’autres types de pathologie, comme le cancer. Je ne dis pas que la recherche contre le cancer n’est pas indispensable. Loin de là. Mais permettez-moi tout de même de rappeler que la principale cause de mortalité dans le monde est liée aux maladies cardiovasculaires.  Et que chez nous, outre le vieillissement de la population, ce risque de décès augmente aussi avec les problèmes croissants d’hypertension, de diabète ou encore d’obésité. Dans ce contexte, une récompense comme le Prix Bernheim est réellement la bienvenue ».

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