Le Pr De Leenheer (UGent) et le Pr Gevers (UCL) ont remis aux formateurs Charles Michel (MR) et Kris Peeters (CD&V) la pétition signée par 5000 scientifiques réclamant le maintien des PAI dans le giron fédéral belge.
Le Pr De Leenheer (UGent) et le Pr Gevers (UCL) ont remis aux formateurs Charles Michel (MR) et Kris Peeters (CD&V) la pétition signée par 5000 scientifiques réclamant le maintien des PAI dans le giron fédéral belge.

Cinq mille fois « non » à la disparition des PAI

1 octobre 2014
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 5 min

Mardi après-midi, la pétition concernant la sauvegarde des PAI a été remise aux formateurs du futur gouvernement fédéral belge. Cette pétition a été signée par quelque 5000 chercheurs belges, plusieurs lauréats du Prix Francqui, la plupart des recteurs des universités du pays mais aussi par de nombreux scientifiques étrangers et un Prix Nobel (François Englert). Ce sont les Prs Michel Gevers (UCL) et Andreas De Leenheer, recteur honoraire de l’Université de Gand (UGent), qui ont joué aux facteurs.

 

Depuis la dernière réforme de l’Etat, les PAI ou Pôles d’attraction interuniversitaires sont menacés de disparition. Ce programme fédéral, le seul qui permet à des chercheurs du Nord et du Sud du pays de travailler ensemble en matière de recherche fondamentale, vit actuellement sa 7e et dernière phase. En 2017, si rien ne change, il devrait être communautarisé. « Avec le risque de le voir disparaître purement et simplement », souligne le Pr Dave Sinardet, politologue à la VUB (Vrije Universiteit Brussel), et membre du Conseil fédéral de la Politique scientifique.

 

Masse critique et hauts niveaux d’excellence

 

Dans les rangs des scientifiques belges, tant du nord que du sud du pays, le programme des PAI fait l’unanimité. Son attrait est plébiscité. Il en va de même en ce qui concerne son évaluation régulière par des experts internationaux. « En permettant aux chercheurs belges de travailler en réseaux, avec des partenaires étrangers et d’atteindre une masse critique, ce programme débouche pour nos chercheurs sur de hauts niveaux d’excellence, y compris à l’échelle internationale », estime le Pr Michel Gevers (UCL), qui a été à la tête d’un PAI pendant une vingtaine d’années. « C’est de l’argent bien dépensé ».

 

Question budget, on ne parle pas vraiment de gros sous : une trentaine de millions d’euros par an environ. « Une somme minime mais dont le pouvoir démultiplicateur (scientifique) est énorme », précise le Pr De Leenheer.

 

Recherche fondamentale et avenir économique sont liés

 

« L’Union Wallonne des entreprises est parfaitement en accord avec ce message », souligne Vincent Reuter, administrateur délégué de l’UWE. « Nous avons besoin de la recherche fondamentale. L’avenir économique de l’Europe repose sur la Recherche appliquée et l’Innovation, ainsi que sur d’autres facteurs. La chaine de valeur est claire. Elle part de la recherche fondamentale ».

 

Casser l’outil fédéral qui existe aujourd’hui et qui est performant pour, peut-être, le reconstruire à grands frais dans un contexte communautaire est une chimère. Chercheurs et entrepreneurs en sont convaincus. Il reste à convaincre le futur gouvernement de faire marche arrière. Et là, ce n’est pas gagné.
Les PAI ont été « condamnés » lors de la dernière réforme de l’Etat. Il a alors été prévu de transférer cette compétence aux entités fédérées.

 

« Communautariser ce programme signifie sa disparition pure et simple »

 

« Il est illusoire de penser que si on supprime les PAI, ces réseaux d’excellence vont pouvoir être remontés sur la base de la bonne volonté des Régions. Les risques sont évidents. Dans le contexte actuel, les maigres moyens consacrés à ces programmes vont tout simplement être sacrifiés sur l’autel des économies budgétaires. La communautarisation des PAI, cela signifie une seule chose: leur disparition pure et simple », analyse le Pr Sinardet.

 

Tout le monde est d’accord. La difficulté qui se pose aujourd’hui est exclusivement de nature politique. Pour sauver les PAI, il faut revenir sur un accord institutionnel. Il s’agit de « refédéraliser » ce programme. Cela implique de revoir une loi de réforme de l’Etat.

 

N’est-ce pas beaucoup demander ? « La Politique, c’est décider », souligne Philippe Mettens, le Président du Comité de direction de la Politique scientifique fédérale, gestionnaire du programme des PAI. « Nous avons ici une magnifique occasion de montrer la maturité et l’intelligence du système fédéral belge ».

 

« Tout est possible », abonde le Pr Sinardet. « Même si le problème des PAI est pris par certains comme un symbole, il n’est effectivement question ici que d’efficacité de la recherche ». La balle est dans le camp des formateurs. Les scientifiques belges attendent.

 

 

La 7e (et dernière ?) phase du programme PAI

 

La 7e phase de cinq ans du programme des Pôles d’attraction interuniversitaires a démarré en 2012, pour une période de cinq ans (2017).
Son budget global est de 156 millions d’euros.
Elle soutient 47 réseaux de recherches fondamentales dans le pays (24 en sciences de la vie, 15 en sciences exactes et appliquées et 8 en sciences humaines).
Chaque réseau comprend au moins une équipe du nord et une équipe du sud du pays. Dans les faits, les 47 réseaux de la 7e phase des PAI mobilisent 369 groupes de recherche.
Seuls 500 scientifiques sont « payés » par les PAI. Toutefois, le programme mobilise l’excellence scientifique de 6.000 chercheurs en Belgique et dans le monde.
Les résultats engendrés par ce programme se mesurent notamment en nombre de publications scientifiques. Il y en a plus de 2.000 chaque année.

 

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