Elevage de larves de mouches soldats noires © https://wiki.lowtechlab.org/wiki/Elevage_de_Mouches_Soldats_Noires

A Bruxelles, le larvi-compostage a le vent en poupe

22 février 2021
par Daily Science
Durée de lecture : 4 min

Produire des protéines en ville grâce à des insectes nourris de nos épluchures. C’est ce que vise le projet ValueBugs, soutenu par le programme Co-create d’Innoviris. A l’issue de 3 ans de recherche  action participative  en région bruxelloise, il a créé des outils permettant de s’approprier la technique du larvi-compostage. Ces résultats de la recherche ont été traduits en recommandations concrètes dans le cadre de l’élaboration de la feuille de route biodéchets du Plan régional de gestion des ressources et déchets de la région bruxelloise.

Une mine de protéines

Durant les 3 dernières années, ValueBugs, un projet de recherche action participative, a exploré le potentiel des larves de mouche soldat noire pour accroître la circularité des matières organiques. Ces larves ont un appétit vorace pour les résidus alimentaires, et peuvent être utilisées comme super-aliment protéiné, une fois arrivées à maturité.

« La mouche soldat noire est vue comme le Graal par de nombreux acteurs du traitement des déchets, puisque ses larves permettent de transformer rapidement et directement des résidus organiques en nourriture pour animaux d’élevage (poissons, et bientôt volailles) », mentionnent les responsables du projet.

Un cercle vertueux et local

ValueBugs a fait le pari de transposer cette logique industrielle à l’échelle des ménages bruxellois : nourrir à domicile des larves, avec les épluchures de cuisine et les restes de repas, pour les utiliser comme aliments pour les poules, de plus en plus populaires dans les jardins bruxellois, ou pour les animaux de compagnie.

« Le but est d’accroître la résilience de la région bruxelloise, en recréant une chaîne alimentaire ultra-courte et vertueuse, dans l’esprit des dynamiques citoyennes de compostage et de maraîchage urbains en pleine expansion en région bruxelloise. »

Une co-création citoyens-chercheurs

Cette recherche a eu lieu en co-création. De son élaboration à son exécution, un collectif de citoyens-chercheurs de tous horizons, une trentaine de classes, d’associations de terrain et de laboratoires de recherche ont collaboré main dans la main.

« La diversité et l’implication de ces co‑chercheurs a permis l’exploration, sans tabou, de l’entrée d’insectes dans l’intimité des foyers. Car cela représente bien plus qu’un simple challenge technique… », souligne Etienne Toffin, chercheur au service de Chimie physique et Biologie théorique de l’ULB et coordinateur du projet ValueBugs.

Redonner sa place à l’insecte

Les enjeux de cette innovation étaient nombreux : Comment peut-on, chez soi, au quotidien, élever des larves ? Quel potentiel de nourrissage de poules grâce à ces larves ? Peut‑on mobiliser et s’appuyer sur un réseau citoyen pour développer de manière durable cette nouvelle pratique dans notre ville ? Quelle place et quel rôle sommes-nous prêts à accorder à ces insectes dans nos vies ? Quels sont le cadre réglementaire et les contraintes sanitaires liés à l’introduction de ces larves dans la chaîne alimentaire ?

« Nos travaux nous montrent que si les larves sont initialement considérées comme outils de recyclage ou comme aliments pour animaux, la pratique régulière du larvi-compostage conduit à acquérir un regard bienveillant et reconnaissant envers ces insectes, ouvrant des perspectives d’ancrage pour cette pratique innovante, et plus généralement de restauration de notre lien avec le monde vivant et sauvage », observe Etienne Toffin.

Afin d’assurer l’approvisionnement en larves des ménages, un outil informatique d’organisation logistique a été co-élaboré. Totalement construite sur le principe d’une distribution en cascade par des citoyens-convoyeurs bénévoles, cette proposition explore la piste d’une logistique solidaire, éthique et conviviale.

Des outils de gestion indispensables

Par ailleurs, une partie importante de l’étude portant sur les poules urbaines a permis de clarifier le contexte et le cadre nécessaire à une augmentation de la population de poules en ville.

« Cette recherche collaborative s’est traduite par la création d’outils permettant à chacun de s’approprier la technique du larvi-compostage. Une cinquantaine de volontaires curieux et enthousiastes ont déjà bénéficié d’une formation. »

« Enfin, par le biais d’une collaboration avec Bruxelles-Environnement, nos résultats ont été traduits en recommandations concrètes (réglementation et actions de soutien) dans le cadre de l’élaboration de la feuille de route biodéchets du Plan régional de Gestion des Ressources et Déchets de la région bruxelloise, et font l’objet de discussions pour placer poules et larves dans la concertation pour le futur plan GoodFood 2 », conclut Etienne Toffin.

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