400 ans de représentations symboliques de la Belgique 

23 juillet 2020
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 4 min
Le lion belge © Mundaneum

La Belgique indépendante n’a, bien entendu, pas 400 ans. À Mons, au Mundanéum, la nouvelle exposition temporaire ne s’arrête pas à ce détail de l’Histoire. Avec « La Belgique dans tous ses états », son concepteur, Eric Van Den Abeele, remonte volontiers jusqu’à 1617.

« C’est avec le lion belge, le Leo Belgicus qui date de cette année et qui est issu des collections de la Bibliothèque royale de Belgique (KBR), que démarre effectivement cette exposition consacrée à la représentation populaire et politique de la Belgique », indique-t-il.

« Mais attention », prévient-il aussitôt. « Cette exposition n’est pas un traité d’histoire. Ce n’est pas non plus une exposition à thèses. C’est, simplement, une histoire de la représentation de la Belgique depuis quatre siècles ».

Le lion belge de 1617 s’approprie la force de l’animal pour illustrer la puissance des Belges de l’époque, lesquels ne savent pas encore qu’ils sont belges. Cette iconographie musclée s’opposera par la suite à une représentation plus douce de la Belgique qui prend alors les contours d’une femme, illustrant subtilement d’autres valeurs comme la justice, la prospérité, la liberté, la raison et toujours… la Nation.

Une imagerie populaire en perpétuelle évolution

La représentation de la Belgique dans l’imagerie populaire a, bien entendu, évolué au fil du temps. « En 1830, au moment de la création du Royaume, elle oscille entre union nationale et évocation de la grandeur du pays », précise le commissaire de l’exposition.

Elle montre un attachement à la patrie lors du 75e anniversaire (1905) et du centenaire de l‘Indépendance (1930), ainsi que pendant les deux guerres mondiales ou encore à l’occasion des expositions universelles. Celle de 1958 est sans doute à cet égard le dernier grand événement « belgicain ».

Leo Belgicus © Mundaneum

L’exposition, basée sur l’ouvrage « La Belgique dans tous ses états » signé l’an dernier par Éric Van den Abeele aux Éditions Luc Pire, alterne des  images polémiques, drôles ou parfois tristes qui reflètent l’évolution de la représentation de la Belgique à travers le temps.

Elle donne l’occasion de découvrir la manière dont se sont construites l’identité belge et les prémices des tensions communautaires. C’est un regard différent sur l’histoire de la Belgique, grâce à des images souvent absentes… des livres d’histoire.

Le poids des mots

« Souvent, l’image est plus forte que la réalité », indique encore le concepteur de l’exposition. « Elle a, en tout cas, un impact plus puissant sur les opinions publiques et les mémoires ».

« La caricature et la propagande sont à la fois mystificatrices et démystificatrices. D’un côté, elles utilisent les passions de l’époque, les peurs et les rêves des contemporains. Elles dénoncent les complots, désignent les coupables, nomment les victimes. En parlant du mal, elles appellent le bien. Mais, d’un autre côté, la caricature nourrit et renouvelle l’imaginaire collectif, en utilisant les stéréotypes et en simplifiant les situations. La propagande, elle, s’est souvent emparée des images pour faire parler l’Histoire dans un sens partisan ».

© Collection privée

« En ce sens, il n’y a pas une épopée esthétique unique de la Belgique, mais une myriade de récits singuliers et de représentations collectives, belles ou laides, selon l’idéologie de l’artiste ou du polémiste et selon le point de vue que le lecteur entend privilégier. Les images présentées dans cette exposition éclairent leur époque, l’air du temps et le climat politique ambiant. La narration graphique met le visiteur tantôt du côté des victimes, tantôt du côté des ennemis de la Belgique ».

Au fil des affiches et d’autres documents iconographiques (dont quelques cartes postales), ce voyage de quatre siècles dans les représentations de la Belgique aborde aussi les périodes les plus difficiles de l’histoire du pays. L’exposition se termine par une douzaine d’œuvres de caricaturistes actuels. À leur manière, ils illustrent les états de la Belgique d’aujourd’hui. «  Nous assistons avec eux à la déliquescence, à l’évaporation de la représentation de la Belgique », commente Eric Van Den Abeele. « Sous la plume des caricaturistes, la symbolique est aujourd’hui inversée », conclut-il.

 

 

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