À Liège, on met les aurores polaires en bouteille

26 mars 2019
par Camille Stassart
Durée de lecture : 4 min

SÉRIE (2/5) Printemps des Sciences

Tout à coup, la nuit s’illumine ! Des voiles colorés dansent parmi les étoiles le temps de quelques minutes ou de quelques heures. Observées dans les régions polaires, ces lumières sont connues sous le nom d’aurores.

Au Printemps des Sciences de Liège, ce dimanche, le Dr Bertrand Bonfond, chercheur qualifié FNRS en astrophysique à l’ULiège, donnera l’occasion d’assister à ce phénomène. Une expérience qui permet d’enseigner les bases de l’astrophysique et de la physique des particules.

Réunion au sommet entre particules

Pour rappel, le Soleil émet dans l’espace un flux constant d’électrons et d’ions. Si une planète possède un champ magnétique, celui-ci formera une bulle protectrice autour d’elle : la magnétosphère. Grâce à elle, les particules venant du Soleil ne pourront alors entrer dans l’atmosphère de la planète qu’au compte-goutte.

« Sur Terre, quand les particules pénètrent dans la magnétosphère, le champ magnétique terrestre les dévie aux deux pôles. À ce moment, elles impactent les particules de l’atmosphère de la Terre, qui vont s’exciter, puis se désexciter en émettant des photons: des particules élémentaires de la lumière visible. Ce sont ces émissions lumineuses que nous appelons des aurores polaires » explique le Dr Bonfond, spécialiste du phénomène.

 

Planeterella
Planeterrella

Une aurore est donc le résultat de la collision entre les particules de l’atmosphère et celles de la magnétosphère.

« Je reproduis au Printemps des Sciences ces conditions à l’aide d’une Planeterrella, une planète artificielle. Dans une cuve en verre, nous plaçons un gros aimant dans une sphère métallique. Les pôles de cet aimant représentent les pôles magnétiques de la planète » développe le chercheur.

Le scientifique pompe ensuite la majeure partie de l’air hors de la cuve. Le peu de gaz qui restera représente la haute atmosphère de la planète, où se produisent les aurores.

« Nous injectons pour finir des électrons dans la cuve à l’aide d’un canon à électrons. Guidées par le champ magnétique de l’aimant, les particules vont alors se concentrer au niveau des pôles, et nous observerons la formation de petites aurores de part et d’autre de notre planète ».

Planeterrella en fonctionnement (IASB).
Planeterrella en fonctionnement (IASB).

Les aurores bleues de la planète rouge

Ce phénomène se produit donc sur Terre. Mais aussi sur Mars, Saturne, Jupiter et certains de ses satellites. Elles diffèrent cependant dans leur formation, leur intensité et leur couleur.

« Il faut savoir que le type de molécules dans l’atmosphère qui émettra des photons influence la couleur de l’aurore. Dans les hautes altitudes de l’atmosphère terrestre, on trouve surtout de l’oxygène atomique, nos aurores sont donc surtout vertes. Sur Mars, on retrouve du CO2, les aurores y sont donc bleues. Sur Jupiter on observe des aurores d’hydrogène qui sont a priori blanches, etc. ».

Aurore polaire sur Jupiter. ©HST/ESA/NASA
Aurore polaire sur Jupiter. ©HST/ESA/NASA

Les aurores sur Jupiter sont particulièrement brillantes, car la planète possède le champ magnétique le plus intense du système solaire. Leurs formations sont aujourd’hui étudiées de près grâce à la sonde spatiale Juno, de la NASA. Un projet auquel participe le Dr Bonfond.

Jupiter sous l’œil de Juno

Juno tourne autour de Jupiter depuis maintenant 2 ans. « Tous les 53 jours, elle effectue des rase-mottes, à 5000 km de la surface, qui nous permettent d’étudier les aurores » précise l’astrophysicien.

Les aurores jovienns sont spéciales, car les particules qui peuplent sa magnétosphère ne proviennent presque pas du vent solaire, mais bien d’Io, l’un de ses satellites. Connu comme l’astre le plus volcanique du système solaire. Ce sont ses puissantes éruptions volcaniques qui éjectent constamment des particules vers la magnétosphère de Jupiter.

« Même si le Soleil devait disparaitre demain, il existera toujours des aurores sur Jupiter » souligne le Dr Bonfond qui a étudié les aurores de Jupiter dans le cadre de sa thèse. Les données recueillies par Juno ont cependant mis en perspective certaines théories.

Écoutez Bertrand Bonfond expliquer quelles hypothèses ont été démontrées :

 

Connaître quels types d’aurores se forment sur Jupiter (ou ailleurs) permet de déterminer quels phénomènes sont spécifiques à une planète. Et quels mécanismes physiques restent universels. L’étude d’autres planètes améliore ainsi notre compréhension du système solaire en général, et de la Terre en particulier.

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