Mer Noire, exemple d'anomalie de température de surface révélée par surveillance satellitaire (MODIS.ESA).
Mer Noire, exemple d'anomalie de température de surface révélée par surveillance satellitaire (MODIS.ESA).

Sombre bulletin de santé pour la mer Noire

2 septembre 2016
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 3 min

Mauvaise nouvelle pour les poissons de la mer Noire. En 60 ans, la « zone habitable » de cette mer a diminué de quelque 40%. Ce sont des chercheurs de l’Université de Liège (ULg), en collaboration avec des collègues allemands et américains, qui en font le constat.

 

« La zone habitable en question est la couche superficielle des eaux de cette mer où on retrouve suffisamment d’oxygène pour que la vie puisse s’y développer », explique le Dr Arthur Capet, du groupe de recherche MAST (Modelling for Aquatic Systems) de l’ULg.

 

Il y a 60 ans, cette « colonne d’eau » propice à la vie plongeait de la surface jusqu’à 140 mètres de profondeur. Au-delà, l’eau devient plus salée et est totalement dépourvue d’oxygène. « Nous avons constaté que cette zone habitable est passée de 140 mètres à 90. Ce qui pourrait entraîner d’importantes conséquences écologiques et économiques dans la région ».

 
Une désoxygénation de l’océan qui a tendance à se généraliser

 
Ce constat résulte des analyses de deux séries de données. Elles proviennent de campagnes de mesures réalisées en mer Noire par des navires océanographiques mais également de données livrées par des bouées automatiques dérivantes.

 

Dans le jargon, on parle de désoxygénation. « Un phénomène qui ne se limite pas à la seule mer Noire », souligne le Dr Marilaure Grégoire, directrice du groupe MAST et Directrice de recherches F.R.S.-FNRS. « Nous constatons que d’autres mers et océans souffrent également de ce problème ».

 

Dans le cadre du programme européen Copernicus (de surveillance de l’environnement par satellites d’observation de la Terre), l’équipe liégeoise est désormais chargée de surveiller en continu l’évolution de la mer Noire.

 
« Nous développons principalement un modèle mathématique », souligne le Dr Grégoire. Un modèle alimenté par des données satellitaires diverses: surveillance de la chlorophylle, de la température de l’eau, de la hauteur de la surface des océans, etc. Au final, il s’agit notamment de pouvoir estimer la production primaire de la mer Noire, mais aussi sa capacité à stocker le carbone atmosphérique. Une problématique qui concerne également les autres océans de la planète ».

 

Mise en place d’un réseau d’experts par l’UNESCO

 
La désoxygénation des océans est à ce point préoccupante que l’UNESCO a mis sur pied un réseau mondial de surveillance et d’étude de ce phénomène. Baptisé « GO2NE », il regroupe une vingtaine d’experts et est chargé de collecter et de diffuser une information de qualité à ce sujet, notamment à destination d’un large public que l’agence des Nations Unies entend bien sensibiliser au problème.

 
Pourquoi? Parce qu’un océan privé de son oxygène est un océan en train de mourir. Moins d’oxygène, cela signifie moins de production alimentaire, moins de biodiversité.

 

Mais d’où vient cette désoxygénation « mondiale » des océans? « De multiples processus sont en cause », souligne le Dr Capet. « Dont le réchauffement global. Il a clairement un impact sur la solubilité de l’oxygène dans l’eau. Au plus une eau est chaude, au moins elle peut contenir d’oxygène ».

 

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