Plus de méditation, moins de médications

9 octobre 2019
par Raphaël Duboisdenghien
Durée de lecture : 4 min

Il y a quatre ans, le Pr Steven Laureys a commencé ses recherches sur la méditation avec Matthieu Ricard, docteur en biologie moléculaire et moine bouddhiste. Connu pour ses investigations sur les états de conscience, le responsable du Centre du cerveau au CHU de Liège présente ses conclusions dans «La méditation, c’est bon pour le cerveau» aux éditions Odile Jacob.

«Je suis encore élève amateur en méditation, mais en tant que scientifique, je suis convaincu que la méditation peut contribuer à une meilleure santé mentale et à une meilleure qualité de vie», raconte le directeur de recherche F.R.S.-FNRS. «Tout le monde peut en tirer profit à condition de s’y ouvrir. Il suffit de suivre un atelier ou un cours organisé par un professionnel qualifié, d’installer une bonne application sur son smartphone, de lire un livre avec un guide audio ou de regarder une vidéo sur Internet pour démarrer son propre programme de bien-être mental.»

« La méditation, c’est bon pour le cerveau » par Dr Stevens Laureys. Editions Odile Jacob – VP 21,90 euros – VN 15,99 euros.

Les bienfaits d’une méditation profane

Steven Laureys dirige le Coma Science Group au Giga, l’Institut de recherche interdisciplinaire en sciences biomédicales de l’ULiège. Il n’est pas devenu bouddhiste en fréquentant Matthieu Ricard. Cependant, il est persuadé qu’une méditation profane peut être complémentaire à la médecine moderne occidentale.

«Les effets précis sur le cerveau et sur les autres parties du corps ne sont connus que partiellement», reconnaît le chercheur. «Mais il existe suffisamment d’études qui en démontrent directement, ou indirectement, les nombreux bienfaits. Moins de pensées négatives, moins de ressassements, moins de stress. Un meilleur sommeil, de meilleures défenses immunitaires, une hypertension en baisse, des douleurs atténuées, des rechutes dépressives évitées… La liste est longue. Et il existe très peu de risques ou d’effets secondaires négatifs.»

Zoom sur le cerveau d’un moine très entraîné

Méditer, c’est consacrer son attention au fonctionnement, à la santé de son cerveau et de sa conscience. Pour essayer de mieux en comprendre les mécanismes. Et avoir une plus grande sensation générale de bien-être psychologique.

Tout commence par la respiration. Lorsque le septuagénaire Matthieu Ricard focalise son attention sur sa respiration avec le crâne garni de plus de 250 électrodes au laboratoire du CHU de Liège, l’électroencéphalographie (EEG) montre une augmentation considérable de l’activité. Et de la connectivité des ondes alpha associées à un état de détente, de réduction de l’anxiété, d’atténuation des troubles du sommeil.

Les dizaines d’études d’imagerie par résonance magnétique (IRM) indiquent des changements significatifs du fonctionnement et de la structure de l’hippocampe, déterminant pour la mémoire et les émotions. Du cortex insulaire, important notamment pour la perception et le contrôle de signaux et de stimuli internes, y compris la douleur. Du cortex cingulaire antérieur, décisif au niveau du contrôle de l’attention. Et du cortex cérébral préfrontal, fondamental dans la prise de décisions.

La méditation peut se pratiquer partout

Dans son livre, Steven Laureys propose des exercices, des techniques, des astuces. Pour méditer dans le calme pendant des heures. Ou se limiter à inspirer, expirer en pleine conscience. Chez soi, dans le bus, lors d’un embouteillage, au travail. Dans l’enseignement, pendant les compétitions sportives, derrière les barreaux…

Pour commencer, il ne s’agit pas de se focaliser sur la respiration. Mais sur un objet visible ou sur des stimuli extérieurs. D’écouter attentivement les bruits, les yeux fermés. D’utiliser son odorat. De s’ouvrir aux souvenirs, aux émotions qui reviennent à l’esprit. De les laisser passer puis de se concentrer de nouveau sur un stimulus sensoriel afin de se focaliser sur les stimuli de l’instant présent.

Tout est dans la régularité

Le neuropsychiatre prescrit des séances de méditation ou de pleine conscience aux patients qui luttent contre les maux de tête, la douleur, la dépression, l’anxiété, les troubles du sommeil… Il les oriente vers un psychologue qualifié ou vers un groupe MBSR (Mindfulness-Based Stress Reduction) basé sur la pleine conscience, qui prévoit un programme de 9 séances. De quelques heures à une journée, pendant 8 semaines.

Réaliste, le Pr Laureys félicite les personnes qui se livrent déjà à 2 séances de méditation chaque jour. «Souvent, les experts en méditation comme Matthieu conseillent de commencer par 5 ou 10 minutes, en allongeant progressivement la durée des séances. Fondamentalement, un court entraînement répété suffit à induire des changements significatifs. Tout est dans la régularité.»

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