L’Europe lance un concours d’innovation spatiale à 10 millions d’euros

13 juin 2018
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 4 min

La conquête de l’espace est loin d’être une aventure du siècle dernier. Et la Commission européenne entre dans la danse. Si l’exploit n’est plus de pouvoir quitter la Terre, comme le fit pour la première fois Spoutnik il y a 60 ans, la course aux étoiles est surtout marquée du sceau de la rentabilité et de l’innovation.

La Commission vient dans ce cadre de lancer une course à l’innovation en matière d’accès à l’espace. Plus précisément, c’est le renforcement de l’accès européen indépendant à l’espace qui est en ligne de mire.

Via son Conseil de l’Innovation (EIC), la Commission et son programme Horizon 2020 se propose de récompenser par un prix de 10 millions d’euros l’entreprise, l’équipe ou le consortium qui proposera d’ici 2021 un nouveau moyen d’expédier de manière sûre, « verte » et indépendante des petits satellites en orbite basse.

Règlement du "Space launch EIC Horizon Prize".
Règlement du “Space launch EIC Horizon Prize”.

Ce concours, baptisé « Space Launch, EIC Horizon Prize » est le sixième prix du genre proposé par le Conseil européen de l’Innovation. C’est aussi le seul directement consacré au domaine spatial (les autres prix portent sur des défis liés à l’aide humanitaire, la photosynthèse artificielle, les nouvelles batteries électriques, la technologie du blockchain ou encore la détection précoce d’épidémies).

A chaque fois, il s’agit d’élaborer de nouvelles solutions « disruptives », multisectorielles et interdisciplinaires pour relever les défis proposés.

Dans le cas de l’accès à l’espace, le défi consiste à satelliser de manière innovante de petits engins visant l’orbite terrestre basse. Un nouveau mode de lancement qui doit être réaliste, techniquement faisable, économique et « vert ». La solution proposée devra être « optimisée » pour avoir le moins d’impact possible à long terme sur l’environnement et sur l’atmosphère de la Terre. Par exemple en ce qui concerne la limitation d’émission de gaz toxiques ou de débris spatiaux. Le système devra aussi être réactif et efficace tout en étant économiquement viable. Enfin, toute la chaine de production devra être sous maîtrise européenne. Cela signifie que les parties prenantes devront être éligibles aux programmes de recherche Horizon 2020 de la Commission (états membres et états associés).

Des satellites d’1 à 400 kilos

Les satellites à placer en orbite par ce nouveau système seront de petits engins légers allant des cubesats (d’un à 25 kilos) aux mini satellites de 200 à 400 kilos. Les orbites visées sont les orbites basses (200 kilomètres d’altitude) et héliosynchrone (600 km).

Pourquoi ce choix? « Parce que les petits satellites sont bien adaptés à la plupart des types d’utilisation institutionnelle et commerciale: réseaux de communication sans fil, services Internet, connectivité plus large, observation scientifique, collecte de données, imagerie de la Terre et positionnement », indique la Commission.

« Leur production est plus rentable en raison de la production en série, de l’agilité et de la flexibilité des opérations. Ils devraient conduire à une augmentation exponentielle des besoins de lancement d’ici 2020-2025 ».

On remarquera au passage que si la solution proposée dans le cadre du concours « Space Launch, EIC Horizon Prize » devra être innovante, réalisable, abordable dans les phases de développement et d’exploitation, et commercialement viable, et que « les candidats sont tenus d’adopter une approche holistique et de produire des résultats qui vont au-delà (mais qui sont complémentaires) des solutions existantes », le règlement du concours ne prévoit apparemment pas la réalisation d’un démonstrateur… Toutefois, le classement des candidats tiendra compte du fait qu’ils ont déjà (ou non) réussi à lancer de petits satellites dans le passé.

On remarquera que d’autres initiatives du même genre, proposées sous d’autres horizons, s’appuyaient sur la démonstration effective de la technologie en compétition. On pense par exemple à l’Ansari X-Prize, qui en 2004 proposait 10 millions de dollars américains à l’équipe qui mettrait au point un engin capable d’emmener aux confins de l’espace (100 km d’altitude) trois êtres humains, et ce à deux reprises endéans le mois. Un concours qui donna naissance au SpaceShipOne, lui aussi américain.

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