Un réchauffement de plus de 1.5°C liquéfierait irrémédiablement les calottes antarctique et groenlandaise

13 novembre 2018
par Christian Du Brulle
Temps de lecture : 3 minutes

Limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C d’ici 2100 est impératif pour les calottes polaires qui recouvrent l’Antarctique et le Groenland. Et il est peut-être même déjà trop tard… Voilà en substance les conclusions d’une recherche internationale à laquelle plusieurs chercheurs belges ont contribué.

« Un réchauffement de la planète de plus de 1,5°C pourrait amener les deux calottes polaires en question à atteindre un point de non-retour », indique le Pr Frank Pattyn, codirecteur du Laboratoire de Glaciologie de l’Université libre de Bruxelles et cosignataire de cette étude.

Point de basculement

« Au-delà de cette limite, la fonte des calottes glaciaires de l’Antarctique et du Groenland pourraient être irréversibles et entrainer une hausse importante du niveau des mers. On atteindrait un point de basculement ».

Si de nombreuses études ont déjà constaté une accélération de la perte de masse glaciaire de ces deux calottes, le scientifique bruxellois précise toutefois que la fonte complète de ces masses glacées ne devrait pas intervenir avant plusieurs siècles, voire plusieurs millénaires.

Il indique aussi que les mécanismes à l’œuvre dans les deux hémisphères, nord et sud, sont différents.

Les hoquets du Jet Stream font suer le Groenland

« Nos travaux sont indépendants de ceux menés par les experts du GIEC », précise le Pr Pattyn. « Nous utilisons aussi d’autres modèles. Pour le Groenland, nous constatons ainsi que les quantités de glace qui fondent ces dernières années sont celles prédites pour un réchauffement global de deux degrés… »

Ceci est dû à une modification de la circulation atmosphérique. Notamment un affaiblissement du Jet Stream engendré par le réchauffement actuel. Cet affaiblissement génère une situation plus stable au Groenland, ce qui allonge la période de fonte annuelle. On l’a vu en 2016 et en 2012 ».

Ce qui n’est pas clair toutefois, c’est dans quelle mesure cette modification résulte de la variabilité naturelle du climat ou d’effets anthropiques.

Par contre, ce qui est certain, c’est qu’au-delà de 1,5 degré, on atteint un point de non-retour. Si la calotte fond un peu trop, elle perd de la masse, donc de l’altitude. En étant plus basse, elle sera encore plus exposée à des températures élevées. Même si on stabilise la température globale de la planète, il sera alors trop tard. La calotte groenlandaise sera condamnée à disparaître ».

« En Antarctique, c’est par contre davantage une question de courants marins qui est à l’œuvre », pointe encore le scientifique.

Hausse du niveau des mers

Aujourd’hui, le niveau de la mer monte à un rythme d’environ 4 mm par an, et accélère au fil des ans. Les principales contributions à cette hausse sont l’expansion thermique des océans, la fonte des glaciers et, de façon de plus en plus importante, la fonte des calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique.

L’étude, menée en collaboration avec plusieurs experts américains et européens, suggère donc que les prévisions actuelles sur l’impact d’un réchauffement de 1.5°C sur ces calottes sont incertaines. Ceci s’explique par la compréhension limitée des changements de la circulation atmosphérique autour du Groenland et de la circulation océanique autour l’Antarctique.

Cependant, l’étude conclut également qu’un réchauffement de la planète supérieur à une limite de 1,5 à 2,0°C entraînerait, sur des échelles de temps plus longues, une perte de masse irréversible des calottes glaciaires.

Cette perte massive serait due, pour le Groenland, à la fonte accrue de la calotte glaciaire. Pour l’Antarctique, les instabilités marines de certains secteurs de la calotte glaciaire, en particulier de la calotte glaciaire de l’Antarctique de l’Ouest, seraient impliquées.

Cette fonte de glace entraînerait une élévation du niveau de la mer de plusieurs mètres – sur des échelles de temps allant de siècles aux millénaires -, avec des conséquences dramatiques pour l’existence des petits États insulaires et pour les villes côtières du monde entier.

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