Smart Gastronomy Lab : l’alimentation du futur est en route

3 août 2015
par Elise Dubuisson
Temps de lecture : 6 minutes

Prenez quelques grammes de gastronomie, une pincée de scientifiques, un soupçon d’économie et une poignée de spécialistes des nouvelles technologies. Mélangez le tout, laissez infuser et vous obtiendrez le Smart Gastronomy Lab!

À la croisée des chemins entre cuisine et laboratoire, cet espace de création wallon participe à l’élaboration de l’alimentation de demain.

 

Car oui, le domaine de l’alimentation n’échappe pas à la révolution des nouvelles technologies. Tout comme ces dernières permettent d’améliorer les traitements médicaux, elles devraient permettre aussi d’améliorer ce que l’on mange. Ou plutôt ce que l’on va manger !

« L’idée du Smart Gastronomy Lab est de réunir des acteurs de nombreux domaines pour qu’ils travaillent ensemble afin d’obtenir des résultats rapides et performants », explique Dorothée Goffin, directrice du laboratoire.

 

Une multitude de savoirs

 

Pour Gembloux Agro-Bio Tech (Université de Liège), mettre sur pied un tel projet n’est finalement que le dernier maillon de la chaîne.

 

« Développer un living lab dans le domaine de l’agroalimentaire et de la gastronomie, c’est la suite logique des choses. Cela fait des années que nous travaillons dans l’agroalimentaire de la production au produit fini. Cette nouvelle expérience va nous permettre d’aller plus loin encore en arrivant au bout de la chaîne : chez le consommateur afin, notamment, d’améliorer son expérience. Pour ce faire, nous tenions à nous entourer de toutes les personnes qui peuvent, de par leurs savoirs, apporter leur pierre à l’édifice».

 

Le projet s’est donc naturellement divisé en 4 pôles :

 

  1. – La gastronomie : de grands chefs wallons font partie intégrante du projet. Ils sont là pour tout ce qui touche à la qualité des produits tant nutritionnelle que gustative et pour faire le lien avec le terroir.
  2. – Les développeurs et experts des nouvelles technologies qui sont aux commandes du KIKK, le festival international des arts numériques de Namur.
  3. Le bureau économique de la Province de Namur  qui permet de cibler les problématiques à résoudre. De manière à ce que les découvertes réalisées aient aussi des retombées économiques. « Nous avons deux ans, pour trouver le business modèle idéal de notre living lab. En d’autres termes, il faut que d’ici deux ans, il soit capable de s’autofinancer », explique Dorothée Goffin.
  4. – Gembloux Agro-Bio Tech pour toute la partie scientifique.

« C’est en croisant les expertises des acteurs de ces différents pôles qu’on arrivera à avoir des regards différents sur ce qu’il faut faire. Je suis convaincue que grâce à ce mélange des genres nous aurons des résultats plus rapidement que si nous travaillons seuls ».

 

D’ailleurs, les équipes travaillent en « lean project », une démarche qui consiste à mettre, très rapidement, au point un prototype de faible coût au point afin de le tester plus rapidement. Il ne s’agit pas de faire deux ans de travaux pour se lancer. Non ici on pense, on teste, on améliore, on re-teste, etc.

 

Direction le « cooking lab »

 

Imprimante alimentaire 3D.
Imprimante alimentaire 3D.

Et en pratique, comment se passe la collaboration ?

« Nous allons ouvrir un cooking Lab, une sorte de laboratoire-cuisine où nous mettons à disposition des gens qui le souhaitent des appareils qui ne leur sont généralement pas accessibles : une imprimante 3D, des sondes à ultrasons, du matériel pour la lacto-fermentation, etc. Par ailleurs, des scientifiques qui connaissent ces machines seront sur place pour permettre aux personnes qui viennent de savoir les utiliser. Cuisiniers et scientifiques travaillent donc ensemble sur des choses qu’ils ne peuvent d’ordinaire pas faire chacun de leur côté ».

De cette manière, certains chefs réussissent à extraire un maximum d’arômes d’une infusion à l’aide d’une sonde à ultrasons qu’ils sont incapables de se payer. Pendant que d’autres réalisent des structures en chocolat que seule l’imprimante 3D peut fabriquer.

 

Récipients alimentaires imprimés en chocolat.
Récipients alimentaires imprimés en chocolat.

 

« L’objectif est de réussir à développer de nouveaux outils accessibles techniquement et financièrement à des chefs mais aussi à des personnes qui aiment simplement cuisiner. Des outils qui leur donneront notamment accès à des saveurs et des vitamines qu’ils ne pourraient avoir sans».

 

Des aliments de meilleure qualité

 

Deux projets actuellement en cours vont d’ailleurs dans ce sens : l’un touche à la lacto-fermentation et l’autre à l’étude des volatils.

 

La lacto-fermentation : « Ce processus adapté aux légumes, permet de les enrichir en minéraux et en vitamines mais aussi d’allonger leur durée de consommation. Un processus naturel qui n’entrave pas la qualité du produit mais qui pourrait être très intéressant pour les petits producteurs et les particuliers qui cultivent leurs légumes dans un potager », indique Dorothée Goffin. Pour obtenir la meilleure technique possible, il faut donc que plusieurs acteurs interviennent : les scientifiques qui connaissent le processus, les spécialistes du goût pour s’assurer que celui-ci n’est pas altéré et les maraîchers ou les particuliers afin qu’ils approuvent la faisabilité de la technique au quotidien.

 

L’étude des volatiles : il s’agit ici d’un projet qui requiert de la science et de la technologie ! « Lorsqu’on chauffe un aliment, des molécules volatiles s’en échappent. Or, ces molécules jouent un rôle important dans le goût. Si trop de volatiles s’échappent lors de la cuisson, les industriels ont tendance à rajouter quantité d’exhausteurs pour éviter que l’aliment ne soit fade. Notre approche est différente : nous cherchons à mettre au point des fours, des poêles ou des cocottes intelligentes qui permettraient de baisser la température dès qu’ils détectent que ces volatiles s’échappent. Pour ce faire, les scientifiques doivent lister ces volatiles et les spécialistes de la technologie doivent élaborer les capteurs qui permettront de détecter ces volatils ».

 

Bien entendu les pistes de travail sont extrêmement nombreuses et les idées qui vont émerger de ce Smart Gastronomy Lab risquent bien d’en surprendre plus d’un. On trouve notamment dans leur carton un restaurant qui leur permettra de tester leurs découvertes sur le grand public…

 

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