Les résultats de la recherche menée dans les universités, l’industrie, les hautes écoles ou les centres de recherche débouchent parfois sur la création de « spin-offs ». La mission de ces jeunes entreprises est claire : tenter de valoriser au mieux les « découvertes » et les transformer en produits ou services commerciaux innovants.
La création d’une spin-off est une étape importante pour la recherche, mais aussi pour l’économie. En Wallonie comme à Bruxelles, les pouvoirs publics lancent régulièrement des appels à cette catégorie de candidats-entrepreneurs. En début d’année, la Région de Bruxelles-Capitale a proposé son programme « Launch – Brussels Spin-off 2015 ». Au printemps, la Région Wallonne embrayait avec son programme « First Spin Off ».
Culture de coraux à Madagascar
A l’Université de Mons, on ne s’intéresse toutefois pas encore à ces aides publiques. Du moins pas dans la cadre de la création du projet de spin-off de coralliculture, ou culture des coraux… à Madagascar!
« Le projet de l’UMONS et de l’Université de Madagascar (Université de Tuléar) essaient de mettre en place a des objectifs écologiques, sociaux, mais également économiques », explique Nicolas Puccini, ingénieur commercial de l’UMons (Faculté Warocqué d’Économie et de Gestion).
Le consultant vient de se livrer à une analyse du projet sur place. Il pointe les principaux atouts du projet.
« Il s’agit de valoriser des résultats de recherche obtenus notamment par Gildas Todinanahary, doctorant à l’Université de Tuléar, aujourd’hui à l’Université de Mons », précise-t-il. « Dans un même temps, le projet de culture de coraux de cette spin-off doit permettre de faire mieux vivre la population locale et tenter de limiter la destruction des récifs coralliens ».
Préservation des récifs naturels
« Les chercheurs estiment qu’un quart de la population des récifs coralliens a déjà disparu et qu’à ce rythme, 50% auront disparu d’ici 2030 », indique de son côté l’UMons.
Une culture responsable de coraux sur place serait une première en Afrique. La plupart des coraux exportés dans le monde viennent d’Asie. Cela apporterait dès lors aux pêcheurs de Madagascar un revenu complémentaire tout en aidant à la préservation de ces animaux.
Pour les scientifiques montois, notamment du laboratoire de Biologie des Organismes Marins et Biomimétisme, ce projet pourrait ouvrir de nouvelles opportunités de recherches.
L’exemple de la culture de concombres de mer
Le laboratoire du Dr Igor Eeckhaut connaît bien la région. Et pour cause, depuis une quinzaine d’années il est impliqué là-bas dans l’holothurieculture ou aquaculture des concombres de mer. Cette activité est réalisée en partenariat avec l’Institut Halieutique & des Sciences Marines (IHSM) de l’Université de Tuléar.
Ce type d’aquaculture a pour but de reproduire les holothuries afin de les vendre aux Asiatiques, très friands de ce genre de mets, et d’éviter que les industriels ne viennent piller ces animaux présents, entre autres, près de Madagascar.
Pour les holothuries, une spin-off a d’abord été créée. Elle a depuis été convertie en une société indépendante qui emploie plus de cent personnes. Le projet de coralliculture pourrait suivre le même chemin.
Bouturage de coraux en collaboration avec L’Institut Halieutique & des Sciences Marines (IHSM) de l’Université de Tuléar
Il s’agit cette fois de couper des fragments de coraux afin de les bouturer. Ce bouturage de fragments coralliens est possible grâce à la capacité qu’a le corail à se reproduire de façon asexuée. Une fois bouturés, ils sont collés sur des supports artificiels en ciment puis installés en mer sur des tables de culture. Celles-ci sont disposées dans un site favorable ayant des conditions optimales de luminosité et de courants marins. Après 6 à 8 mois de croissance, ces boutures atteignent une taille moyenne « vendable » de 10 cm.
Le projet CORAIL a comme objectif de reproduire des coraux afin d’en exporter une partie vers l’Europe pour les aquariophiles, afin que ces derniers n’en prélèvent plus, ou moins, dans les milieux naturels, et d’en réimplanter une partie dans les récifs afin de contrer ce fléau.
L’Institut Halieutique & des Sciences Marines (IHSM) de l’Université de Tuléar joue un rôle de sensibilisation au niveau des villageois qui n’ont en majorité pas été plus loin que l’école primaire et confondaient jusqu’il y a peu pierres et coraux. Ces derniers ont d’ailleurs été surpris d’apprendre que les coraux étaient des animaux et, qui plus est, qu’ils influencent le niveau et le rendement de la pêche. Une fois sensibilisés, les villageois étaient prêts à se lancer dans l’aventure.
La mise en place d’un tel spin-off nécessite un investissement initial. Après deux ans et après avoir supporté les frais de démarrage, l’activité serait déjà rentable. Ces estimations sont bien entendu à prendre avec des pincettes, mais laissent présager un bel avenir pour la polyaquaculture villageoise du sud-ouest de Madagascar. Et de nouvelles recherches sur place pour les scientifiques, belges et malgaches.