Ce n’est ni une catastrophe, ni réellement une surprise, mais les centaines de météorites récoltées ces dernières années en Antarctique lors des missions scientifiques menées par des chercheurs belges, en collaboration avec des scientifiques japonais, ne sont pas éternelles.
« Comme la plupart des météorites, elles souffrent d’une maladie bien connue, l’oxydation », indique le Dr Vinciane Debaille, Chercheur qualifié F.R.S.-FNRS à l’Université Libre de Bruxelles (ULB). Bref, elles rouillent, malgré les précautions prises par les chercheurs pour les conserver dans les meilleures conditions possibles.
Les cailloux de l’espace n’aiment pas le climat tempéré
Lors de leur récolte, les météorites sont soigneusement indexées et photographiées. Elles sont ensuite emballées et conservées congelées pour ensuite être expédiées vers le Japon et la Belgique. Ce n’est qu’en laboratoire qu’elles sont décongelées et étudiées.
En Belgique, la gestion de la moitié de ces météorites est confiée aux universités libres de Bruxelles (ULB et VUB), avec l’Institut Royal des Sciences naturelles de Belgique.
« Une fois décongelées, ces météorites souffrent du climat humide et variable que nous connaissons », souligne la géologue de l’ULB. « Elles rouillent rapidement. Les premiers signes sont visibles en quelques heures. Cela se passe bien entendu à l’échelle microscopique. Ensuite, cette rouille se diffuse lentement. À terme, les météorites se dégradent complètement.
Des collections scientifiques ouvertes aux chercheurs
En Antarctique, ce phénomène est quasi absent. Les météorites les plus anciennes retrouvées sur le Continent blanc sont tombées voici près d’un million d’années.
« Pour nous, curateurs de ces collections, cela signifie que le matériel dont nous disposons doit être étudié rapidement. Et cela concerne aussi nos collègues étrangers. Nos collections scientifiques sont ouvertes. »
Au fil des trois missions conjointes (belgo-japonaises) menées dans les champs de glace bleue situés sur le plateau antarctique, juste au-dessus de la Station scientifique belge Princess Elisabeth, plus d’un millier de cailloux de l’espace ont été récoltés. Parmi eux se trouvent quelques pépites.
« Dont une pièce absolument unique », indique le Dr Debaille. « Il s’agit d’une angrite, soit le plus vieux basalte jamais produit dans le système solaire. Cette météorite provient sans aucun doute d’un astéroïde, mais nous n’en connaissons pas l’origine exacte. Cet astéroïde a peut-être déjà été détruit ».
Les vestiges de Vesta sur Terre se comptent par centaines de kilos
L’étude de cette angrite, mais aussi celle des autres météorites, apporte aux scientifiques de nouvelles informations sur les processus de formation du système solaire. “Leur composition chimique ressemble à ce que nous connaissons sur Terre mais est en même temps différente”, souligne Vinciane Debaille.
Les encrites, provenant de l’astéroïde Vesta, apportent également leur lot d’informations à ce propos. À une nuance près: ce type de météorites est bien plus commun que la fameuse angrite.
“Vesta devait être au départ un corps rond, comme une planète. Elle ressemble aujourd’hui à une sorte de gros haricot. Un profil qui résulte d’un impact avec un autre astéroïde”, indique la scientifique de l’ULB. Ce qui explique le nombre important de météorites originaires de Vesta retrouvées sur Terre. Plus de 1.500 kilos de fragments de Vesta ont à ce jour été récoltés.
Un nombre certes important, mais qui ne pèse cependant pas très lourd par rapport à l’ensemble des météorites recensées sur Terre. Elles sont plus de 60.000 pour le moment, dont 41.000 proviennent d’Antarctique. Une proportion importante qui s’explique par la relative facilité à les repérer sur le terrain. « Ce sont des cailloux noirs déposés sur un tapis de glace blanche », précise Vinciane Debaille.
Glaciologie, biologie, gravimétrie, climatologie…
Signalons encore que la récolte de météorites en Antarctique et leur étude ne sont qu’une facette des multiples recherches scientifiques belges menées sur le Continent blanc ces dernières années. Le symposium ”Unlocking a continent: scientific research at the Belgian Princess Elisabeth Station, Antarctica 2008-2016” qui vient de se dérouler au Palais des Académies, à Bruxelles le montre à souhait.