De nombreuses études se sont intéressées aux centenaires à travers le monde, considérant ceux-ci comme des exemples d’un vieillissement en bonne santé. En 2000, Michel Poulain, démographe et professeur émérite de l’UCLouvain, introduit le concept de « zone bleue de longévité » (Longevity Blue Zone), à la suite de la présence de nombreux centenaires dans les montagnes de Sardaigne et de la validation de leur âge exceptionnel.
Quatre endroits à la longévité extrême
Les zones bleues de longévité sont donc les régions du monde où la population présente une longévité exceptionnelle et un nombre plus important de centenaires. Jusqu’à ce jour, les zones bleues de longévité validées par le professeur UCLouvain étaient au nombre de quatre : l’Ogliastra en Sardaigne, Okinawa au Japon, Nicoya au Costa Rica et Ikaria en Grèce.
L’intérêt de comparer les populations de ces « Blue Zones » ? « Cela permet de mettre en évidence les déterminants qui leur permettent de vivre plus longtemps et en bonne santé, car la plupart de ces personnes sont nées et ont vécu dans le même environnement, suivent le même style de vie. Et, dès lors, de mettre en place des initiatives publiques ou privées afin de transférer les leçons des « Blue Zones » au sein de nos sociétés. Et ce, plus spécifiquement, à l’échelle de communautés locales, et ainsi d’améliorer l’état de santé et le bien-être de ces populations », mentionne le scientifique.
Deux fois plus de centenaires qu’en Belgique
La Martinique, département français d’outre-mer, est connue pour la longévité de ses 350.000 habitants, mais également pour une forte émigration vers la métropole.
Dès 2019, Michel Poulain lançait un recensement des centenaires avec le support de l’association locale ‘Protégeons nos centenaires’. Résultat ? Au premier janvier 2023, l’île comptait près de 400 centenaires, soit deux fois plus par tête d’habitant qu’en France. On observe par ailleurs que les Martiniquais très âgés vivent plus longtemps s’ils et elles restent sur leur île, par rapport à celles et ceux qui ont émigré.
Concrètement, Michel Poulain a pu estimer que, entre 1898 et 2022, la probabilité de devenir centenaire était supérieure à 2 % en Martinique, soit un nouveau-né sur 40. Ce niveau est similaire à ceux les plus élevés au monde, observés en Sardaigne et à Okinawa. A titre de comparaison, cette probabilité équivaut à plus du double de celle de la Belgique.
Des soins de santé publique efficaces
Les raisons de cette longévité ? Selon les premières hypothèses de Michel Poulain, ce seraient les avantages de la génétique (forte sélection liée au contexte de l’esclavage dont sont descendants la plupart des Martiniquais) ; un climat et un style de vie favorables (« on prend le temps de vivre », explique Michel Poulain) ; et une sécurité sociale et des soins de santé qui fonctionnent.
Ce recensement permet à la Martinique d’obtenir le label scientifique de « Longevity Blue Zone », ce qui en fait la 5e Zone de Longévité dans le monde.