Bioluminescence chez Amphiura filiformis, l'ophiure étudiée à l'Université de Mons.
Bioluminescence chez Amphiura filiformis, l'ophiure étudiée à l'Université de Mons.

La bioluminescence des ophiures décryptée à Mons

3 mai 2017
par Christian Du Brulle
Temps de lecture : 4 minutes

La bioluminescence dans le monde animal est un phénomène connu. Il suffit de penser aux lucioles qui scintillent en soirée…  

 

Selon les cas, ce phénomène lumineux sert à éloigner des prédateurs, à attirer des proies ou encore, il intervient dans la communication entre partenaires sexuels lors de certaines phases de la reproduction.

 

L'ophiure photographiée en aquarium... enfouie dans le sédiment.
L’ophiure photographiée en aquarium… enfouie dans le sédiment. (Cliquer pour agrandir)

Toutefois, les mécanismes moléculaires à la base de ces phénomènes lumineux ne sont pas toujours compris dans le détail par les scientifiques. À l’Université de Mons, le Dr Jérôme Delroisse, du Laboratoire de Biologie des Organismes Marins et Biomimétisme, vient de lever un coin du voile sur la bioluminescence des ophiures, animaux marins de l’embranchement des échinodermes (le groupe des étoiles de mer et des oursins, notamment). Un travail réalisé en étroite collaboration avec le Laboratoire de Biologie Marine de l’UCL.

 

Identification de l’acteur moléculaire

 

« Nous savons que la bioluminescence résulte d’une forme d’oxydation », explique le biologiste. « C’est une réaction entre un substrat, la luciférine, et une enzyme, la luciférase, qui en est à l’origine ».

 

Ces termes sont des termes génériques. Il existe en réalité toute une série d’enzymes capables de déclencher cette production de lumière selon les organismes étudiés. « Nos travaux viennent de déterminer de quel enzyme il s’agissait dans le cas d’un échinoderme. L’identification de cet acteur moléculaire constitue la première avancée de nos travaux ».

 

Origine commune à deux organismes marins distincts

 
La seconde avancée engrangée à l’Université de Mons est davantage zoologique. Elle porte sur une question évolutive. 

 

Amphiura filiformis,  souvent appelée "ophiure fragile", l'échinoderme modèle de l'étude montoise.
Amphiura filiformis, souvent appelée “ophiure fragile”, l’échinoderme modèle de l’étude montoise.

 

Il faut se rappeler que la bioluminescence n’est pas un phénomène unique. Elle est apparue à de multiples reprises dans l’évolution et de manière indépendante.  La majorité des organismes lumineux (parfois même au sein d’un même groupe zoologique) utilisent des luciférases différentes qui n’ont pas d’origine évolutive commune : on parle de convergence évolutive.

 

« Dans le cas de notre étude, nos analyses ont montré une origine commune entre la luciférase de l’ophiure et une autre luciférase identifiée chez la pensée de mer, un animal du groupe des cnidaires (embranchement qui comprend aussi les méduses et les coraux). Ces deux organismes, pourtant très éloignés l’un de l’autre dans l’arbre du vivant, utilisent donc un système commun », précise le chercheur.

 

 

« Nous pensons que les conditions environnementales similaires pour ces deux espèces benthiques vivant sur des fonds marins vaseux, et se nourrissant par “suspensivorie” (matières en suspension) , pourraient expliquer l’émergence d’un système lumineux commun », précise le Dr Delroisse.

 

Ce travail ouvre la voie à de nouvelles recherches sur la bioluminescence chez ces invertébrés marins. Il permet de mieux comprendre l’évolution de la bioluminescence au sein de l’arbre de la vie.

 

Représentation schématique de la fonction de la bioluminescence chez l'ophiure. Le bras attaqué par un prédateur s'autotomise à la manière d'une queue de lézard et "flashe" de manière à distraire le prédateur, évitant ainsi que l'animal entier soit dévoré...
Représentation schématique de la fonction de la bioluminescence chez l’ophiure. Le bras attaqué par un prédateur s’autotomise à la manière d’une queue de lézard et “flashe” de manière à distraire le prédateur, évitant ainsi que l’animal entier soit dévoré…
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