Maladies génétiques rares : un test wallon pour sauver la vie des enfants

5 avril 2022
par Daily Science
Temps de lecture : 4 minutes

Dans les soins intensifs pédiatriques et de néonatologie, près d’un décès sur cinq résulte d’une maladie génétique grave qui est diagnostiquée trop tardivement voire pas du tout. Grâce à un projet pilote de séquençage rapide du génome lancé il y a un an par le laboratoire de génétique humaine du GIGA (ULiège), soutenu par La Wallonie, le délai diagnostic est réduit à quelques dizaines d’heures à peine. Et ce, au lieu de plusieurs mois.

Un test performant et rapide

« Sur dix enfants testés, nous avons pu identifier les mutations génétiques pour six d’entre eux », explique Dr Aimé Lumaka Zola, principal investigateur de ce projet pilote.

Le test s’avère bien plus performant que les tests classiques, lesquels résolvent environ 40% des cas. Il est également plus rapide. Dans des situations médicales particulièrement urgentes, la prise en charge clinique peut être immédiatement adaptée.

Le cas de Lucien, 2 ans, sauvé in extremis

Hospitalisé à l’Hôpital de la Citadelle pour des crises de convulsion, le petit Lucien est en état critique avec une détresse neurologique et une faiblesse musculaire généralisée, et doit être alimenté artificiellement.

Les cliniciens suspectent une myasthénie congénitale, et programment une biopsie musculaire sous anesthésie générale pour la semaine suivante. Le pédiatre propose alors d’intégrer immédiatement l’enfant au programme d’étude. Fort heureusement, les chercheurs ont pu fournir un diagnostic génétique avant la réalisation de la biopsie.

« L’enfant était en réalité porteur d’une maladie génétique dont les symptômes ressemblent fort à une myasthénie. Grâce à notre diagnostic génétique, le petit a pu commencer un traitement très rapidement. Si le diagnostic génétique était tombé quelques jours plus tard, l’enfant aurait subi une anesthésie générale pour une biopsie musculaire. Or certains anesthésiques aggravent les symptômes de cette maladie ! Une biopsie aurait aggravé son cas, alors qu’aujourd’hui, il y a un réel espoir que l’enfant puisse se développer et vivre normalement. », poursuit Dr Lumaka Zola.

Le diagnostic génétique révélé par son équipe a permis de déterminer le traitement nécessaire à la maladie rare de Lucien (qui toucherait seulement une centaine de personnes dans le monde).

“Next Generation Sequencing”

Le laboratoire de génétique humaine du Pr Vincent Bours a adopté une nouvelle technique de séquençage massif parallèle, appelée Next Generation Sequencing (NGS). Celle-ci permet d’étudier, à partir d’un simple échantillon sanguin, plusieurs portions voire l’entièreté du matériel génétique de plusieurs individus à la fois.

Cette technologie est beaucoup plus rapide que les tests utilisés habituellement pour analyser les 25.000 gènes constituant le génome humain et y repérer une mutation spécifique parmi les 8000 maladies monogéniques connues.

S’inspirant d’expériences semblables menées aux États-Unis et en Angleterre, le projet wallon a réussi à réduire davantage encore le délai de réponse. Le résultat est désormais connu en une quarantaine d’heures. Et ce, grâce à une équipe entièrement dédiée à ces séquençages, disponible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Et en mettant en place un circuit court intégrant l’ensemble des manipulations et le processus de recherche (préparation de la librairie, séquençage, analyse et interprétation).

Hôpitaux partenaires

À présent, l’équipe liégeoise est en quête de financement et de nouveaux hôpitaux partenaires pour élargir l’expérience à l’échelle de la Belgique et intégrer au projet 30 enfants et leur famille d’ici à la fin de 2022.

L’Hôpital de la Citadelle et la Clinique CHC MontLégia à Liège sont d’ores et déjà parties prenantes à ce projet pilote. D’abord en identifiant les patients potentiels, puis en conscientisant les parents à l’intérêt vital de la méthode. « Cette dernière phase se fait en binôme avec un généticien afin de donner à la famille toutes les garanties scientifiques », précise l’ULiège dans un communiqué.

Enfin, à l’avenir, « il s’agira de développer une activité de service pour rendre ce test disponible en Belgique et à l’étranger, et obtenir les conditions de remboursement auprès des autorités belges. »

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