Des corps au chaud sans se ruiner, ni ruiner la planète

5 novembre 2024
par Laetitia Theunis
Temps de lecture : 4 minutes
“SlowHeat : réchauffer les corps, moins les logements”, par Denis De Grave, Amélie Anciaux, Jean Sobczak, Grégoire Wallenborn, Geoffrey van Moeseke (dir.), et 25 co-chercheurs. Presses universitaires de Louvain. VP 39 euros, VN 25 euros

Alors que l’automne s’installe et que les températures extérieures baissent, la question du chauffage domestique est sur toutes les lèvres. Et si, en apportant de la chaleur directement au niveau du corps, et non plus en chauffant excessivement le logement, on pouvait, sans perte sensible de confort et sans travaux importants, faire drastiquement chuter la somme d’argent dépensée? C’est la thèse de SlowHeat, projet de recherche interdisciplinaire et participatif qui a mobilisé 29 ménages bruxellois, dont 4 chercheurs professionnels, entre 2020 et 2023. Les enseignements tirés de cette expérience font l’objet d’un livre riche en réflexion et en explications, « SlowHeat : réchauffer les corps, moins les logements », paru aux presses universitaires de Louvain.

Un autre regard sur sa garde-robe

On l’a tous et toutes expérimenté : 15 degrés à l’extérieur, c’est une température agréable, mais 15 degrés à l’intérieur, c’est moins confortable. La sensation de froid est plus intense. Les raisons sont assez simples : à l’extérieur, d’une part, les vêtements sont adaptés au froid et d’autre part, on y est rarement statique.

Partant de ce constat, pour éviter la sensation de froid à l’intérieur, les co-chercheurs ont adopté les grosses chaussettes voire les pantoufles, un gros pull en laine et, notamment lors de longues périodes en position assise devant l’écran, des sous-vêtements thermiques tels qu’utilisés lors des sports d’hiver . « En les revêtant, le niveau de confort est exprimé dans une pièce chauffée à 18,5°C, contre 22°C en l’absence de cette couche textile technique. Cette simple astuce permet de réduire de 3,5°C la température de son logement et de 20 à 30 % sa consommation, sans perdre en confort », expliquent Denis De Grave, Amélie Anciaux, Jean Sobczak, Grégoire Wallenborn, Geoffrey van Moeseke (dir.), et les 25 autres chercheurs.

Lors du télétravail, le plaid sur les genoux est aussi un allié. Certains ont recours à des mitaines et à un sous-clavier chauffant. Et se lèvent plus souvent pour se faire une tasse de tisane chaude, pour déambuler dans le jardin ou sur la terrasse, pour accomplir de petites tâches qui, l’air de rien, réchauffent le corps. « Lorsque l’on fait son lit ou le ménage, notre corps produit respectivement 2 et 3 fois plus de chaleur que lorsqu’il est affalé. »

Une acclimatation naturelle

La sensation d’avoir froid varie en fonction de l’âge. Si les enfants et les ados ont tant de mal à mettre leur pull ou leur veste, c’est parce qu’ils n’en ressentent pas le besoin : ils ont davantage chaud que leurs parents. En effet, frileux rime avec vieux, moins avec vieille, mais c’est pareil !

Il y a moyen de contourner cela. « A la différence des graisses blanches qui entourent notre corps et nous isolent du froid, les graisses brunes sont riches en mitochondries. Ces organites sont de véritables petites centrales à chaleur, très abondants chez les Inuits et les nourrissons pour les aider à maintenir leur température corporelle. Chez les Occidentaux, à partir d’un certain âge, les graisses brunes sont moins présentes, mais une exposition régulière au froid, même modéré, stimule leur développement et leur activité. » De quoi peu à peu s’endurcir.

« Dans la diversité de nos vécus, nous nous sommes unanimement rendu compte que nos corps sont capables de progressivement s’adapter au froid. Entre deux hivers, alors que la température de nos logements était restée la même (de l’ordre de 15°C en moyenne, NDLR), nous avons pu nous passer de certains vêtements et/ou réduire l’usage des équipements de chauffage de proximité.»

Chaleur ponctuelle et ciblée

L’idée est d’assister le corps avec précision et mesure afin de concilier confort et modération énergétique à l’aide d’assistants électriques.  Ceux-ci sont des appareils de basse puissance permettant de (ré)chauffer les corps de façon active avec une chaleur plus ou moins vive en prenant soin d’éviter l’air comme vecteur thermique.

Citons les panneaux radiants, des plaques chauffantes par rayonnement à poser sur pied ou à accrocher à un support, et à placer proche du corps. Mais aussi les couvertures, les ponchos et autres gilets chauffants à l’aide de résistances incorporées dans le textile et alimentées par une batterie nourrie à l’électricité. Ils sont bien utiles lorsque le chauffage central est absent ou tourne au ralenti. Et consomment moins d’énergie.

« Une voie qui nous paraît équilibrée, de sorte qu’elle devrait susciter plus facilement l’adhésion que d’autres approches plus radicales. »

Un gain en bien-être

Le SlowHeating, n’est-ce pas perdre en confort ? Cela dépend de la représentation de chacun de ce qu’est le confort. Mais le SlowHeating est sans conteste, aux dires des co-chercheurs, un gain en bien-être. Ils dorment mieux, se sentent bien chez eux et en accord avec leurs valeurs, ont l’impression d’avoir une vie davantage remplie, sensée et active.

Et non, quelques degrés en moins, ce n’est pas un souci, ni pour la salubrité ni pour la santé, du moins dans un logement sain et bien ventilé. Les avantages de la ventilation fréquente sont mis en avant et l’humidité démystifiée dans de nombreuses et passionnantes pages de cet ouvrage de référence pour une consommation plus raisonnée et raisonnable du chauffage domestique.

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