L’oreillette gauche sous surveillance

5 décembre 2022
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 4 min

Quand l’oreillette gauche à des problèmes, c’est tout l’organisme qui risque d’avoir des problèmes. On pourrait résumer par cette phrase les travaux du Dr Sébastien Deferm. Le médecin vient de boucler sa thèse en cardiologie à l’Université d’Hasselt, après ses études de médecine à la KULeuven. Le spécialiste, actuellement en Allemagne, s’est intéressé aux relations étroites que l’oreillette gauche a avec les autres parties du cœur ainsi que son bon, ou moins bon, fonctionnement. Et ce que cela implique pour la santé.

« Jusqu’il y a peu, on estimait, en effet, que si l’oreillette gauche dysfonctionnait, cela ne pouvait être que le résultat d’un autre pathologie cardiaque. Désormais, on sait qu’un dysfonctionnement de l’oreillette gauche peut potentiellement induire des soucis ailleurs dans le cœur », indique le médecin. De quoi garder cette structure cardiaque à l’oeil.

Les travaux du Dr Deferm viennent d’être récompensés par le Prix Jacqueline Bernheim 2022, décerné par le Fonds pour la Chirurgie cardiaque. Le médecin recevra son prix en février 2023, lors d’une cérémonie organisée dans le cadre du Congrès de la Société belge de cardiologie.

Des fuites du côté de la valve mitrale

« L’oreillette gauche est une cavité dont le rôle important dans la circulation sanguine est connu depuis le 17e siècle », rappelle-t-il. « C’est cette chambre qui reçoit le sang oxygéné venu des poumons. Elle le transmet au ventricule gauche qui, lorsqu’il se contracte, l’expédie ensuite dans tout l’organisme. »

Voilà pour le rappel technique. Ce qui a intéressé le scientifique dans le cadre de sa thèse, c’est de mieux cerner l’impact ou les conséquences d’un dysfonctionnement de cet atrium sur d’autres éléments-clés du cœur. À commencer par le problème de fuite de la valve mitrale.

Cette valve joue un rôle de clapet. Elle permet au sang de passer de l’oreillette gauche vers le ventricule gauche. Quand ce dernier se contracte, elle empêche le sang de remonter vers l’oreillette. En cas de fuite de la valve, l’irrigation en sang frais de l’organisme n’est donc plus aussi efficace, puisqu’un partie remonte intempestivement vers le haut du cœur.

Schéma du cœur, libre de droit

Toute la question pour traiter au mieux les patients souffrant de ce type de problème est de savoir de quoi résulte effectivement cette fuite. Trois situations se présentent. Soit la fuite mitrale trouve son origine du côté de l’oreillette, soit du côté du ventricule, soit elle résulte d’un problème intrinsèque. Et les traitements dans ces divers cas de figure ne sont évidemment pas identiques.

C’est ce qu’a étudié le médecin au moyen d’imagerie médicale. Il s’est notamment intéressé à la plasticité de l’anneau de la valve mitrale (appelé « annulus »  et qui est une sorte de cerclage qui entoure la valve) et du rôle de cette plasticité sur l’importance de la fuite. Son étude a montré qu’en cas d’arythmie de l’oreillette, les mouvements de cet anneau sont perturbés, ce qui accentue l’importance de la fuite.

Sébastien Derferm a aussi étudié la question de la calcification de l’anneau de cette valve. Un problème qui affecte plutôt les personnes âgées. « Ce sont là les principaux résultats de mon travail », précise le cardiologue. « Mais, j’ai aussi exploré deux autres axes en lien avec le bon ou le mauvais fonctionnement de l’oreillette gauche. »

AVC et fibrillation auriculaire

Il a ainsi étudié les liens pouvant exister entre les dysfonctionnements de l’oreillette gauche et la survenue d’un accident vasculaire cérébral (AVC). Il a pu montrer que certains paramètres rencontrés chez des patients ayant eu un AVC pouvaient utilement alerter les cardiologues sur un problème de fibrillation de l’oreillette. Enfin, il a aussi mené quelques recherches sur les liens entre la détérioration du fonctionnement de l’oreillette et l’insuffisance cardiaque.

Le cardiologue développe désormais son expertise à l’hôpital universitaire de Mainz, en Allemagne. « Je devrais y séjourner au moins un an», dit-il. « Si la situation le permet, j’aimerais y rester deux ans. Par la suite, je compte rentrer en Belgique et sans doute exercer. La pratique clinique m’intéresse, mais la recherche également. L’attribution du Prix Bernheim est pour moi, clairement, une forme de reconnaissance de mon travail de recherche et un encouragement dans cette voie. J’ai beaucoup de nouvelles idées de recherche à développer », conclut-il.

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