La conscience chez les personnes inconscientes se lit dans les connexions cérébrales

7 février 2019
par Christian Du Brulle
Temps de lecture : 3 minutes

Comment évaluer le niveau de conscience d’une personne plongée dans un état inconscient, par exemple un patient dans le coma ou une personne placée sous anesthésie? La docteure Athéna Demertzi (Chercheuse qualifiée FNRS au GIGA, de l’Université de Liège), en collaboration avec des chercheurs français, canadiens et américains, montre que l’analyse des connexions entre différentes zones du cerveau peut apporter une ébauche de réponse à cette question.

L’équipe a étudié en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) le comportement du cerveau de 169 personnes, dont plus de la moitié (87) étaient suivies au CHU de Liège. Certaines de ces personnes étaient en bonne santé, mais placées sous anesthésie, d’autres se trouvaient dans un état de conscience minimale/état végétatif.

Quatre schémas distincts de communication

Les chercheurs ont analysé les fluctuations du signal de l’IRMf (dépendant du niveau d’oxygénation du sang) dans 42 régions clés du cerveau représentant six réseaux cérébraux connus pour jouer un rôle important dans la cognition.

Cette analyse a mis en évidence quatre schémas distincts dans le cerveau. L’un d’eux, très complexe, dénote une coordination à longue distance à l’échelle du cerveau entre les régions étudiées. Ce schéma était le plus souvent observé chez les personnes conscientes et en bonne santé.

Un autre modèle montrait par contre une faible coordination entre les différentes régions du cerveau et était le plus apparent chez les patients atteints d’un syndrome d’éveil non répondant.

Le cerveau présente différents schémas de connexions suivant que la personne est consciente ou non. Lorsque nous sommes conscients, les régions du cerveau communiquent intensément, ce qui facilite l'échange d'informations d'une manière efficace. Au contraire, lorsque nous sommes inconscients, nos régions cérébrales deviennent "inactives" et ne se connectent pas entre elles (cohérence autour de zéro, couleur verte). Les personnes inconscientes préfèrent rester plus longtemps dans ce mode et éviter d'explorer d'autres configurations cérébrales, ce qui ne permet pas la flexibilité de l'échange d'informations. © E. Tagliazucchi & A. Demertzi

Le cerveau présente différents schémas de connexions suivant que la personne est consciente ou non. Lorsque nous sommes conscients, les régions du cerveau communiquent intensément, ce qui facilite l’échange d’informations d’une manière efficace. Au contraire, lorsque nous sommes inconscients, nos régions cérébrales deviennent “inactives” et ne se connectent pas entre elles (cohérence autour de zéro, couleur verte). Les personnes inconscientes préfèrent rester plus longtemps dans ce mode et éviter d’explorer d’autres configurations cérébrales, ce qui ne permet pas la flexibilité de l’échange d’informations. © E. Tagliazucchi & A. Demertzi

« Ces résultats donnent un aperçu de la dynamique cérébrale à grande échelle qui soutient le comportement conscient, suggérant que la coordination à grande distance et très complexe de l’ensemble du cerveau est une caractéristique clé de la conscience », résument les chercheurs. « Nos résultats offrent aussi des indices importants dans la recherche de marqueurs biologiques de la conscience ».

Des pistes pour rétablir la conscience

« Cette étude est une étape importante vers la révélation de signatures cérébrales très recherchées, mais insaisissables qui sont intrinsèques et spécifiques à la conscience », souligne de son côté l’Université de Liège dans un communiqué.

« Ces résultats représentent un grand progrès dans la remarquable gamme d’expériences conscientes disponibles aux patients dans des conditions non communicantes, car ils illustrent l’évolution temporelle de la complexité associée à la conscience, et peuvent informer les cliniciens de fenêtres pendant lesquelles des interventions non invasives peuvent être plus efficaces pour rétablir la conscience », précise encore l’université.
 

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