Le fezolinetant, utilisé pour le traitement de certains symptômes liés à la ménopause, comme les sueurs nocturnes ou les bouffées de chaleur, est associé à un risque accru de développer un cancer. C’est ce qu’ont découvert 3 chercheurs de l’UNamur : Dre Charlotte Beaudart, du département des sciences biomédicales, Pr Jonathan Douxfils du département de pharmacie et Pr Jean-Michel Dogné, Doyen de la faculté de médecine.
Le fezolinetant se veut être une alternative non hormonale aux thérapies de substitution telles que les dérivés estrogéniques. Néanmoins, comme tout nouveau médicament agissant sur de nouvelles cibles thérapeutiques, il est essentiel de se questionner sur les risques pouvant survenir avec ce nouveau traitement.
Un risque multiplié par 4
Leurs analyses ont montré que le fezolinetant était associé à une augmentation substantielle du risque de cancer endéans la première année de traitement. Ce risque a été observé sur base d’une réanalyse des données des études de phase 3 disponibles publiquement. A noter que les études de phase 3 sont des études cliniques qui sont réalisées avant la mise sur le marché du produit et qui sont utilisées par les autorités réglementaires pour se positionner sur une approbation de commercialisation du produit sur le marché.
Ainsi, dans le cadre du programme d’étude clinique visant à évaluer l’efficacité et la sécurité du fezolinetant, le groupe placebo présentait un risque de développer un cancer de 0.21% par an ; un risque qui est similaire à celui rencontré dans la population générale aux États-Unis dans la même tranche d’âge.
En revanche, le risque observé dans le bras traité avec du fezolinetant à la dose de 45 mg était de 1.46%. Présenté autrement, ceci signifie qu’un cas de cancer va apparaître tous les 80 patients traités sur une période d’un an.
« Grâce à des techniques statistiques méta-analytiques permettant le rassemblement de données cliniques provenant de différentes études, nous avons pu conclure que le fezolinetant augmentait le risque de 4.25 fois », précisent encore les trois chercheurs namurois.
Une réglementation non adaptée
Le fezolinetant a été approuvé cette année par l’Agence Fédérale américaine des Médicaments (Food and Drug Administration – FDA) et a obtenu mi-octobre une opinion positive de la part de l’Agence européenne des Médicaments (EMA).
« Étonnamment, la FDA ne mentionne pas cette augmentation du risque de cancer dans les informations relatives à la prescription (dernière observation du document le 1/11/2023). L’Agence européenne du Médicament ne s’est pas non plus prononcée sur ce risque. Mais les informations actuellement disponibles ne sont que partielles et il est probable qu’une analyse particulière des cas soit documentée au niveau de l’organisme de réglementation européenne. Ces données devraient être disponibles en fin d’année », soulignent les trois chercheurs.
Un rôle antagoniste
D’un point de vue pharmacologique, les chercheurs namurois suggèrent que cette augmentation du risque serait liée au mécanisme d’action du fezolinetant. « Celui-ci, en antagonisant le récepteur 3 à la neurokinin B, inhiberait la libération de kisspeptine depuis les neurones Kisspeptin Neurokinin B Dynorphin (KNDy). Des travaux complémentaires seront néanmoins nécessaires pour supporter ces explications. »
« Ces résultats doivent encore faire l’objet de recherches, notamment pour déterminer si d’autres effets peuvent être responsables de leurs observations. Par ailleurs, les analyses finales sur le fezolinetant doivent encore être remises par l’Agence européenne du Médicament », concluent les 3 chercheurs.