Reconnaissance et valorisation au travail sont essentielles

10 juin 2025
par Raphaël Duboisdenghien
Temps de lecture : 4 minutes
“Être (ou non) reconnu et valorisé au travail”, par Florence Stinglhamber et Gaëtane Caesens. Editions L’Harmattan. VP 23 euros, VN 16,99 euros

Depuis quelque 20 ans, la professeure Florence Stinglhamber mène des recherches en psychologie sur la reconnaissance et la valorisation au travail. Avec Gaëtane Caesens, docteure en psychologie organisationnelle, elle publie «Être (ou non) reconnu et valorisé au travail» aux éditions L’Harmattan. Livre enrichi d’échelles pour mesurer la reconnaissance et la valorisation de l’organisation pour laquelle on travaille. Évaluer son propre niveau de reconnaissance et de valorisation organisationnelles. Et le situer par rapport aux autres travailleurs.

Des enquêtes, issues de la presse spécialisée, interpellent les professeures à l’UCLouvain. «Bien que les chiffres varient quelque peu d’une étude à l’autre, ils nous montrent que nombreux sont les travailleurs qui sont en manque de reconnaissance et de valorisation dans le cadre de leur travail.»

«Quand on demande aux travailleurs ce qui les motive, ce qui joue sur leur qualité de vie au travail, ce qui les fait rester chez un employeur ou encore ce qui fait d’une organisation un lieu où il fait bon travailler, la reconnaissance au travail fait systématiquement partie des trois premiers critères évoqués. Là où la rémunération arrive généralement au mieux en cinquième position.»

Entre science et terrain

Florence Stinglhamber et Gaëtane Caesens proposent une compréhension vulgarisée de cette littérature spécialisée et de combler l’écart entre science et terrain. Elles présentent des perspectives concrètes. La reconnaissance et la valorisation au travail se profilent comme des enjeux majeurs du management moderne.

«Ce livre est à destination d’étudiants en psychologie, en sciences du travail, en management ou en gestion des ressources humaines qui s’intéresseraient à la question de la reconnaissance et de la valorisation au travail. Cet ouvrage s’adresse également aux travailleurs, aux managers, aux professionnels des ressources humaines ainsi qu’aux patrons d’entreprises, désireux de mieux comprendre ce qu’ils vivent dans leurs entreprises. Et ce qu’ils peuvent y faire en tant qu’acteurs de la reconnaissance et de la valorisation.»

Un levier puissant

Pour les psychologues, «se sentir reconnu et valorisé par son employeur ou au contraire, ne pas l’être, a le même impact sur les travailleurs et leurs organisations aujourd’hui qu’il y a 30 ans. Plus encore, certaines recherches nous indiquent qu’un supérieur hiérarchique montrant reconnaissance et valorisation à ses collaborateurs ne pourra pas à lui seul contrebalancer les effets négatifs d’une organisation qui ne serait pas reconnaissante et valorisante.»

«Ces signes restent aujourd’hui un élément de choix auquel les travailleurs sont attentifs et qui les influence grandement au quotidien.»

«Ne pas reconnaître et valoriser son personnel, c’est non seulement se priver d’un puissant levier pour susciter du bien-être et des attitudes, des comportements positifs au travail», ajoutent les chercheuses. «Mais bien pire, c’est aussi un levier négatif vu qu’un manque de reconnaissance est source de désengagement et de retrait personnel.»

Les cas de burn-out sont en constante augmentation ces dernières années. Les recherches scientifiques montrent que la reconnaissance et la valorisation au travail constituent un facteur protecteur contre cet épuisement professionnel. Les travailleurs auront moins tendance à vivre cet épisode où ils se sentiront vidés, au bout du rouleau.

Les bureaux flexibles

La tendance grandissante, avantageuse économiquement, d’organiser des espaces de travail en «flex desks» ne favorise pas l’humanisation. Ces bureaux flexibles ne permettent pas au personnel de disposer d’un poste de travail fixe. Plusieurs recherches dénoncent le manque d’intimité, les nuisances sonores ou visuelles, les difficultés de concentration, les problèmes de santé, la désocialisation.

Les «flex desks» suscitent un sentiment d’invisibilité. Créent une impression d’abandon. Provoquent des distractions. Limitent la possibilité de personnaliser l’espace de travail.

Comment atténuer ces effets chez les travailleurs? Selon une étude de la spécialiste en gestion des ressources humaines Catherine Dujardin et de Florence Stinglhamber, une solution est d’être impliqué à l’aménagement de l’espace de travail en donnant son avis. Être informé de manière authentique et transparente des objectifs poursuivis diminue la déshumanisation.

Cette étude a aussi mis en évidence le rôle plus mitigé du télétravail. Pour Florence Stinglhamber et Gaëtane Caesens, «il serait intéressant que de futures recherches permettent d’identifier plus clairement les caractéristiques spécifiques du télétravail qui pourraient faire en sorte qu’il occupe un rôle réhumanisant. Adopter une vision plus nuancée de la déshumanisation organisationnelle pourrait être une piste de recherche fructueuse pour l’avenir.»

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