La chasse aux polluants en temps réel dans les eaux wallonnes

11 janvier 2019
par Camille Stassart
Durée de lecture : 3 min

Nous l’oublions parfois, mais l’eau douce et potable reste une ressource rare. Elle provient essentiellement des nappes phréatiques, qui représentent moins de 1% de l’eau totale du globe. En Wallonie, 76% de l’eau de distribution vient de ces eaux souterraines. Or ces réserves sont aujourd’hui mises en danger par de nombreux polluants.

Surveiller la présence d’éléments toxiques dans les nappes phréatiques est le but du projet MOPI (MOnitoring of Pollutants In groundwater). Une étude coordonnée par Sophie Pirard, ingénieure en chimie à la Haute École Libre Mosane (HELMo), et financée par le programme « FIRST Haute École » de la Région Wallonne.

De la station-service à la nappe phréatique

Commencée en 2016, cette étude a été pilotée en collaboration avec Jérôme Schruyers, ingénieur industriel et chercheur au CRIG (le Centre de Recherches des Instituts Groupés de HELMo), les laboratoires NCE et GEO3 de l’ULiège, ainsi que l’entreprise Geolys.

Les scientifiques ont cherché à développer une sonde qui surveillerait la présence de polluants dans les nappes phréatiques. Et plus précisément de polluants organiques issus des produits pétroliers, tels que les BTEX. L’abréviation du Benzène, Toluène, Éthylbenzène et Xylènes.

« Ces éléments écotoxiques et cancérigènes se retrouvent le plus souvent à proximité des stations-service, des autoroutes et des industries. Ils peuvent s’écouler dans les terres et rejoindre de cette manière les nappes, alors polluées pour une longue période »indique Sophie Pirard.

Des eaux sondées en continu

Le projet est né à la suite des recherches sur les techniques d’analyse en continu des polluants dans les eaux souterraines. Le Dr Pirard constate alors que peu de méthodes existent pour étudier de manière constante les nappes phréatiques. Et qu’aucun outil n’est commercialisé.

« Actuellement, la détection des polluants pétroliers dans les eaux souterraines est souvent réalisée de manière discontinue, en prélevant ponctuellement des échantillons qui sont ensuite analysés par des techniques souvent coûteuses, énergivores, et qui prennent du temps »explique la coordinatrice de l’étude.

L’intérêt du projet MOPI réside donc dans le développement d’une sonde qui détecterait en temps réel les polluants. L’idée serait de placer la sonde sur un site donné, qui analysera en continu les eaux, et donnera l’alarme en cas de concentration anormale. Un outil qui permettra d’agir rapidement pour protéger les réseaux d’eau souterraine.

La fibre optique sensible aux polluants

Pour détecter ces polluants, la sonde utilise la technique de la spectroscopie infrarouge. « Concrètement, nous utilisons des fils de fibre optique, que nous coupons à l’extrémité. Au bout de cette fibre est placée une membrane qui va absorber le polluant »précise Sophie Pirard.

La sonde n’a été testée à ce jour qu’en laboratoire, mais l’équipe espère continuer à améliorer leur dispositif et l’exploiter sur le terrain.

Écoutez Sophie Pirard revenir sur les premiers résultats de l’étude

 

Des solutions pour améliorer la sensibilité de la sonde sont donc sur la table. Un second financement est attendu par l’équipe de recherche afin d’explorer ces nouvelles pistes, et à terme vendre le dispositif.

« Les entreprises et pouvoirs publics sont en effet très intéressés pour la commercialisation d’un tel outil. De plus, au-delà des BTEX, notre méthode pourrait tout à fait détecter d’autres polluants, comme les nitrates et les pesticides. Deux substances qui menacent également la bonne qualité de nos ressources »assure Sophie Pirard.

 

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