Gastro et intolérance au gluten: observer les virus un à un pour mieux les contrer

11 octobre 2017
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 4 min

Le Dr David Alsteens a de bons yeux. Plus exactement, ce chercheur qualifié F.R.S.-FNRS de l’Institut des sciences de la vie de l’UCL va se bricoler une paire de lunettes particulièrement performante. Des lunettes qui vont lui permettre d’observer les virus un à un et de mesurer leurs interactions avec des cellules animales. Le tout en temps réel. Un beau défi technologique.

Rotavirus et reovirus en ligne de mire

L’exercice n’est pas simple. Les virus affichent en effet un tour de taille de l’ordre de quelques dizaines de nanomètres (des milliardièmes de mètre)! Quant aux forces en présence, elles sont également très faibles mais aussi très rapides: l’infection se joue en quelques milliseconde.

Le but des travaux du Dr Alsteens ? Mieux comprendre comment les virus se lient à nos cellules et comment ils les infectent. « En particulier dans le cas des rotavirus, qui sont responsables des gastroentérites chez les enfants mais aussi d’autres types de reovirus dont on soupçonne qu’ils pourraient jouer un rôle dans l’intolérance au gluten », explique le chercheur. Un chercheur qui vient de bénéficier d’une bourse du Conseil européen de la Recherche pour mener à bien ses travaux. Quelque deux millions d’euros sur cinq ans sont désormais à sa disposition.

Combiner deux types de microscopie

« Pour mener à bien nos recherches, nous disposons de deux types de microscopes: un microscope à force atomique et une microscopie à fluorescence », explique l’ingénieur et docteur en chimie et biophysique de l’UCL. « Le microscope à force atomique dispose d’une très fine pointe sur laquelle nous pouvons attacher un virus. En approchant cette pointe au plus près d’une cellule animale, puis en l’éloignant, cet outil nous permet de mesurer la force de l’interaction entre le virus et la cellule. Lors de la séparation, les forces exercées entre le virus et la cellule sont mesurées avec une sensibilité telle qu’il est possible de déterminer, par exemple, le nombre et le type de liaisons établies ».

« La microscopie par fluorescence, qui se base sur un signal lumineux, nous permet elle de voir la disposition des récepteurs présents à la surface de la cellule et donc d’identifier comment le virus se lie à la cellule, comment il pénètre dans celle-ci pour l’infecter. Ces deux types de microscopie existent déjà. Nos travaux vont tenter de combiner en temps réel les informations que ces deux outils nous livrent pour mieux comprendre la dynamique de l’infection virale ».

Cette combinaison unique de techniques permettra de regarder de manière dynamique les interactions virus-cellule établies et de suivre les réponses cellulaires provoquées par ces interactions. « Des mécanismes complexes qui font entrer en jeu, dans ces cascades de réactions, de nombreux acteurs”.

Cibler les étapes clés du mécanisme d’infection

Rappelons que les virus sont de très petites particules (entre 10 et 400 nm) qui dépendent de l’hôte dans toutes les étapes de leur existence. Durant des millions d’années d’évolution et d’adaptation à leurs hôtes, les virus ont acquis les clés moléculaires qui leur permettent d’exploiter, et même de contrôler les fonctions cellulaires.

Les glycoprotéines présentes à la surface des virus sont les tickets d’entrée dans les cellules hôtes et vont interagir avec les surfaces cellulaires dès la première collision. Ce sont ces interactions virus-cellule qui vont déterminer le mécanisme d’attachement, l’entrée cellulaire et le transfert du matériel génétique. Elucider ces interactions complexes entre les virus et les récepteurs cellulaires pour mieux comprendre les mécanismes d’infection est donc un challenge important.

Sur le long terme, grâce aux mécanismes moléculaires mis en évidence, l’objectif des chercheurs de l’UCL est de développer des molécules antivirales qui cibleront les étapes clés du mécanisme d’infection.

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