Une équipe pluridisciplinaire de chercheurs et de médecins de l’Hôpital universitaire de Bruxelles (Érasme/ULB) vient de mettre en lumière l’origine d’un mécanisme qui amène certains bébés à développer des malformations vasculaires au niveau du cerveau. Et ce, avant leur naissance. « Il s’agit d’un problème qui concerne environ dix bébés par an en Belgique », souligne le Pr Boris Lubicz, neurochirurgien à l’hôpital Érasme et directeur du Service de Neuroradiologie Interventionnelle.
Ces malformations vasculaires cérébrales rares hypothèquent sérieusement la survie du bébé dès la naissance si une série d’opérations chirurgicales ne sont pas menées. « Le problème réside dans le fait que, durant le développement du fœtus, les artères et les veines du cerveau se connectent directement entre elles », détaille le spécialiste. « C’est un peu comme si un océan (de sang) se déversait directement dans un ruisseau (les veines). Pour compenser ce court-circuit, et irriguer les autres organes, le cœur du fœtus grossit énormément. Il grossit tant que cela peut provoquer son arrêt à la naissance. Ce genre de problème est généralement détecté lors de l’échographie réalisée au cours du troisième mois de grossesse. »

Le poison-zèbre comme modèle
Une des veines du cerveau les plus touchées par ce problème est la veine de Galien. Afin de mieux comprendre pourquoi et comment ce type de problème survient, l’équipe pluridisciplinaire de l’ULB a développé un modèle animal de veine de Galien qui reproduit ce genre de malformations vasculaires cérébrales chez des larves de poisson-zèbre.
C’est le Pr Nicolas Baeyens, directeur du Laboratoire de Physiologie (ULB), qui vient de réussir cet exploit. « Nos résultats établissent un lien entre le développement des malformations et la fusion insuffisante des vaisseaux sanguins précurseurs, un processus régulé par le flux sanguin et les réponses des cellules endothéliales (cellules qui tapissent la face interne des vaisseaux sanguins, des vaisseaux lymphatiques et du cœur, NDLR) », indique-t-il.
Avec l’équipe pluridisciplinaire, il a également identifié deux molécules qui réduisent cette anomalie vasculaire dans son modèle animal. De quoi envisager un jour le développement d’un médicament à administrer à la future mère, afin de réduire ce type de problème chez son futur enfant.
Réduire l’ampleur de la malformation avant la naissance
« Notre but est de pouvoir, à terme, faire évoluer, avant la naissance, la forme la plus grave de cette malformation vers une forme moins agressive », reprend le Pr Lubicz. « Cela nous permettra alors d’intervenir chirurgicalement sur le bébé quand il a quatre à six mois, et non dans les heures ou les jours qui suivent sa venue au monde. Cela signifie des opérations moins contraignantes que sur un tout jeune nourrisson, mais aussi de meilleures chances de survie.»
Cette avancée pourrait changer l’histoire naturelle de ces maladies très complexes. Elle pourrait même être appliquée à d’autres malformations vasculaires plus fréquentes touchant d’autres organes et également beaucoup plus de patients que les bébés, estime l’équipe.
Pour ces chercheurs et médecins de l’Hôpital universitaire de Bruxelles (HUB), l’avenir est tout tracé. Il s’agit de tester, sur leur modèle de larve de poisson-zèbre, les médicaments existants. Et de sélectionner des candidats potentiels à un traitement chez l’être humain. Mais aussi d’étudier leur éventuelle toxicité, pour ensuite développer des études cliniques. Et enfin, d’élargir leur modèle à d’autres malformations beaucoup plus fréquentes, notamment les malformations artério-veineuses, et dans d’autres organes.