Préparation d’un équipement du module martien Schiaparelli en salle “propre”. Photo © ESA

ExoMars 2016: surtout ne pas polluer la planète rouge

15 mars 2016
par Christian Du Brulle
Temps de lecture : 4 minutes

Depuis hier soir, c’est désormais officiel: la sonde européenne ExoMars est bien en route pour la planète rouge. Après son décollage depuis le cosmodrome russe de Baïkonour, au Kazakhstan, la sonde a effectué trois orbites de plus en plus larges autour de la Terre. A chaque fois, elle a subi une accélération au moment le plus indiqué.

Au final, la sonde européenne a été éjectée de l’attraction terrestre et file en direction de Mars. Depuis, elle a pris vie et a signalé être en pleine forme à ses pilotes du Centre de contrôle des vols spatiaux de l’Agence spatiale européenne (ESA) situé à Darmstadt (Allemagne).

 

Voici les premières secondes de l’envol de la sonde ExoMars 2016 à bord de la fusée russe Proton

 

 

ExoMars est donc en route pour accomplir sa mission scientifique : tenter de détecter d’éventuelles traces de vie sur la soeur jumelle de la Terre. Divers instruments de détection à bord du module orbital TGO en sont chargés. D’autres instruments, placés sur l’atterrisseur Schiaparelli, qui doit se poser sur Mars le 19 octobre prochain, sont davantage orientés vers la validation de diverses technologies destinées au prochain atterrisseur martien (ExoMars 2018).

 

Garantir la virginité bactériologique de la sonde

Pour Schiaparelli, les ingénieurs de l’Agence spatiale européenne et de la société Thales Alenia Space Italie (qui a construit le module) ont dû tenir compte d’une contrainte supplémentaire: la “virginité” bactériologique de la sonde.

Pas question de déposer sur Mars, via le module Schiaparelli, d’éventuelles bactéries terrestres”, souligne Gerhard Kminek, en charge de la “protection planétaire”, à l’Agence spatiale européenne (ESA).

“Cette pollution est impensable. D’abord pour préserver Mars d’éventuelles contaminations, mais également pour respecter les règles internationales en la matière auxquelles ont souscrit les principales agences spatiales dans le cadre du Traité de l’ONU sur l’espace lointain. Ces règles ont été établies par le Comité pour la recherche spatiale (COSPAR) ».

Elaborer et respecter une “chaine du propre”

Bref, avant d’envoyer des sondes d’exploration dans le cosmos, il faut les aseptiser. Pour l’assemblage du module Schiaparelli, une nouvelle salle blanche (sans poussières) a été construite chez Thales Alenia Space. Sa particularité: elle permet également un contrôle strict de toute contamination bactériologique.

Une “tente propre”, a également été mise au point. Cette “salle blanche bactériologique” transportable a servi lors de tests du module sur d’autres sites, y compris au cosmodrome de Baikonour, juste avant le décollage de la sonde.

Désinfection à l’alcool et à la chaleur sèche

Les équipements de la sonde ont été nettoyés avec de l’alcool stérile (isopropyl à 80%). Schiaparelli a été exposé à un traitement à la chaleur sèche allant jusqu’à 125°C. Bien entendu, les salles blanches bactériologiques ont également été régulièrement nettoyées. Ici, c’est le peroxyde d’azote qui a été utilisé.

Parallèlement de nombreux tests microbiologistes (quelque 3.000) ont été menés tout au long du développement de l’atterrisseur, histoire de vérifier régulièrement qu’aucune contamination ne s’y développe.

Pour la sonde TGO, qui restera en orbite martienne afin de tenter de détecter des traces de vie dans son atmosphère, ces procédures ont été plus légères.

Nous avons surtout dû démontrer que les risques de voir ce satellite artificiel s‘écraser au sol sont quasi nuls”, indique Gerhard Kminek.

Des mesures plus strictes encore pour ExoMars 2018

Cap à présent sur la prochaine mission martienne: ExoMars 2018.

Pour celle-ci, nos procédures anti-microbes seront encore plus strictes”, indique encore le “M. Propre” de l’ESA. Non seulement le rover martien européen et son système de forage et d’analyse d’échantillons de sol seront strictement contrôlés et stérilisés, mais une fois prêts, ils seront conservés jusqu’à leur lancement dans des containers en surpression, histoire d’éviter l’entrée intempestive de tout micro-organisme indésirable”, conclut-il.

Les études exobiologiques in-situ, la détection de traces de vie sur Mars sont des objectifs scientifiques ambitieux. Encore faut-il mettre toutes les chances de son côté pour que ces éventuelles traces ne soient pas importées depuis la Terre…

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