Antennes à Redu, station de l'ESA (Agence spatiale européenne)

Space Days : le spatial wallon redescend sur Terre

15 octobre 2014
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 5 min

Une odeur de chou, d’urine de chat, de soufre ? Les technologies spatiales développées en Wallonie peuvent aider à comprendre ce qui fait soudain frémir vos narines sur Terre.
 
Comme dans la région de Virton, par exemple, où la société Spacebel (Angleur), spécialisée dans les logiciels spatiaux… a mis au point un système d’alerte aux mauvaises odeurs à proximité de l’usine à papier locale.
 
« Nous avons développé ce système dans le cadre d’Omniscientis, un projet de recherche européen, qui vient de se clôturer », précise l’ingénieur agronome Arnaud De Groof, de Spacebel. « Il s’agissait de mettre au point un système de surveillance des nuisances olfactives impliquant les citoyens (« Citizens observations »). Une sorte de « crowd sourcing » ».
 
Technologies spatiales et « contre-odeurs »
 
Après deux ans de travaux et de tests, le système est désormais opérationnel à Virton… et transférable dans n’importe quelle région, en Belgique ou à l’étranger. Cette surveillance citoyenne des mauvaises odeurs pourrait aider à mieux maîtriser ces effluves, par exemple en modulant une activité industrielle ou en émettant à la demande des « contre-odeurs », près de centres d’enfouissement techniques.
 
Quel rapport avec le spatial ? La géolocalisation des « nez » humains qui captent et signalent d’indésirables effluves et qui la caractérisent. L’intégration de ces informations avec des données météorologiques, le tracé géolocalisé des « plumes » (nuages) d’odeurs, en fonctions des vents, de l’humidité relative, du relief. Et bien sûr, le savoir-faire en matière de logiciels de l’entreprise partenaire en ce qui concerne les interfaces mobiles et web, ou encore le traitement et l’intégration des données.
 
Cette application spatiale très terrestre illustre bien la tendance actuelle qui anime le secteur spatial en Belgique. On vient d’en avoir un bon aperçu aux Space Days 2014. Cette « grand’messe » du secteur spatial wallon, organisée tous les deux ans par Wallonie Espace (voir encadré), vient de se clôturer à Transinne, sur le site de l’ Euro Space Center.
 
A l’écoute des utilisateurs
 
Cette année, les acteurs du spatial belge avaient donné rendez-vous aux institutions fédérales, régionales ou encore locales susceptibles d’utiliser les technologies spatiales. Ils avaient aussi invité leurs collègues des autres pôles de compétitivité wallons, travaillant dans un autre secteur que l’espace.
 
But de l’opération? « Lors de nos précédents “Space Days”, nous présentions nos technologies aux utilisateurs potentiels sur Terre », explique Michel Stassart (Wallonie Espace). « Cette fois, nous avons préféré nous mettre à l’écoute de leurs besoins et voir avec eux comment le spatial pouvait leur apporter des solutions ».
 
Copernicus et Galileo
 
Deux grands programmes européens étaient également à l’honneur : Galileo (le géopositionnement par satellites) ou Copernicus (de surveillance de l’environnement). Ces nouveaux outils offrent aujourd’hui un énorme potentiel de développement socio-économique, après le secteur des télécoms, qui a jusqu’à présent été la vache à lait du secteur spatial.
 
Pour la Wallonie, le spatial est une affaire qui marche, d’un point de vue économique mais aussi scientifique. La concentration d’entreprises et d’équipes académiques actives dans ce domaine en atteste. Toutefois, les nouvelles applications que Copernicus et Galileo laissent entrevoir ne leur sont pas exclusivement réservées.
 
Multiplication d’applications inattendues
 
« On arrive à des services de plus en plus inattendus dans ce domaine », souligne Michel Stassart. « Par exemple le monitoring de patients participants à des tests cliniques ».
 
L’attrait du géopositionnement est aussi utile… au sein même des aéroports. En assurant le suivi en temps réel du ballet de véhicules qui tournent autour d’un avion en escale, on peut éviter certains “embouteillages” au sol et ainsi réduire le temps d’immobilisation de l’aéronef sur la tarmac. Un avion, c’est fait pour voler. En gagnant de précieuses minutes à chaque escale, on peut envisager un vol supplémentaire de l’appareil sur la journée, ce qui est tout bénéfice pour la compagnie aérienne.
 
Dans le domaine de l’environnement, les satellites en orbite permettent de suivre l’évolution de l’humidité du sol. Mis en relation avec d’autres données, comme les prévisions météorologiques, cela permettent de prédire des épisodes d’inondations, l’apparition de conditions favorables à la multiplication d’insectes à problèmes, de surveiller la croissance des végétaux, la maturité des récoltes, etc.
 
Moins rapide sans doute, mais tout aussi important dans notre région : le suivi en temps réel des péniches et autres embarcations qui circulent sur nos fleuves et canaux est également une des applications spatiales déjà en service, précise Jean-Claude Jasselette, du Département de géomatique au Service Public Wallonie (DGO4).

 

On pourrait continuer longtemps ce florilège. Avec les Space Days 2014, c’est donc vers l’avenir que les regards se tournent. La multitude d’applications encore insoupçonnées, que les nouveaux outils spatiaux laissent entrevoir, est décoiffante. Des applications portées par diverses politiques, tant au niveau wallon qu’européen. Pour booster le secteur, la Commisison européenne a décidé que les données du programme Galileo seront, dans leur grande partie, accessibles gratuitement. Place dès lors à l’imagination pour les transformer en services utiles au plus grand nombre.

 

Wallonie Espace

 

Wallonie Espace représente le secteur spatial wallon au sein du pôle de compétitivité aérospatial “Skywin”, lequel regroupe les acteurs du spatial et de l’aéronautique en Wallonie.

Wallonie Espace compte 32 acteurs industriels et académiques. Il représente un volume de 1600 emplois directs et génère, avec les activités spatiales, un chiffre d’affaires annuel de 220 millions d’euros. Les membres de Wallonie Espace sont actifs dans les programmes de l’Agence spatiale européenne (ESA), dans les lanceurs spatiaux Ariane et Vega, dans les satellites destinés à des missions scientifiques ou commerciales, dans les expériences scientifiques et dans les services liés au spatial (géopositionnement, observation de la Terre et télécommunication).

 

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