SÉRIE (3/3) Science et cinéma
Le « best-seller » du cosmologiste britannique Stephen Hawking s’intitule « Une brève histoire du temps ». Le film qui sera la semaine prochaine sur les écrans en Belgique et qui relate la vie du célèbre scientifique est pour sa part intitulé « Une merveilleuse histoire du temps ».
Et merveilleuse, l’histoire telle que rendue par le réalisateur britannique James Marsh, l’est effectivement. Marsh s’est largement inspiré de l’autobiographie de Jane Hawking, « Voyage à l’infini, ma vie avec Stephen », pour nous la raconter.
Deux années de sursis, en 1963
Jane, étudiante en Arts à Cambridge, a épousé Stephen Hawking alors qu’on venait, en 1963, de diagnostiquer la maladie dégénérative du brillant doctorant en physique. Les médecins ne lui donnaient à l’époque que deux années d’espérance de vie. Le couple a eu trois enfants. Cinquante ans plus tard, ces jeunes parents sont devenus grands-parents…
Si la maladie de Stephen Hawking a progressé, et que son corps s’est dégradé, son cerveau a lui parfaitement continué à faire reculer les frontières les plus éloignées de la physique.
Le film nous montre, de manière parfois intimiste, comment Stephen et Jane Hawking ont, ensemble, révolutionné le monde de la médecine et de la science, pour aller au-delà de ce qu’ils auraient pu imaginer : le vingt et unième siècle.
Le film peut compter sur des acteurs de qualité. Hawking est interprété par Eddie Redmayne tandis que son épouse est incarnée par Felicity Jones.
Le volet scientifique de la vie du célèbre cosmologiste est par contre assez succinct à l’écran. Dommage, alors que Stephen Hawking compte parmi les plus grands des scientifiques actuels en ce qui concerne, par exemple, la théorie des trous noirs.
Big Bang et trous noirs
“Stephen Hawking a beaucoup travaillé sur les trous noirs et la cosmologie”, confirme le Pr Marc Henneaux, directeur des Instituts de Physique Chimie Solvay (ULB et VUB). “En ce qui concerne les trous noirs, il a démontré leur caractère inévitable à un moment où l’ensemble des physiciens était sceptique à leur propos. Depuis, les astrophysiciens les ont même observés”.
Stephen Hawking a également prédit un effet spectaculaire lié aux trous noirs et baptisé depuis « l’effet Hawking ».
« Il a prouvé que les trous noirs n’étaient pas tout à fait noirs », continue le Pr Henneaux, qui a eu l’occasion d’inviter le Pr Hawking à diverses reprises à Bruxelles ces dernières années. « Hawking a montré que si on tient compte de la mécanique quantique, les trous noirs pouvaient également émettre un rayonnement. Il s’agit d’un rayonnement extrêmement faible, inobservable, mais qui a toute son importance d’un point de vue théorique”.
“Si on prend comme exemple un trou noir astrophysique, dont la masse serait la masse du Soleil, celui-ci émettrait un rayonnement à une température beaucoup plus basse que le rayonnement de fond cosmologique » (-270 degrés Celsius environ, soient quasi le « zéro absolu » dans l’Univers).
La même chaire que Newton à Cambridge
« Ceci ouvre des portes vers de nouvelles questions astrophysiques et cosmologiques étudiées actuellement, comme l’entropie des trous noirs », souligne le Pr Marc Henneaux. Ce n’est donc pas par hasard si Stephen Hawking a occupé la même chaire de professeur lucasien (Lucasian Chair of Mathematics) à l’Université de Cambridge, jadis occupée par Newton!
De tout ceci, comme de la suite de travaux d’Hawking sur le caractère inévitable du Big Bang ou encore l’inflation, il n’est pas vraiment question dans le « biopic » qui arrive dans les salles obscures.
Un humour subtil
Le film dépeint par contre un homme à l’humour toujours subtil et saillant. Nous avons pu l’expérimenter à l’occasion d’une interview réalisée voici quelques années, en marge d’une de ses conférences données en Belgique. La question était simple: « Quels liens tissez-vous entre trous noirs et trous de ver ? À supposer qu’un engin spatial avec un équipage puisse plonger dans un trou noir, à quel type de singularité ces aventuriers seraient-ils confrontés ? ».
La réponse de Stephen Hawking l’était tout autant : « Il est possible que l’intérieur d’un trou noir puisse jouer le rôle de « pont » entre différents univers. Mais il est quasi certain que l’espace-temps y débouche sur une singularité, ce qui n’est pas une bonne nouvelle pour les aventuriers ».
Une nouvelle préoccupation: l’intelligence artificielle
Stephen Hawking reste très attentif à l’évolution des connaissances et des technologies. Tout récemment (le 11 janvier), il a cosigné avec des dizaines d’autres scientifiques une lettre ouverte relative aux développements, à l’utilisation et à l’encadrement des travaux relatifs à l’intelligence artificielle. Un document qui renvoie à un long article explorant les bénéfices et les risques d’une mauvaise utilisation de divers axes de recherches dans ce domaine.
Le livre « Une brève histoire du temps »
Le fameux livre de vulgarisation scientifique de Stephen Hawking, « Une brève histoire du temps », a été publié en 1988 aux Etats-Unis. Avec ses multiples traductions, il s’est vendu à plus de 10 millions d’exemplaires. Le physicien britannique y détaille diverses notions complexes comme la théorie des trous noirs, le Big Bang ou encore la théorie des cordes qui occupent aujourd’hui encore beaucoup les spécialistes.
Cette théorie pourrait permettre un jour, parmi d’autres, d’élaborer une théorie unifiant tous les phénomènes se produisant dans l’Univers, tant à des échelles gigantesques que microscopiques: la gravitation quantique.