Les Européens, toujours très confiants dans la science et la technologie

16 novembre 2021
par Michel Claessens
Durée de lecture : 6 min

La Covid-19 n’a manifestement pas entamé la confiance que les Européens témoignent traditionnellement en faveur de la science et la technologie. Selon le dernier « Eurobaromètre », vaste sondage d’opinion réalisé par la Commission européenne, 86% des Européens estiment que l’influence de la science et de la technologie est globalement positive.

Par rapport à 2014 et dans tous les pays, davantage d’Européens estiment que l’influence globale de la science et de la technologie est positive © Eurobaromètre – Cliquez pour agrandir

Il s’agit du plus grand sondage scientifique d’opinion jamais réalisé en Europe puisqu’il a pris le pouls des populations dans pas moins de 38 pays (les 27 Etats membres de l’Union, plus l’Albanie, le Monténégro, la Macédoine du Nord, la Serbie, la Turquie, la Bosnie-Herzégovine, l’Islande, le Kosovo, la Norvège, la Suisse et le Royaume-Uni). L’enquête a cependant révélé quelques points noirs, notamment le fait, comme l’ont déjà révélé les Eurobaromètres précédents, que les Européens se plaignent toujours d’une sous-information scientifique et technique.

La Chine devant l’Europe

Le sondage, conduit entre le 13 avril et le 10 mai 2021, principalement grâce à des interviews face à face réalisées simultanément dans les pays participants, donnent une photographie de la perception de la science et de la technologie en Europe, onze ans après la dernière édition, publiée en 2010. Il est donc intéressant de voir si des changements notables ont eu lieu dans l’opinion publique, d’autant plus que la Covid-19 est passée par là…

Les résultats confirment le niveau élevé de l’intérêt des Européens pour la science et la technologie (82 %) ainsi que la volonté de ceux-ci d’en apprendre davantage à ce sujet (54 %). On note même un intérêt croissant pour les nouvelles découvertes médicales, qui est passé de 82 % à 86 % depuis 2010, fort probablement à cause de la pandémie, ainsi que pour l’environnement et le changement climatique (+ 5%) ainsi que les découvertes scientifiques et les développements technologiques (+ 3%).

Si les résultats soutiennent une forte confiance dans la science, les Européens ont aussi exprimé quelques inquiétudes : plus de la moitié des personnes interrogées estiment qu’en matière de découvertes scientifiques, la Chine (58%), les Etats-Unis (57%) et le Japon (54%) ont pris les devants par rapport à l’Union européenne.

La Commissaire européenne à l’innovation, à la recherche, à la culture, à l’éducation et à la jeunesse, Mariya Gabriel, a bien résumé les aspects positifs et moins positifs de l’enquête conduite par ses services : « Il est rassurant de constater que la science et la technologie sont, dans l’ensemble, perçues positivement, car elles sont indispensables pour faire face à la pandémie de coronavirus, au changement climatique, à la perte de la biodiversité et à un grand nombre d’autres défis urgents. Dans le même temps, nous devons répondre aux préoccupations des citoyens qui estiment que les avantages de la science et de la technologie ne sont pas répartis de manière égale, accorder une plus grande attention à la dimension hommes-femmes dans le contenu de la recherche, et réfléchir à la manière dont les citoyens et les autres parties prenantes peuvent participer davantage aux activités de recherche et d’innovation. »

Une progression spectaculaire

Comme en 2010, la télévision reste la première source d’information des Européens en matière de science et technologie. Mais, tout comme en 2010, leur niveau d’information reste insuffisant : ils sont seulement 21% à s’estimer très informés sur les questions environnementales et ce pourcentage tombe à 13% pour les découvertes médicales.

Les personnes interrogées attendent de plusieurs technologies actuellement en développement un effet positif sur notre mode de vie d’ici les 20 prochaines années, notamment l’énergie solaire (92%), les vaccins et la lutte contre les maladies infectieuses (86%) et l’intelligence artificielle (61%).

Si ce sondage confirme l’opinion positive à l’égard de la science et de la technologie, il montre aussi que des changements importants se sont produits dans certains pays.

Au Portugal, par exemple, le nombre de personnes très intéressées dans la science et la technologie a progressé de près de 50% en onze ans ! Plus précisément, les pourcentages de personnes très intéressées dans les découvertes scientifiques et les développements technologiques, les problèmes environnementaux (y compris le changement climatique) et les découvertes médicales ont progressé respectivement de 48%, 48% et 55% par rapport à 2010.

En Irlande, 80% des personnes interrogées souhaitent que l’on parle plus de science dans des endroits comme les maisons communales, les musées et les bibliothèques. En revanche, l’enquête met en lumière des clivages importants dans la société européenne – notamment entre l’Ouest et l’Est ainsi qu’entre les personnes ayant une formation supérieure et celles qui n’en ont pas. Par exemple, le pourcentage de personnes considérant que, dans la vie quotidienne, il n’est pas important de connaître la science a augmenté de plus de 10% en Bulgarie, Hongrie, République tchèque, Pologne et Roumanie. Enfin, dans des pays comme la France et l’Italie, la situation a globalement peu évolué par rapport à 2010.

La Belgique, championne de la culture scientifique ?

Le questionnaire comportait également un test de connaissances scientifiques, sous la forme d’un quiz de 11 affirmations, comme « Les premiers hommes étaient contemporains des dinosaures », « Les antibiotiques tuent les virus et les bactéries » et « Les lasers fonctionnent grâce aux ondes sonores ». Les personnes interrogées devaient répondre par vrai ou faux.

Est-ce un effet de la pandémie ? Dans pratiquement tous les pays européens, et particulièrement en Belgique, le pourcentage de personnes qui croient que les antibiotiques tuent autant les virus que les bactéries a diminué, à l’exception de la Grèce, la Bulgarie, la Roumanie, la Croatie et la Hongrie. Un succès de l’information médicale ? © Eurobaromètre – Cliquez pour agrandir

Globalement, les scores sont relativement peu élevés, mais les meilleures réponses ont été données au Luxembourg, en Belgique et en Suède.

Les connaissances scientifiques, telles que mesurées par les réponses à 11 affirmations, semblent plus développées au Luxembourg, en Belgique et en Suède © Eurobaromètre – Cliquez pour agrandir

Quelques questions étant identiques à celles posées lors du précédent Eurobaromètre, il est possible d’évaluer l’évolution des scores entre 2005 et 2021. C’est une déception : les résultats montrent une baisse des taux de bonnes réponses. Serait-ce le signe que la culture scientifique est en train de régresser en Europe ?

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