© NASA
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Elfes et sylphes mobilisent les chercheurs d’Uccle

18 avril 2018
par Christian Du Brulle
Temps de lecture : 4 minutes

A Uccle, les chercheurs de l’Institut d’Aéronomie spatiale de Belgique (IASB) s’intéressent beaucoup aux elfes, aux sylphes et autres jets bleus… Pourquoi développent-ils soudain une passion pour ces créatures mythologiques?

« En réalité, il s’agit ici de phénomènes lumineux électromagnétiques survenant dans la haute atmosphère et qui sont liés aux orages terrestres », indique la Dre Norma Crosby (IASB). La chercheuse les étudie depuis plusieurs années.

La semaine dernière, ASIM, un nouvel instrument de l’Agence spatiale européenne (ESA) a été installé à l’extérieur de la Station spatiale internationale. Sa gestion quotidienne et la distribution de ses données sont assurées par le B.USOC (Belgian User Support and Operations Centre), lui aussi situé à Uccle, dans les locaux de l’Institut d’Aéronomie spatiale de Belgique. Il devrait aider la scientifique à en savoir davantage sur la fréquence d’apparition de ces mystérieuses manifestations.

Phénomènes lumineux transitoires

L’expérience ASIM, de facture danoise, va, pendant deux ans au moins, observer la Terre et plus particulièrement les régions où des orages se déclenchent. Si au niveau du sol, le phénomène lumineux associé aux orages est bien connu (la foudre), on connait moins ceux générés par ces événements qui se produisent au-dessus des nuages et jusqu’à une altitude de 100 kilomètres environ: les phénomènes lumineux transitoires (en anglais TLE : Transient Luminous Events). C’est ce que va tenter d’observer la caméra travaillant dans le rayonnement visible d’ASIM. Et quand on dit transitoire, c’est effectivement très rapide. On parle d’événements qui ne durent que quelques millièmes de seconde…

La famille de TLE se compose de différents membres:

  • Les sylphes rouges (red sprites): des flashs lumineux visibles de quelques millisecondes à quelques centaines de millisecondes dont la zone la plus brillante se situe à une altitude variant de 65 à 75 km. En dessous de la zone rouge plus brillante apparaissent des structures filiformes bleutées ressemblant à des filaments qui descendent souvent jusqu’à une altitude de 40 km. Ces phénomènes apparaissent souvent par groupe de deux ou trois.
  • Les jets bleus (blue jets). Plutôt rare, ce petit flash lumineux de couleur bleue en forme de cône s’observe au sommet des nuages d’orage et disparait à une altitude de 40 à 50 km. Des  jets bleus géants ont aussi été observés. Ils atteignent l’altitude des sylphes.
  • Les elfes (elves): Ce phénomène est causé par les éclairs les plus intenses et apparaît parfois avec des sylphes. Il se forme à une altitude d’environ 90 km. Les elfes s’élargissent à la vitesse de la lumière, comme de petites vagues lorsqu’on jette un caillou dans l’eau, mais en moins d’une milliseconde!

« Au-dessus des éclairs et des nuages d’orage se développent également d’autres flashes », indique Michel Kruglanski, directeur du B.USOC. « Il s’agit de bouffées de rayonnements gamma terrestres (« TGF » ou « Terrestrial gamma ray flashes »). Un autre capteur équipant ASIM est plus spécifiquement chargé d’observer ces rayonnements », précise-t-il.

Changements climatiques et risque pour le tourisme spatial

A l’IASB, la Dre Crosby s’intéresse aux elfes, aux sylphes et autres jets bleus d’un point de vue statistique. D’autres chercheurs, répartis en quelque 80 équipes issues d’une trentaine de pays, travaillent en Europe et ailleurs dans le monde sur les mécanismes physiques et chimiques à l’origine de ces phénomènes. « Mais également sur leurs liens et leur impact sur notre atmosphère en liaison avec le climat de notre planète. Sont-ils plus fréquents à cause des changements climatiques que nous connaissons actuellement? Voilà une des questions que nous voulons explorer », indique la Dr Crosby.

« Sans oublier leur impact sur les êtres vivants. Bien sûr, ils ne se produisent que bien au-delà des limites où circulent actuellement les avions de ligne », souligne encore la chercheuse. « Mais qui sait, demain, avec l’émergence et le développement du tourisme spatial, jusqu’à 100 km d’altitude, quel pourrait être leur impact sur la santé des touristes de l’espace ? »

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