Dans quelques heures, Picasso et Simba, deux satellites scientifiques belges, devraient se retrouver en orbite. Lundi, les deux CubeSats doivent, en effet, être expédiés dans l’espace au moyen d’une fusée Vega, tirée depuis le port spatial européen de Kourou, en Guyane française. Leur départ était prévu en mars dernier, mais le vol avait été reporté suite à la pandémie de coronavirus qui a frappé la planète.
Picasso et Simba sont des CubeSats. Ils font partie d’un ensemble de 53 satellites qui seront lancés en même temps, à l’occasion du vol de validation du nouveau service de lancement de petits satellites (SSMS) d’Arianespace, la société qui commercialise les lanceurs européens.
Cette appellation de CubeSats fait référence aux dimensions de ces satellites. Ils se composent d’un ou de plusieurs modules de forme cubique, standardisée, de 10 cm de côté. Dans le cas de Simba et de Picasso, il s’agit d’engins composés chacun de trois cubes.
Une haute atmosphère sous haute surveillance…
Picasso est un satellite de 3,5 kilos développé sous la direction l’Institut royal d’Aéronomie Spatiale de Belgique (IASB). Ce « PICosatellite for Atmospheric and Space Science Observations » a été construit en en partenariat avec AAC Clyde Space Ltd (Royaume-Uni), l’ESA (l’Agence spatiale européenne), le VTT Technical Research Center (Finlande) et le Centre spatial de Liège (Belgique).
Pendant deux ans, depuis son orbite passant au-dessus des pôles de la Terre, à une altitude de 530 km environ, il va étudier l’atmosphère terrestre et sa composition grâce à ses deux instruments scientifiques.
L’instrument VISION (Visible Spectral Imager for Occultation and Nightglow) est un spectromètre imageur miniaturisé. Mis au point par le partenaire finlandais, sa caméra mesurera la lumière visible du Soleil (de 430 à 800 nm), durant son passage dans l’atmosphère terrestre, lors des levers et des couchers du Soleil.
Avec cette mesure, les scientifiques, dont le Dr Didier Fussen, de l’Institut d’Aéronomie Spatiale de Belgique, qui est le chercheur principal concernant cet instrument, pourront en déduire des informations sur la distribution verticale de l’ozone dans la stratosphère. Celui-ci joue notamment un rôle dans la protection de la Terre et de ses habitants face aux UV du Soleil.
Le second instrument présent sur le satellite Picasso a été baptisé SLP: les initiales de « Sweeping Langmuir Probe ». Quatre sondes Langmuir en forme d’aiguille le composent. Elles peuvent détecter de faibles courants électriques. De quoi permettre aux chercheurs de déterminer la densité électronique et la température dans l’environnement direct du satellite. Ces informations devraient permettre de mieux comprendre comment interagissent la magnétosphère et l’ionosphère.
Un thermomètre spatial pour la planète
Le second CubeSat belge, Simba, a été mis au point par l’Institut Royal Météorologique (IRM), en collaboration avec la KULeuven. Simba (« Sun-earth IMBAlance ») s’intéresse au bilan radiatif de la Terre. C’est une sorte de thermomètre spatial destiné à prendre la température de la planète.
En réalité, Simba va s’intéresser à la différence entre le rayonnement solaire qui atteint la Terre et celui qui est réémis par la planète. Pour mesurer ce rayonnement au sommet de l’atmosphère, le satellite est équipé d’un radiomètre.
« L’origine principale du changement climatique résulte de la quantité croissante de chaleur provenant du Soleil qui est retenue dans notre système atmosphérique », indique le Dr Stijn Nevens, de l’IRM (https://www.meteo.be). « Pour le quantifier directement, nous devons mesurer la quantité d’énergie solaire que la Terre reçoit (l’irradiation solaire totale) et la quantité de cette énergie qui est réfléchie par la surface et l’atmosphère de la Terre, ou qui est rayonnée sous forme d’énergie thermique de plus grande longueur d’onde. En soustrayant le second du premier, on obtient un chiffre dénotant le bilan radiatif de la Terre, soit la quantité d’énergie conservée par la planète qui n’est ni réfléchie ni rayonnée ».
De tels radiomètres existent déjà. Soit ils mesurent l’énergie « entrante », en observant le Soleil, soit l’énergie « sortante », comme ceux qui équipent les satellites météorologiques d’Eumetsat. L’idée avec Simba est d’opérer cette double mesure au moyen d’un même instrument.
Avec ces deux CubeSats, les scientifiques belges espèrent pouvoir démontrer que de petits instruments scientifiques sont capables de livrer des données d’une grande qualité. De quoi réduire les coûts de prochaines grandes missions scientifiques spatiales.