De papier, de parchemin ou de bytes, les archives sont tout sauf une préoccupation poussiéreuse. « Pourtant, les clichés ont la vie dure », soupire Bérengère Piret. « Une archive n’est pas qu’un vieux document qui dort dans un carton et qui n’a plus de valeur. Une archive, c’est bien plus qu’un support. C’est une information. Et cette information a de la valeur », martèle l’historienne, chargée de cours au Centre de Recherches en Histoire du Droit, des Institutions et de la Société (CRHiDI) à l’Université Saint-Louis.
Une archive, ou les « archives d’une entreprise » par exemple, c’est aussi trop souvent quelque chose qui est, à tort, déconsidéré. Quelque chose qu’on regarde comme n’ayant plus d’utilité. Ici aussi, la Dre Piret remet les pendules à l’heure. « Le point de vue des archivistes d’aujourd’hui est tout autre », indique-t-elle. « L’archiviste est là pour accompagner l’information, depuis le moment même de sa création jusqu’à sa destruction, en passant par sa production, l’organisation de sa conservation et son utilisation. »
Gestionnaire d’informations
A l’heure de la digitalisation et du « big data », difficile de contredire cette analyse. « Pour les administrations publiques comme pour les entreprises privées, les associations ou même les individus, négliger les archives n’est pas vraiment une bonne idée », reprend-elle. « Il en va de la préservation de la mémoire, de l’histoire de l’institution. »
« A qui donne-t-on accès aux archives? Ici aussi, l’archiviste a son rôle à jouer », continue Bérengère Piret. « D’autant que la situation s’est complexifiée avec le RGPD et la protection des données. Sans parler de la digitalisation et des défis qui y sont liés. Je pense à la pérennité des supports, par exemple. Faut-il privilégier le « cloud », la clé USB, le disque dur, les disquettes pour lesquelles les lecteurs se font de plus en plus rares? » Et on ne parle même plus des bandes magnétiques ou des cartes perforées.
Un certificat interuniversitaire « MET@ »
Si on n’a jamais autant attendu de quelqu’un qu’il gère l’information, comme aime le rappeler l’historienne, par ailleurs Docteure en histoire coloniale et Cheffe de travaux aux Archives de l’État (Archives générales du Royaume), on manque aussi de bras et de cerveaux pour penser et mettre en place de bonnes pratiques.
« Avec la dématérialisation de l’information, les bouleversements technologiques et la multiplication des canaux de communication, toute organisation est confrontée aux défis majeurs qu’implique une saine gestion de l’information. Et pourtant, on n’engage pas davantage d’archivistes ou de gestionnaires de l’information. C’est souvent un membre du personnel administratif qui hérite de cette responsabilité, en plus de son travail habituel. Et ces personnes ne sont pas spécialement formées à cette mission… »
« En Belgique francophone, il n’y a quasi pas de formation pour apprendre à gérer des documents », déplore-t-elle. Elle pointe cependant une option de Master à l’ULB. Ou encore une spécialisation en gestion et préservation de l’information à la Haute École Henallux.
Pour combler ce vide, Bérengère Piret et ses collègues de la Haute École Bruxelles-Brabant organisent dès janvier un certificat universitaire en Management et Traitement des Archives et de l’information (MET@)
Pourquoi cette formation ? « Parce qu’il existe des obligations légales en matière d’archivage pour certaines structures publiques et privées. Parce qu’elles ont de la valeur. Parce que les archives ne sont pas le terrain de jeux exclusif des historiens. Parce qu’une bonne gestion de la mémoire d’une entreprise, d’une administration ou d’un pays est aussi un des garants de nos démocraties », conclut-elle.