Un couple de gloutons est arrivé en début d'année à Han-sur-Lesse, avec un objectif, la conservation de cette espèce.
Un couple de gloutons est arrivé en début d'année à Han-sur-Lesse, avec un objectif, la conservation de cette espèce.

Du glouton au triton, la conservation de la nature est une affaire qui marche à Han-sur-Lesse

21 avril 2015
par Christian Du Brulle
Temps de lecture : 5 minutes

Avec l’arrivée d’un couple de gloutons en début d’année, la réserve d’animaux sauvage de Han-sur-Lesse accueille désormais plusieurs spécimens de chacun des cinq grands mammifères européens (le lynx, le loup, l’ours, le bison et désormais aussi le glouton). Les « big five », comme on dit volontiers en bord de Lesse, pour faire un parallèle avec les cinq grands mammifères africains (le lion, l’éléphant, le rhinocéros, le léopard et le buffle).

 

Les « big five » de Han sont bien entendu un argument marketing. Ils sont aussi au centre de programmes d’élevage d’animaux sauvages et de conservation de la nature.

 

Sauvegarde de biotopes spécifiques en Wallonie

 

« Cette démarche liée à la conservation de la nature porte d’abord sur le site lui-même », explique Anthony Kohler, responsable adjoint de la réserve d’animaux. « Nous maintenons ou nous restaurons des biotopes naturels de qualité, comme la prairie calcaire par exemple. En coupant des plantations d’épicéas, nous avons pu restaurer ces prairies favorables à l’établissement de différentes sortes de papillons. Notamment le Moiré tardif, un des papillons les plus menacés de nos régions ».

 

Ce biotope est également favorable au développement d’autres populations d’insectes. Lesquels, à leur tour, attirent de nombreux oiseaux.

 

Le domaine de Han est aussi celui des grottes. Une aubaine pour le petit et le grand rhinolophes, deux chiroptères menacés de disparition dans notre région. Ces chauves-souris vivent en partie dans les cavités souterraines et se nourrissent volontiers d’insectes. « Nous collaborons au programme européen LIFE, en faveur de la conservation de ces espèces en ce qui concerne le suivi des populations et en réalisant les aménagements conseillés », précise Anthony Kohler.

 

Sauvegarde des populations de bisons en Roumanie

 

Retour aux cinq grands mammifères européens. « Pour certains de ces animaux sauvages menacés, nous participons à divers programmes de conservation », reprend le gestionnaire du site. « L’élevage nous permet de remettre des spécimens dans la nature. C’est le cas de nos bisons.  Depuis 10 ans, nous avons pu en réintroduire en Roumanie, en Écosse, en Espagne, en Allemagne ».

 

Autre exemple: le lynx. Le Domaine des grottes de Han participe au suivi génétique des animaux captifs dans le cadre d’un stud-book (livre généalogique) géré par l’EAZA, l’Association européenne des zoos et aquariums. « Nous avons aussi un projet d’accueil de lynx des Carpathes”, précise notre interlocuteur.

 

Les dents du loup, l’agilité de la martre et les pattes de l’ours

 

Et le glouton? « Il reste environ 1.200 gloutons en Europe, présents exclusivement en Scandinavie dont moins de 90 en captivité », indique le responsable adjoint de la réserve.

 

Le Domaine participe au « programme d’élevage européen » de cette espèce. Le glouton est le plus grand représentant de la famille des mustélidés (blaireau, fouine…).  « C’est un animal qu’on connaît peu. Il a la taille d’un blaireau, l’agilité d’une martre, les pattes d’un ours et les dents d’un loup » résume le spécialiste. « C’est un animal du Grand Nord, charognard principalement. En général il suit les loups et se nourrit des restes ».

 

Susciter une attitude « probiodiversité »

 

Pourquoi des gloutons à Han-sur-Lesse? « Parce que c’est un animal mal connu, dont on a une perception un peu imaginaire, biaisée et qui souffre d’une mauvaise réputation, comme le loup. Nous voulions le montrer, le présenter au public, le démystifier afin de le faire connaître et ainsi, favoriser son « acceptation ».

 

Cet objectif est important, y compris en Belgique. En favorisant les connaissances sur un tel animal, on ne peut que susciter la curiosité et le respect. Et ainsi, de manière plus générale, faire progresser l’importance du concept même de conservation de la nature et son corollaire: le maintien de la plus grande biodiversité possible dans nos environnements.

 

 

Les tritons chez les chats sauvages

 

Un des enclos de la réserve de Han abrite des chats sauvages. Pour observer les félins, il faut lever les yeux. Ils passent leurs journées dans les hautes branches des arbres. Si on plonge le regard dans les eaux de la vaste et lumineuse marre qui complète cette partie de la colline boisée, quelle richesse! Des crapauds, des grenouilles, des salamandres, des tritons s’offrent au regard.

 

Pour Natagora, c’est une aubaine. En cette saison, un programme de recensement des tritons est en cours. Au moyen de nasses flottantes relevées chaque jour, un étudiant de Gembloux Agro-biotech (ULg) tente de déterminer si le fameux (et le plus gros) des tritons vivant en Wallonie est présent sur le site: le triton crêté. Aux dernières nouvelles, il faisait défaut.
 

150 hectares en Fagne-Famenne

 

Le crêté se retrouve par contre ailleurs dans l’entité de Rochefort. Et il fait lui aussi l’objet de toutes les attentions. « Sa survie en Wallonie est loin d’être assurée à long terme », explique de son côté Thibaut Goret, bio-ingénieur et coordinateur du programme « Prairies Bocagères », chez Natagora.

 

« Le programme Life « Prairie bocagère », est un projet proposé par Natagora et cofinancer par la Commission européenne », précise-t-il.  « Ce projet vise à restaurer des habitats naturels en Natura 2000 en Fagne-Famenne, de Chimay à Rochefort. Le programme s’étend sur 7 années, de 2012 à 2019. Au total, 150 hectares de prairie maigre de fauche sont concernés par ce projet. Une superficie dont 100 hectares devraient devenir des réserves naturelles ».

 

Concernant le triton crêté, une étude est en cours au sein de l’association. Elle porte sur le développement de la taille de ses populations en Fagne-Famenne. Cette étude est basée sur les « empreintes digitales » du triton. En réalité sur les dessins de sa face ventrale, unique à chaque spécimen. Elle a déjà permis de déterminer que la plus grande population de tritons crêtés dans la région se situe du côté de Beauraing. Un millier de spécimens y ont été dénombrés.

 

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