Des termites de l'espèce Reticulitermes flavipes ont été identifiés en Belgique - libre de droit

Pour la première fois, des termites ont été signalés en Belgique

21 août 2024
par Camille Stassart
Temps de lecture : 5 minutes

Petites bêtes de quelques millimètres, similaires à des fourmis, les termites jouent un rôle écologique de premier plan dans les forêts tropicales, en tant que décomposeurs. Pour les sociétés humaines, en revanche, ces insectes sont de redoutables ravageurs, s’attaquant aux cultures et aux matériaux contenant de la cellulose (structures en bois dans les bâtiments, mobiliers, papiers, textiles…).

Dans une publication récente, des biologistes de l’Institut royal des Sciences naturelles (IRSNB) et du Musée royal de l’Afrique centrale rapportent la présence de termites en Belgique. Une première. Il s’agit de trois espèces exotiques distinctes, dont l’une est susceptible de s’installer dans nos régions.

« Pour l’heure, cette espèce n’a été localisée que sur un seul site, mais le risque de propagation est élevé. Il est donc important de garder un œil sur leur présence », met en garde Ann Vanderheyden, chercheuse au département de Taxonomie et phylogénie de l’IRSNB, et première autrice du rapport.

 

Termites de l’espèce Reticulitermes banyulensis © Hans Hillewaert

 

Trois sites infestés en 2 ans

Même si les termites vivent surtout en régions tropicales, certaines espèces se retrouvent aussi dans le sud de l’Europe, dans les pays méditerranéens. Et cela fait maintenant quelques années que des spécimens sont détectés plus au nord du continent.

On apprend aujourd’hui que des cas d’infestation ont été signalés en Belgique entre 2020 et 2022. Durant cette période, des termites ont été découverts en trois lieux distincts : dans une tour résidentielle bruxelloise, dans une maison située à Uccle, et dans deux serres d’un zoo bien connu de la Province du Hainaut.

Rapidement, les insectes ont été collectés et transmis à l’IRSNB pour identification. Les entomologistes Wouter Dekonink, conservateur de la collection d’entomologie de l’IRSNB, et Yves Roisin, expert en termites de l’ULB, ont, dans un premier temps, examiné leur morphologie, ce qui a permis de déterminer leur famille et leur genre.

« Identifier une espèce en se basant uniquement sur sa morphologie reste cependant très difficile. C’est pourquoi huit spécimens ont été envoyés au centre d’expertise BopCo, spécialisé dans l’identification d’espèces d’intérêt public basée sur l’étude ADN », précise Ann Vanderheyden, également membre du centre, qui réunit des chercheurs de l’IRSNB et du Musée royal de l’Afrique centrale.

Trous dans le bois laissés par les termites – libre de droit

Une faible menace… pour le moment

Résultats ? Les termites récupérés en région bruxelloise appartenaient aux espèces Cryptotermes brevis et Reticulitermes banyulensis. Dans le Hainaut, il s’agissait de l’espèce Reticulitermes flavipes.

« On ne sait pas exactement comment ces insectes exotiques sont arrivés en Belgique », indique Ann Vanderheyden. « On suppose que les deux espèces repérées à Bruxelles ont été introduites par le biais de matériaux infestés venant de régions tropicales. Pour l’espèce retrouvée dans le zoo, cela viendrait de l’importation de plantes et de terres infestées. »

La bonne nouvelle est que C. brevis et R. banyulensis n’apprécient pas les climats humides et froids, « le risque qu’elles s’installent en Belgique est dès lors très limité ». En revanche, l’identification de R. flavipes dans le Hainaut est préoccupante. D’après les chercheurs, cette espèce peut survivre jusqu’à une température de 3,6 degrés. « Celle-ci est originaire de l’est des Etats-Unis et est donc adaptée à des climats plus tempérés. Elle est d’ailleurs installée en France depuis plusieurs décennies, et a déjà été détectée en Allemagne et aux Pays-Bas. Pour le moment, ce n’est pas une grande menace en Belgique, car elle n’a été signalée que sur un seul site, et l’infestation a depuis été éradiquée. Mais cela pourrait devenir rapidement un problème si cette espèce s’installe. »

Termite de l’espèce Cryptotermes brevis – libre de droit

Vers un monitoring des termites en Belgique ?

Il est d’ailleurs possible que l’espèce R. flavipes soit présente dans d’autres endroits de Belgique sans qu’on ne le sache. « Les termites sont assez difficiles à reconnaître pour les particuliers, souvent confondus avec des fourmis. C’est quand il y a déjà des dégâts qu’on constate souvent une infestation, les termites laissent notamment de petits trous dans les bois. »

D’autre part, les termites ne sont pas monitorés en Belgique, comme le sont d’autres espèces exotiques invasives, étant donné que leur présence n’avait jusqu’ici jamais été établie. « Cela va peut-être changer à l’avenir, mais, pour le moment, il n’y pas d’investissement sur le sujet.»

Une récente étude du Laboratoire Evolution Biologique et Ecologie de l’ULB tire la sonnette d’alarme à ce sujet. Les chercheurs ont étudié la distribution potentielle de 10 espèces de termites hautement envahissantes, incluant R. flavipes. Selon eux, les grandes villes, en particulier dans les zones tropicales, subtropicales et tempérées (comme Paris, Bruxelles, ou Londres), « devraient rapidement mettre en œuvre des mesures rigoureuses de lutte contre les termites et des initiatives de science citoyenne pour prévenir et détecter de nouvelles invasions avant que des dommages irréversibles ne se produisent. »

Le potentiel destructeur de certaines espèces de termites représente, en effet, des milliards d’euros en dégâts chaque année.

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