Voter en juin plombe la participation

22 mars 2024
par Raphaël Duboisdenghien
Durée de lecture : 4 min
« Introduction à la science politique », par Pascal Delwit et Caroline Close. Éditions de l’Université de Bruxelles. VP 19 euros

Depuis son émergence à la fin du XIXe siècle, la science politique est en constante évolution. Les Éditions de l’Université de Bruxelles publient la 4e édition de l’«Introduction à la science politique» des professeurs en science politique Pascal Delwit (ULB-Bruxelles) et Caroline Close (ULB-Charleroi).

En écrivant ce livre, les politologues souhaitent faire découvrir ce que leur discipline scientifique recouvre. Les débats qui l’animent. Les objets dont elle traite et les méthodes empruntées pour analyser les faits politiques. «Certes, il faut le prendre comme tel. Il s’agit d’une introduction», signalent-ils.

Au menu: l’histoire de la discipline politologique et son champ d’investigation, ses règles. Le pouvoir politique. Le fonctionnement de la démocratie représentative. Les partis politiques. L’adhésion aux nouveaux mouvements sociaux. L’investissement dans la question sociale.

Trois élections en même temps

Le vote est obligatoire en Belgique. Les prochaines élections du Parlement européen, de la Chambre des représentants, des Parlements de Région et de Communauté se déroulent le dimanche 9 juin. Les élections communales, le dimanche 13 octobre.

Trois élections se dérouleront en même temps. La quatrième, 4 mois plus tard… «La concomitance de scrutins favorise un meilleur taux de participation», affirment les chercheurs du Centre d’étude de la vie politique de la Faculté de philosophie et sciences sociales de l’ULB (Cevipol).

«La participation électorale est bien meilleure aux élections législatives américaines l’année où elles ont lieu en même temps que le scrutin présidentiel.»

«La succession des scrutins provoque une certaine lassitude. Et parfois une difficulté à évaluer les enjeux. À l’inverse, si l’élection précédente a eu lieu un certain temps auparavant, le taux de participation sera meilleur.»

Toujours le dimanche

«Traditionnellement, le taux de participation est meilleur lorsque les élections se déroulent le dimanche, ce qui est le cas dans les pays où la religion dominante est le catholicisme ou l’orthodoxie, que lorsqu’elles se déroulent un jour de semaine», expliquent les deux politologues.

Voter au mois de juin privilégie-t-il la participation? «Les mois de juin, juillet et août génèrent une moindre participation électorale. La même observation vaut pour les vacances de printemps et d’hiver. Plusieurs analystes ont relevé que le développement du vote devancé contribue à élever la participation électorale. De même en serait-il de l’usage du vote par correspondance que le président américain Donald Trump a mis en cause avant le scrutin de 2020. Et pendant le dépouillement dudit scrutin.»

Pourquoi pas un référendum?

En Belgique, le référendum est anticonstitutionnel… «Une consultation populaire a cependant été organisée en 1950 concernant le retour éventuel sur le trône du roi Léopold III», observent Pascal Delwit et Caroline Close. «Son caractère légal reste aujourd’hui une question non tranchée. En dehors de la Suisse et, dans une moindre mesure, de l’Irlande, le procédé référendaire est très rarement utilisé. Même s’il arrive qu’il frappe les esprits, comme le référendum sur l’indépendance de l’Écosse en 2014. Ou celui portant sur l’acceptation par l’État du plan de la troïka organisé en Grèce le 5 juillet 2015. Le référendum catalan du 1er octobre 2017 a fait couler beaucoup d’encre.»

Quels sont les avantages, les inconvénients du référendum? «Les avis sont très divergents sur les vertus et les vices prêtés à la pratique. Il s’agit là de questions extrêmement débattues par le monde politique. Par les citoyennes et les citoyens et par la communauté scientifique. En vérité, il n’y a pas de réponses tranchées ou univoques à ces questions.»

La population flamande serait avantagée

Les politologues relèvent que «l’introduction d’un référendum au niveau fédéral sans autre forme de procès conduirait de fait à donner un avantage à la population flamande.»

«Plus généralement, des résultats asymétriques d’une région à l’autre seraient porteurs de dynamiques centrifuges, comme le montre la consultation populaire sur la question royale en 1950. Où 57,68% des Belges ont avalisé le retour du Roi. Mais les résultats étaient asymétriques. À Bruxelles, 51,83% et plus encore en Wallonie, 57,89%, le «non» l’a emporté. En Flandre, en revanche, avec 71,99%, le «oui» a été très largement dominant.»

Après avoir analysé des manifestes des partis des 27 États membres de l’Union européenne (UE) entre 1994 et 2018, les politologues Sergiu Gherghina (University of Glasgow) et Jean-Benoit Pilet (Université libre de Bruxelles) concluent que 45% des partis populistes soutiennent le référendum, 46% n’y font pas référence. Et 9% l’évoquent sans se positionner. Tandis que 62% des autres partis n’y font pas écho, 27% y sont favorables. Et 3% y sont hostiles, alors que 8 % y réfèrent de façon neutre.

Haut depage