Série (4) / « PassionS de chercheurs »
Quand il était jeune, il aimait concourir aux Olympiades de mathématique. Tout comme participer à des concours de piano. Et plutôt que de choisir entre ces deux passions, il décida de faire carrière dans les deux.
Aujourd’hui chercheur en mathématique à l’Université de Namur (UNamur), Nicolas Franco est donc aussi pianiste professionnel.
Pianiste et mathématicien
Issu d’une famille de musicien, Nicolas Franco joue du piano depuis ses 5 ans. Il privilégie dans un premier temps ses études de musique. « Mais j’ai toujours eu l’intention de faire les deux » précise-t-il.
Diplômé du Conservatoire de Liège en solfège puis du Conservatoire de Mons en piano. Il décide de s’inscrire en mathématique à l’UNamur.
Il continue en parallèle ses activités musicales et obtient durant son cursus un diplôme de musique de chambre au Conservatoire de Mons. À la fin de ses études, il décroche une bourse du F.R.S. – FNRS et réalise un doctorat. Ses travaux portent sur la géométrie non-commutative.
« C’est une théorie mathématique qui assemble l’algèbre et la géométrie. Mon travail est de l’appliquer à la physique. De cette façon, on développe de nouvelles théories » explique le chercheur. « La géométrie non-commutative est, par exemple, une théorie alternative, plus rigoureuse mathématiquement, à la théorie des cordes».
Après un post-doctorat de deux ans à l’Université de Cracovie (Pologne), Nicolas Franco revient à l’UNamur. Où il occupe aujourd’hui un poste de chercheur à mi-temps.
Des chiffres et des notes
L’autre moitié du temps, Nicolas Franco l’octroie à la musique. Au-delà d’un hobby, il considère le piano comme un second métier.
« Il y a des moments où je fais même davantage de piano. En 2010 par exemple, j’ai pris un congé de 2 mois au F.R.S. – FNRS quand je faisais mon doctorat pour participer au Concours Reine Élisabeth “indique le mathématicien.
Nicolas Franco donne aujourd’hui régulièrement des concerts. « Cette année-ci, j’ai donné beaucoup de concerts mêlant sciences et musique. J’ai par exemple réalisé une prestation en Pologne lors d’une grande conférence sur la cosmologie, qui se clôturait sur un récital de Chopin ».
À côté de ces concerts, le scientifique pratique le piano chaque jour. Un entraînement pouvant aller jusqu’à six heures de travail sur la même journée, lorsqu’il participe à de grands concours. Une charge de travail parfois sous-estimée par ses collèges.
“Certains scientifiques s’imaginent que le piano est un petit hobby et que je m’entraîne quinze minutes par jour. Et c’est exactement la même chose du côté des musiciens. Quand ils apprennent que je suis également chercheur, certains pensent que le piano est mon vrai métier et que je m’investis « en plus » dans les sciences » sourit-il. « Les chercheurs, comme les musiciens, partent du principe que leur domaine est celui qui demande le plus d’investissement, et que l’autre est obligatoirement annexe » .
Deux mondes à part
Jongler entre ces deux univers lui demande de l’organisation. Mais il apprécie de pouvoir passer de l’un à l’autre.
« Alterner le piano et la recherche me permet de ne pas me focaliser sur la même chose tout le temps, de m’aérer l’esprit » explique-t-il.
« Les gens pensent qu’il y a beaucoup de points communs entre la musique et les maths. Et il est vrai que dans la recherche, il faut savoir être créatif. Tout comme il existe des bases théoriques, parfois même mathématiques, dans la musique » concède Nicolas Franco. « Mais, la grande différence avec la recherche reste le côté artistique de la musique. Qui est davantage inexplicable ».
Selon lui, nous sommes incapables de rationaliser la musique. La preuve? Si c’était le cas, la recherche pourrait alors théoriser la meilleure façon de jouer un morceau.
«C’est tout simplement impossible, parce que la musique se base également sur la performance. Même si l’on sait jouer, on peut complètement rater un concert. Tout comme réaliser quelque chose d’absolument magnifique », indique le pianiste en guise de conclusion.
De la corde de piano à la théorie des cordes
par Camille Stassart
Temps de lecture : 4 minutes