Série (4 et fin) / Cerveaux baladeurs
Deux chercheuses belges, les Dr Julie Rijpens (Université de Liège-ULg) et Juliette De Maeyere (Université Libre de Bruxelles-ULB), ont choisi de poursuivre leur carrière au Canada.
Spécialisée en économie sociale, Julie Rijpens est arrivée à l’Université Mc Gill de Montréal au début de l’année 2016. « Après ma thèse défendue au sein du Centre d’économie sociale (CES) de l’ULg, j’ai continué à y travailler pendant quelques mois. Quand la possibilité de réaliser un postdoctorat à Montréal s’est présentée, je n’ai pas hésité », dit-elle.
« L’économie sociale est en plein développement, au Canada comme en Wallonie », commente cette ingénieure de gestion initialement formée à l’Université Catholique de Louvain (UCL). « A la différence que le Québec est pionnier dans ce domaine », précise-t-elle. Sa spécialité? La gouvernance dans les entreprises sociales.
L’économie sociale?
C’est la mise sur pied de modèles d’entreprises différents de ceux qu’on connaît dans une économie plus classique. Il s’agit de modèles où les entreprisse mettent leurs priorités sur d’autres éléments que le simple profit. Par exemple une finalité sociale ou sociétale.
C’est aussi une autre manière de faire de l’économie, d’organiser les relations avec des tiers, d’ organiser les processus de décisions…
La gouvernance au sein des entreprises sociales
« En Belgique, je me suis surtout concentrée sur l’étude de la gouvernance au sein des entreprises d’insertion », reprend-elle. « J’ai regardé comment les interactions qu’une organisation pouvait avoir avec son environnement proche influençaient son mode de gouvernance. Comment les interactions avec les autres parties prenantes ont un impact sur les prises de décisions, la distribution du pouvoir, etc. »
« Dans le cadre de ma thèse, j’ai pu montrer que les liens entre le mode de financement de ces organisations et les implications sur leur gouvernance étaient forts ».
Désormais « Associée de recherche postdoctorale » au sein du Laboratoire d’intégration des innovateurs sociaux (« SIIL » selon l’acronyme anglo-saxon : « Social Innovators’ Integration Lab ») de l’Université Mc Gill, elle pousse cette recherche un cran plus loin.
« Notamment en étudiant comment le fait de se financer d’une certaine manière peut avoir une implication sur le mode de gouvernance d’une entreprise sociale. Et a contrario, comment le fait de mettre en place certains modes de gouvernance peut ouvrir des financements auxquels ces entreprises n’auraient pas accès par ailleurs ».
Le postdoctorat, une formidable confrontation de nos manières de travailler
Quel est l’attrait plus général de ce postdoctorat de deux ans au Canada? « C’est un passage obligé si on envisage ensuite une carrière académique », estime le Dr Rijpens. “C’est aussi une formidable confrontation de nos manières de travailler, de nos cultures scientifiques. Ce passage me permet de voir autre chose, d’aborder d’autres questions de recherche, de découvrir et d’expérimenter une nouvelle manière de faire de la recherche-action ».
“Un postdoctorat, c’est aussi une manière d’être encore encadrée dans un centre d’excellence tout en développant ses aptitudes de recherche. C’est une démarche où chaque partenaire est gagnant. J’apporte mon expertise à l’université Mc Gill dans un domaine qui les intéresse mais où ils ne disposent pas encore de professeur”.
Son avenir? Elle le voit peut-être au Canada, peut-être en Belgique. Ici comme en Wallonie, la question de l’évaluation de l’impact social, et de la plus-value de l’économie sociale par rapport à une économie traditionnelle est une thématique qui demande encore à être approfondie », dit-elle. « Même si cela se développe déjà. Démontrer qu’il s’agit d’une économie qui tient la route, une alternative crédible est une voie de recherche importante ».
Découvrez ici ce que pense le Dr Rijpens de l’expérience postdoctorale
Professeur adjoint à l’Université de Montréal
Pour le Dr Juliette De Maeyere, issue de l’ULB, le séjour montréalais passe par l’Université de Montréal où sa carrière académique a déjà franchi une étape supplémentaire.
« Après ma thèse à l’ULB en journalisme, sur « l’usage journalistique des liens hypertextes », c’est-à-dire l’impact des technologies sur les pratiques journalistiques, j’ai fait, entre septembre et décembre 2013, un bref postdoctorat à la City University de New York », explique-t-elle.
« Dès janvier 2014, j’ai rejoint le département de communication de l’Université de Montréal, où j’occupe depuis un poste de Professeur adjoint ».
Entre ses cours sur l’histoire des médias, les médias et société, les fondements du journalisme, le Pr De Maeyere continue ses recherches.
“Dans un environnement idéal”, souligne-t-elle. “L’UdeM est une bonne université, la ville de Montréal est une ville agréable.
Si son expatriation est réussie, elle concède cependant que cela n’a pas été toujours simple”.
« Cette mobilité internationale a bien entendu un coût. Notamment social ». Il y a l’éloignement par rapport aux amis, à la famille. La nécessité de se reconstruire un réseau social. En ce qui me concerne, cela n’a pas posé de problèmes. Je ne suis par contre pas certaine que cela soit le cas pour tous les jeunes chercheurs en mobilité. »
Aujourd’hui, le Dr De Maeyere n’envisage pas de faire carrière ailleurs qu’à Montréal. « Même s’il est difficile de se projeter dans dix ou vingt ans », dit-elle.
Le poste de professeur adjoint qu’elle occupe est un poste de trois ans, renouvelable une fois. Ensuite, c’est la titularisation…
(Avec le soutien du Fonds pour le journalisme de la FWB)