L’Engoulevent de Prigogine (Caprimulgus prigoginei) est un oiseau dont le seul spécimen connu a été capturé en 1955 par Alexandre Prigogine dans le massif d’Itombwe, dans la province du Sud-Kivu en RD Congo © AfricaMuseum

L’Engoulevent de Prigogine est activement recherché

23 février 2022
par Daily Science
Durée de lecture : 4 min

En l’absence d’observations d’individus vivants au cours des 10 dernières années, plus de 150 espèces d’oiseaux sont estampillées « disparue ». L’organisation Re:wild, la American Bird Conservancy (ABC) et BirdLife International ont lancé The Search for Lost Birds, une initiative visant à mettre sur pied des expéditions pour en retrouver 10 d’entre elles dans le milieu naturel. Parmi celles-ci, l’Engoulevent de Prigogine, un oiseau de l’est de la République Démocratique du Congo (RDC). Cette espèce fut décrite par un ornithologue de l’AfricaMuseum. Et le seul spécimen connu est empaillé et conservé à Tervuren depuis 1955.

Une erreur taxonomique

L’Engoulevent de Prigogine (Caprimulgus prigoginei) est un oiseau dont le seul spécimen connu a été capturé en 1955 par Alexandre Prigogine dans le massif d’Itombwe, dans la province du Sud-Kivu en RD Congo. Depuis lors, aucune observation confirmée de cet oiseau n’a été réalisée.

Bien que le spécimen soit arrivé dans les collections du musée en 1955, ce n’est que 35 ans plus tard qu’il a été décrit comme espèce nouvelle.

« En effet, ce spécimen était alors enregistré dans les collections sous le nom d’une autre espèce, qui était, elle, déjà connue », explique Michel Louette, ornithologue du musée qui a décrit l’espèce en 1990. « Cependant, en étudiant ce spécimen, je suis arrivé à la conclusion qu’il devait appartenir à une espèce différente. En effet, il présentait des caractères qui n’avaient jamais été mis au jour auparavant. »

C’est ainsi que Michel Louette lui donna le nom Caprimulgus prigoginei, d’après Alexandre Prigogine, qui récolta le spécimen.

Préserver les habitats

L’Engoulevent de Prigogine est l’une des 10 espèces d’oiseaux, réparties sur cinq continents, qu’une large équipe internationale d’ornithologues professionnels et amateurs se donne comme mission de retrouver dans le milieu naturel.
Outre les (re)découvertes fascinantes que ces expéditions pourraient engendrer, il s’agit surtout de promouvoir la conservation des oiseaux et de leurs milieux naturels. En effet, la plupart de ces oiseaux sont originaires de régions riches en biodiversité, aujourd’hui menacées. La (re)découverte d’un oiseau rare permettrait de stimuler les efforts de conservation.

« Il est difficile de protéger les oiseaux si vous ne savez pas où ils vivent. Nos expéditions fournissent aux défenseurs de l’environnement les informations essentielles et nécessaires pour protéger efficacement les espèces d’oiseaux en voie de disparition. Trouver ces oiseaux peut faire la différence entre les sauver et les perdre pour toujours », explique-t-on chez ABC.

La redécouverte d’une espèce est souvent le premier pas vers une protection permanente. C’est notamment le cas pour la tourterelle terrestre aux yeux bleus. Après avoir disparu pendant 75 ans, cette espèce a été redécouverte au Brésil en 2015. Désormais, ABC travaille avec son partenaire brésilien SAVE Brasil pour protéger son dernier habitat. Et ainsi permettre à l’espèce de se perpétuer.

Les tourterelles terrestres aux yeux bleus se cachent dans les broussailles de sable blanc uniquement dans la région de Botumirim, dans l’est du Brésil © Ciro Albano

Complexe mais pas impossible

L’Engoulevent de Prigogine est un oiseau nocturne et discret, rendant une observation fortuite peu probable. Toutefois, dans le cadre d’une expédition ciblée, s’il est toujours de ce monde, il serait possible de le rencontrer. En tout cas, Michel Louette n’exclut pas que l’espèce survive encore aujourd’hui.

L’ornithologue a déjà vécu une expérience similaire. « Lors d’une expédition menée en 2010 et 2011 au Katanga en République Démocratique du Congo, nous avons retrouvé le Tisserin de la Lufira (Ploceus ruweti). Cette espèce, que j’avais décrite en 1982 comme nouvelle pour la science, n’était alors connue que du seul spécimen capturé en 1960 dans la même région. »

Néanmoins, si une expédition est mise sur pied pour retrouver l’Engoulevent de Prigogine, Michel Louette, aujourd’hui retraité, n’y participera probablement pas. « Je compte céder la place à la nouvelle génération d’ornithologues », conclut-il.

Tisserin de la Lufira (Ploceus ruweti) mâle. Cette photo a été publiée dans le livre Oiseaux du Katanga (de Michel Louette & Michel Hasson) © M. Hasson

 

Tisserin de la Lufira (Ploceus ruweti) femelle. Cette photo a été publiée dans le livre Oiseaux du Katanga (de Michel Louette & Michel Hasson) © M. Hasson
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